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vendredi 14 juin 2019

À l'abri de la pluie de juin


« Pour consolation, comme toujours, il reste les livres, vaisseaux légers et sûrs en vue des errances à travers le temps et l’espace, voire au-delà d’eux. »
 

Ernst Jünger, La cabane dans la vigne




"Ce pauvre Palante" que Léautaud relisait "avec grand plaisir..." 

 Il lui trouvait "beaucoup de traits de [son] caractère" 
Et pour cause...  Pour plaire à Léautaud il fallait bien être quelque chose ! 
La fille unique de Georges Palante, Germaine, est inhumée dans le cimetière de Ciboure.

jeudi 6 juin 2019

Le sacre du printemps






On rentrait, il y quelques semaines, de Paris. Sur le chemin du retour à Bordeaux, j'ai eu tout le loisir de laisser mon esprit vagabonder épousant les vagues de la musique et des paysages apaisants. Je me suis surpris à repenser à ces choses qui m'animent ces dernières semaines, et je me suis laissé emporter par une douce mélancolie aux relents pas trop amers. Du dernier mardi d’avril jusqu'au dimanche cinq mai, avec Rosa, nous fûmes à Paris, où nous n'étions pas allés depuis des années, et où nous sommes descendus dans un hôtel à deux pas de l’Opéra Bastille, non loin de la Place du même nom. On a assisté vendredi 3 mai à la merveille de La flûte enchantée. Le reste du temps, nous flânâmes. Orientant une part de nos promenades vers des pèlerinages dont le but était juste de (re)voir à quoi ressemblaient certains lieux de notre mémoire, tellement chers.

On a laissé tomber les trois adresses parisiennes les plus célèbres de Céline, l'appartement de 98 rue Lepic, où il écrivit ses grands chefs d'œuvre des années 30, celui du 4 rue Girardon, d'où il dut déguerpir à la Libération, proche du précédent, et le passage Choiseul, où l'enfant résida au 64 puis au 67, semblant faire maintenant partie de locaux du Théâtre des Bouffes Parisiens. On a préféré aller écouter Bardamu à travers les voix et le corps de Franck Desmedt (et quel forgeron, ce « desmedt ! ») sur l’adaptation des textes réalisée par Philippe Del Socorro. Nous visitâmes le premier mai le cimetière du Père-Lachaise et le mur des Fédérés, caché par la foule et les couronnes. Nous vîmes quelques tombes des personnages mythiques du PCF, dont celle de Marcel Cachin, l’un des fondateurs du parti qui avait voulu fusionner communisme et diaspora (patrie) bretonne, qui avait fait partie de la direction de War Sao (debout, en français) et qui a laissé des Carnets intéressants pour la compréhension d’une époque. La tombe de Jacques Duclos, enfermant des vagues de discours qui cachaient sous la rocaille française des bribes de l’occitan de son enfance ouvrière… Celle de Thorez et, par défaut, celle de Marchais, enterré à Champigny-sur-Marne mais rappelée au souvenir des passants sur une plaque astiquée, en marbre noir (Comité National du PCF). Des tonnes de polémique autour de leur passé sous l’occupation qui sonnent presque creux aujourd’hui malgré le poids de l’histoire. Il y avait dans le cimetière des cortèges de différentes obédiences maçonniques peuplant le silence de leurs pas et leurs voix basses comme les va-et-vient d’une marée. A l'extérieur du cimetière, sur le côté ouest, a été installé l'an dernier un impressionnant monument commémoratif, un long panneau où sont inscrits les noms des quelque 95 000 Parisiens morts à la Première Guerre mondiale.

Pluie et mauvais temps. Trocadéro. Tour infestée de touristes (comme nous ?) des quatre coins du monde. Petit bistrot landais et, derrière le comptoir, un patron basque basquisant. Contemplé un moment la cour du Louvre. Je n'ai pas d'avis sur la pyramide, plus exactement sur les trois, il y en a une grande et deux plus petites. Elles ne rendent pas le lieu hideux, mais n'ajoutent certes rien à sa grandeur spectaculaire. Beaubourg sans changement apparent de l’extérieur. Nous fûmes voir ce que l'on peut voir de Notre-Dame endommagée, entourée d'un important périmètre de sécurité, si bien qu'on ne peut la regarder que depuis la rive gauche. Ils ont essayé depuis les premières heures de fabriquer une hypothèse accidentelle, tout en sachant au fond que la vérité est infiniment plus terrible et plus incroyable.

