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lundi 29 juillet 2024

Le ressac nous bouscule dans l'océan du temps


Je ne souhaite plus publiquement l'anniversaire de personne sur un réseau social, mais au cas où j’aurais toujours mes anciens abonnements facebook, twitter, tumblr, etc., j’aurais sans doute fait une exception pour mon gendre. Ce qui aurait été une manière de le saluer et, surtout, une façon discrète de rappeler à ceux qui l'ignorent que cette personne si proche et si chère venait d'avoir l’âge le plus propice au bonheur. Il doit y avoir énormément d’amis et de connaissances qui s'adresseront aujourd’hui directement à celui à qui je présente mes vœux écrits dans ces non-lieux numériques pour partager avec lui un moment heureux de cette journée. Et s'ils lui souhaitent un bon anniversaire, ce qui est très bien, moi, je veux lui écrire deux mots pour lui exprimer discrètement une admiration et un attachement largement mérités. Voilà, c’est fait. Il sait déjà ce que je pense et comment je pense.


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Je n'avais jamais imaginé que ma sœur, à cinq ans, ait pu souffrir autant de la mort de notre petit frère, Jésus, à l'âge de trois ans. Trois ans, c'est bien jeune, et cinq années, c'est bien court, pour avoir une vie en commun et des souvenirs. Et pourtant, si j'en crois ce qu'elle nous racontait il y a quelques jours, la blessure est bien là, profonde et tenace, et le souvenir bien vivace dans sa tête. Notre mère était peu bavarde là-dessus, sauf avec R. Et je savais à quel point a été insupportable la souffrance de mon père après cette perte. Ce petit Jésus aux boucles blondes – longtemps gardées dans un reliquaire en argent – dont la vie avait été trop tôt emportée. Je me rends compte maintenant que notre barque pour naviguer dans la vie a eu sept passagers : mon père, ma mère, ma sœur aînée Candelas, Jésus, un autre petit étranglé par le cordon ombilical au moment de naître, une toute petite Juliana décédée deux semaines après sa venue au monde et moi en dernier, à qui on a donné le même prénom du défunt Jésus. Il y a un peu plus de huit ans entre l’aînée, Candelas, et moi, le plus petit, seuls survivants. Nous ne pouvons même pas imaginer la douleur de ceux qui nous ont mis au monde mais je me demande s’ils ne sont pas morts avec ce chagrin de n’avoir pu garder ces trois petits cœurs qu’ils avaient fait battre pour vivre longtemps et heureux.


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