 


Nous visitâmes à fond le Marais. De la Place de la Bastille (la Bastille !) à la Mairie du troisième (périmètre en ligne de l’ancienne Tour du Temple et images d’une reconstitution virtuelle, ici) pour imaginer seulement certains lieux surchargés par le temps. La Place des Vosges. Le Marché des Enfants Rouges. Et la Brasserie Bofinger, haut lieu de la choucroute vraie des vraies.

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échantillons d'un atelier d'artisan...


Miguel Sánchez-Ostiz part de quelques lignes de Baroja, qu'il connaît comme personne pour avoir plongé dans sa profondeur abyssale en ressortissant beaucoup de trésors de cette épave inépuisable : « Où, à quel moment et pour quelle raison suis-je tombé sur ces personnes qui reviennent dans ma mémoire presque sans la toucher ni la réveiller ? » / "¿Dónde, cuando y porqué me he tropezado yo con estas gentes que vuelven a mi memoria casi sin rozarla, ni despertarla?" Et il prolonge par sa touche artisanale caractéristique ("mémoire en sommeil"), gouge incurvée à la main, la réflexion en bois dur du méchant homme d’Itzea : « En fait, il y a beaucoup de gens sur qui vous êtes tombé, presque de force, certains incontestablement redoutables, d’autres qu’il aurait été mieux de ne pas avoir connus ou traités pour leur iniquité, leur stupidité, leur duplicité ou leur vulgarité. Vous n’y pouvez rien. Comme le dit Eliot, ce qui arrive dans le temps est irrémédiable. Pas besoin de prendre des barbituriques, comme Baroja en a pris, plus particulièrement Dial de Ciba (en plus de Fonodormo), pour pénétrer à tâtons dans cette brume épaisse formée par les lambeaux de sa vie. » / "En efecto, es mucha la gente con la que te has tropezado, por fuerza casi, alguna verdaderamente temible, otra que hubiese sido mejor no haber conocido ni tratado jamás por su maldad, su estupidez, su doblez o su ramplonería. Eso no tiene remedio. Como dice Eliot se trata de tiempo irremediable. No hace falta tomar barbitúricos, como tomaba Baroja, en concreto Dial de Ciba (además de Fonodormo) para adentrarse a tentones en esa bruma espesa formada por los jirones de la propia vida." Tout est

"celui qui a goûté, jeune, à l'amanite barojienne, risque d'en être intoxiqué à vie..."

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Quelques miettes de pain barojianas, de El árbol de la ciencia, à ne pas manquer, comme Petit Poucet ... C'est pourquoi je les porte toujours sur moi et les oiseaux du temps n’arrivent toujours pas à me les picorer ! / Algunas migas de pan barojianas, de El árbol de la ciencia, para no perderse uno, como Pulgarcito… Por eso las llevo siempre conmigo: « On a l'angoisse, le désespoir de ne pas savoir quoi faire de sa vie, de ne pas avoir de plan, d'être perdu, sans boussole, sans lumière vers laquelle se diriger. Si la vie était assez forte pour vous entraîner, penser serait une merveille, quelque chose pour le passant comme s’arrêter et s’asseoir à l'ombre d'un arbre, quelque chose comme pénétrer dans une oasis de paix, mais la vie est partout stupide, et il me semble que c’est partout pareil, et que la pensée se remplit de terreurs en compensation de la stérilité d’émotions de l'existence. » / "Uno tiene la angustia, la ­de­ses­pe­ración de no sa­ber qué hacer con la vida, de no tener un plan, de en­con­tra­rse perdi­do, sin brú­jula, sin luz a donde diri­gir­se. Si la vida fuera tan fuerte que le arrastrara a uno, el pensar sería una maravi­lla, algo como para el ca­mi­nan­te detenerse y sentarse a la sombra de un ár­bol, algo como pe­ne­trar en un oasis de paz; pero la vida es estú­pida, y creo que en todas par­tes, y el pen­samien­to se llena de terrores como compensación a la este­rili­dad emo­cional de la existencia."

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Lorsque l'écrivain entreprend sa tâche, sans aucune illusion téléologique, sans la vielle rengaine de l'engagement en guise de leurre, il se trouve en pleine confrontation, disproportionnée et pascalienne (sartrienne !), entre l'homme et le néant. En tout cas, « si Orion marche vers la lumière du soleil levant, pour ne jamais l'atteindre » (Claude Simon, Orion aveugle), « chaque fois que [l'écriture] change un tant soit peu le rapport que par son langage l’homme entretient avec le monde, contribue dans sa modeste mesure à changer celui-ci. » (Claude Simon, Discours de Stockholm) / Cuando el escritor acomete su tarea, sin ningún tipo de ilusión teleológica, sin el viejo señuelo del compromiso, se sitúa en plena confrontación, desproporcionada, pascaliana (¡y hasta sartriana!) del hombre y la nada. En cualquier caso, si "Orión no alcanza nunca el sol naciente" (Claude Simon, Orión ciego), "cada vez que [la escritura] cambia, por poco que sea, la relación que gracias al lenguaje el hombre mantiene con el mundo, está contribuyendo en su modesta medida a que éste cambie" (Claude Simon, Discurso de Estocolmo).
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Deux pépites d’orpailleur :

• « le pouvoir de se nuire mutuellement régit l'univers avec autant de force que la force gravitationnelle »

• « apprendre à jongler avec les grosses caillasses de [ses] pensées »

Heptanes Fraxion, Il ne se passe rien mais je ne m'ennuie pas, éd. Cormor en Nuptial

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« La démocratie est le pire des systèmes, à l'exclusion de tous les autres. »

Sur le plateau de CNews, Étienne Chouard recadrait il y a quelques semaines Pascal Praud en lisant la citation complète de Winston Churchill. La voici, la citation, avec les passages “nettoyés” rétablis : « On a pu dire que la démocratie était la pire forme de gouvernement à l’exception de toutes celles qui ont été essayées au fil du temps ; mais il existe le sentiment, largement partagé dans notre pays, que le peuple doit être souverain, souverain de façon continue, et que l’opinion publique, exprimée par tous les moyens constitutionnels, devrait façonner, guider et contrôler les actions de ministres qui en sont les serviteurs et non les maîtres » (Winston Churchill, discours du 11 novembre 1947)

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« Une vie heureuse ne s’interroge pas sur son sens, car elle est à elle-même sa propre fin, pas une vie en fonction de quoi que ce soit ; autant dire qu’elle n’a pas de sens. » / “Una vida feliz no pregunta por el sentido, porque se siente fin en sí misma, no está en función de nada; lo que quiere decir que no tiene sentido" Rafael Sánchez Ferlosio, Carácter y destino

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Deuxième relecture. Le désir de racisme chez Céline, et Heidegger, incarne une volonté de purisme métaphysique au sens d’épurer au-devant, au-delà, au-dessus, au-dedans, de la physique des corps et des âmes, tout ce qui n’est pas estampillé les saines racines franques, germaines, blanches supposées authentiques, bien au-delà d’une question nationaliste. C’est ce que soulignent Pierre-André Taguieff et Annick Duraffour (Céline. La race, le juif), car le terme de nation peut être composite. Mais, il était docteur ! On l'avait bien pris, Aragon et d'autres, pour un progressiste, un écrivain engagé du côté des lumières et des beaux sentiments... Or, il y a dans l’imaginaire bon enfant issu des Lumières l’idée que celles-ci servent obligatoirement au bien de l’Humanité alors que Rabelais avait depuis longtemps répété l’adage ancien : « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Rien n’y fait : des générations entières continuent à croire que l’accumulation de connaissances sert automatiquement à parfaire la gentillesse humaine alors qu’elle sert tout autant à armer le côté obscur. On verra l’art, la littérature, la philosophie, la morale, la science, l’écologie, toutes ces catégories, embarquées dans une lutte pour le progrès (?) et le bien (!?) alors qu’elles ne sont pas faites pour, mais plutôt pour servir d’outils à de multiples fins, y compris le progrès et le bien, mais pas seulement. Dernier mot, donc, à M. Gide : « Ce n’est pas avec de bons sentiments qu’on fait de la bonne littérature. » 


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Actes des apôtres : bilan de l'acte 29

Leurs ennemis aimeraient transformer les gilets jaunes en ploucs ignorants, en vague brune, en fauteurs de guerre vachement antisémites, alors qu’ils sont eux-mêmes issus de courants douteux et des zigzags idéologiques bizarres ayant certes eu leur quart d’heure de gloire parce qu’ils s’auréolent toujours d’une « résistance antipopuliste » grassement rémunérée. Pour vous la faire courte, voici deux echantillons côté espagnol : l'article à vomir d´élitisme suffisant de l’althusserien prosioniste G. Albiac dans ABC et l'amalgame gilets jaunes/rubans jaunes indépendantistes catalans faite par Savater dans sa tribune de El País : " Ils disent que c'est ce que veut le peuple. Quel peuple ? C’est l'appelation donnée à l'heure actuelle à la partie de la population prête à suivre sans sourciller ceux qui lui ordonnent de ne pas obéir aux lois. En France, ce sont des gilets jaunes et en Espagne, ils portent des lacets jaunes... " / "Dicen que lo quiere el pueblo. ¿Qué pueblo? Así llaman hoy a esa parte de la ciudadanía dispuesta a obedecer sin rechistar a quienes le mandan desobedecer las leyes. En Francia son los chalecos amarillos y en España llevan lazos amarillos… ".

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Commémoration du débarquement en Normandie

Sans défaillir et sans pudeur, martèlement médiatique universel sur le sacrifice des Américains venus sur les plages normandes libérer les européens. Ils ont mis un certain temps pour venir, ces héros. C'est Hitler qui leur a déclaré la guerre, ne l'oublions pas. Et ça faisait un an et demi que la France était occupée. Et ils ont bel et bien envoyé un ambassadeur auprès de Vichy, malgré ses lois antisémites et tout. Envolées lyriques aussi sur le rôle (pourtant maigrichon !) de la « résistance ». Qui en fait n’aurait pas tenu s’il n’y avait pas eu l’énorme machine de guerre américaine alors que staliniens et gaullistes pavanaient à Moscou, à Alger ou à Londres tout en se calfeutrant plutôt derrière la contre-offensive de l’Armée rouge pourvoyeuse en viande fraiche (25 millions !). Oubliant de rappeler dans la propagande scolaire postérieure que cette armée ne serait rien sans l’apport en matériel des Anglo-Américains. Oubliant également d’enseigner que Staline avait sacrifié de vrais communistes, les meilleurs au sein de l’Internationale, à la fois par complotisme et gabegie; en relativisant enfin son pacte avec Hitler, Staline croyant lui faire un enfant dans le dos en amassant ses troupes aux frontières, Hitler en profitant pour les décimer lorsqu’il en vit l’opportunité, mais ce faisant laissant les Anglais reconstituer leurs forces et enfin convaincre les Américains d’abandonner leur isolationnisme et devenir les maîtres indéboulonnables et seigneurs (saigneurs !) perpétuels du monde. À prix comptant. Exit, alors, de la scène impériale, de l’Angleterre et de la France. Une France recroquevillée sur les fadaises gaulliennes de la grandeur,
traduite après son départ d'un peu partout et surtout d’Algérie en tangible petitesse.

Coup d'oeil sur C’était de Gaulle (Alain Peyrefitte, Gallimard) histoire de rafraîchir un peu sa mémoire :

Salon doré (bureau du Général de Gaulle, le 30 octobre 1963). Alain Peyrefitte (l’air candide) : « Croyez-vous, mon Général, que les Français comprendront que vous ne soyez pas présents aux cérémonies de Normandie ? Général de Gaulle (sévèrement) : – C’est Pompidou qui vous a demandé de revenir à la charge ? (Je ne cille pas). Eh bien, non ! Ma décision est prise ! La France a été traitée comme un paillasson ! Churchill m’a convoqué d’Alger à Londres, le 4 juin, il m’a fait venir dans un train où il avait établi son quartier général, comme un châtelain sonne son maître d’hôtel. Et il m’a annoncé le débarquement, sans qu’aucune unité française ait été prévue pour y participer. Nous nous sommes affrontés rudement. Je lui ai reproché de se mettre aux ordres de Roosevelt, au lieu de lui imposer une volonté européenne (il appuie). Il m’a crié de toute la force de ses poumons : « De Gaulle, dites-vous bien que quand j’aurai à choisir entre vous et Roosevelt, je préférerai toujours Roosevelt ! Quand nous aurons à choisir entre les Français et les Américains, nous préférerons toujours les Américains ! Quand nous aurons à choisir entre le continent et le grand large, nous choisirons toujours le grand large ! » (Il me l’a déjà dit. Ce souvenir est indélébile.). « Le débarquement du 6 juin, ç’a été l’affaire des Anglo-Saxons, d’où la France a été exclue.
Ils étaient bien décidés à s’installer en France comme en territoire ennemi ! Comme ils venaient de le faire en Italie et comme ils s’apprêtaient à le faire en Allemagne ! Ils avaient préparé leur AMGOT (Allied Military Government for Occupied Territories. NDLR) qui devait gouverner souverainement la France à mesure de l’avance de leurs armées. Ils avaient imprimé leur fausse monnaie, qui aurait eu cours forcé. Ils se seraient conduits en pays conquis. « C’est exactement ce qui se serait passé si je n’avais pas imposé, oui imposé, mes commissaires de la République, mes préfets, mes sous-préfets, mes comités de libération ! Et vous voudriez que j’aille commémorer leur débarquement, alors qu’il était le prélude à une seconde occupation du pays ? Non, non, ne comptez pas sur moi ! Je veux bien que les choses se passent gracieusement, mais ma place n’est pas là ! « Et puis, ça contribuerait à faire croire que, si nous avons été libérés, nous ne le devons qu’aux Américains. Ça reviendrait à tenir la Résistance pour nulle et non avenue. Notre défaitisme naturel n’a que trop tendance à adopter ces vues. Il ne faut pas y céder ! (...) »
Fermez le ban et allumez vos postes (surtout s'ils sont Huawei 65 pouces !), ce sera hyper cool de voir apparaître à l'écran Néron-Trump commémorant la dévastation de la Normandie pour nos libertés européennes...
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« La littérature ne sert à rien. Si elle servait à quelque chose, la racaille gauchiste qui a monopolisé le débat intellectuel tout au long du XXe siècle n’aurait même pas pu exister. Ce siècle, bienheureusement, vient de s’achever ; c’est le moment de revenir une dernière fois (on peut du moins l’espérer) sur les méfaits des "intellectuels de gauche", et le mieux est sans doute d’évoquer Les Possédés, publié en 1872, où leur idéologie est déjà intégralement exposée, où ses méfaits et ses crimes sont déjà clairement annoncés à travers la scène du meurtre de Chatov. Or, en quoi les intuitions de Dostoïevski ont-elles influencé le mouvement historique ? Absolument en rien. Marxistes, existentialistes, anarchistes et gauchistes de toutes espèces ont pu prospérer et infecter le monde connu exactement comme si Dostoïevski n’avait jamais écrit une ligne. Ont-ils au moins apporté une idée, une pensée neuve par rapport à leurs prédécesseurs du roman ? Pas la moindre. Siècle nul, qui n’a rien inventé. Avec cela, pompeux à l’extrême. Aimant à poser avec gravité les questions les plus sottes du genre : "Peut-on écrire de la poésie après Auschwitz ?" ; continuant jusqu’à son dernier souffle à se projeter dans des "horizons indépassables" (après le marxisme, le marché), alors que Comte, bien avant Popper, soulignait déjà non seulement la stupidité des historicismes, mais leur immoralité foncière. »

Michel Houellebecq, « Sortir du XXe siècle », La Nouvelle Revue française, avril 2002

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Dans les mythiques Falaises de marbre :

... le juste et l'injuste se mêlaient désormais inextricablement (p. 71)

... dans le pays le crime prospérait comme le réseau des moisissures sur le bois pourri (p. 85)

Il n'est personne à qui le déclin de l'ordre ne soit funeste (p. 96)

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Vere tu es Deux absconditus : Isaïe repris par Pascal. La foi ? Un don de l'aube, que j'ai cru perdu à midi et récupéré au crépuscule... Pour cette absence de Dieu, tout en ne cessant d’interpeller l’idée même de ce Dieu, voir ces lignes de poignantes de G. Caproni : « Il y a des cas où accepter la solitude peut signifier atteindre Dieu. Mais il est une acceptation stoïque plus noble encore : la solitude sans Dieu. Irrespirable pour la plupart. Dure et incolore comme du quartz. Noire et transparente (et coupante) comme l’obsidienne. La joie qu’elle peut donner est indicible. Elle donne accès – une fois tout espoir tranché net – à toutes les libertés possibles. Y compris celle (le serpent qui se mord la queue) de croire en Dieu, tout en sachant - définitivement - que Dieu n’est pas, qu’il n’existe pas. » Giorgio Caproni


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La caduta degli dei après les élections européennes

En des temps d’imposture universelle, dire la vérité est en soi un « acte révolutionnaire », selon George Orwell. Il est certain que « Unies, Nous Pouvons » n’est plus un lieu possible pour ce genre de révolution. L’a-t-il été un jour ? C’est peu probable. On ne change pas. Des éléments, des failles des personnalités, toujours les mêmes, font dévier toujours plus profondément un parcours. Jusqu’à parfois le rendre si hideux qu’il semble en tout point dissemblable, voire même contraire à ce qu’il était à l’état naissant. Pourtant, tout était déjà là dès l’origine. Il faut regarder aujourd’hui certains passages télévisés anciens de L’Homme-à-la-Tresse nouée pour comprendre le genre de pontificat qu’il exerçait alors sur l’intelligentsia espagnole dont, l’impitoyable travail du temps qui inlassablement élimine la fausse monnaie, le souvenir lui-même a fini par se perdre. Vraiment, il fut le pape médiatique de toute une gauche, à l’époque même où celle-ci n’avait pas encore entièrement renoncé à peser sur le cours des choses, et ne se résumait pas encore à de vagues postures bien intentionnées, dépourvues de toute conséquence. Face à tout le monde au Parlement et inlassablement sur le plateau de La 6, vêtu de sa chemise retroussée et de ses jeans, typiques de l’intellectuel bernardhenrilevynien délavé, le front soucieux, légèrement à cheval de son siège. Comme engoncé dans sa propre gloire, Popol prend la parole pour regretter qu’aucun membre presque de la classe politique ne soit pas à sa hauteur afin d’apporter la contradiction « au fascisme rampant ». Bras armé dans les médias soi-disant de gauche d’un anti-hispanisme virulent, Popol ne rougit donc pas de faire la leçon à la puissance conscience patriotique latente d’un public estomaqué par les excès et le verbiage des séparatistes de tout bord et de prendre l’apparent contre-pied de la droite espagnole. Un peu plus tard, il finit néanmoins par se prosterner devant cette dernière, version finance, tout en ayant au passage veillé à souligner que, quoique heureux propriétaire d’une luxueuse résidence de 700 000 € près de Madrid, il reste toujours fidèle à ses amis dans le camp des rouges.

Ce genre de contorsions, qui allaient parfois jusqu’à rendre le propos inintelligible, était en vérité l’un des traits les plus frappants chez ce professionnel de la polis . Cela témoignait du reste moins chez lui d’un goût pour la complexité que d’un désir de cour, celui de se mettre en position de distribuer souverainement courbettes et coups de griffe, mais plus encore de toujours laisser ouverte la possibilité d’une volte-face, d’un changement de pied, d’un retournement complet de position. Dans ces exercices-là, il était sans égal. Son verbe subtilement fielleux, lorsqu’il conduisait par exemple une réunion, pouvait à juste titre inspirer à son auditoire une réelle admiration.

Après une spectaculaire capilotade électorale, il se voit trahi par les siens et les siennes ! Pestant devant ses ouailles, de plus en plus réduites comme peau de chagrin, contre les banques et Amancio Ortega. Lui, qui en a obtenu d’une un prêt juteux pour payer sa luxueuse villa, parmi les plus riches de « Madrit ». Pestant contre la presse et les merdias. Lui, le médiatisé par excellence. Proche du soi-disant ex trotskyste Jaime Roures Lobo (sic) – producteur et richissime homme d’affaires associé de Soros et producteur, devenu encore plus riche sous le règne de son pote Zapatero, populairement réputé lors de son passage par le pouvoir comme lent à la comprenette mais extraordinairement doué pour se faire du fric et en faire faire à ses potes – qui avait mis gentiment à la porte en 2012 tout le personnel de son quotidien Publico et l’avait récupéré après des tours de passe-passe dignes du meilleur feuilleton à la Saviano. Il s’est laissé inviter chez ce puissant patron en 2017 avec des figures de première importance du suprémacisme séparatiste catalan (juste après la manifestation contre le massacre djihadiste, à Barcelone, présidée par des slogans contre le Roi-fils-de-l'Autre et par d’innombrables pancartes avec des inscriptions « contre l’islamophobie » !) et a commencé à se rêver en maître de cérémonies de l’explosion contrôlée (!) de la Constitution de 1978 et, par là, peut-être de l’Espagne telle qu'on la connaît. Il s’élance en parfait machiavel miniature à peaufiner une éventuelle « mise au pas » idéologique de la déliquescente socialdémocratie (« socialiste ouvrière espagnole ») en l’exigeant une allégeance en faveur du progressisme de gauche : un coup, communiste et fier de l’être, un coup socialiste genre Allende ou socialdémocrate car candidat, aujourd’hui, proche des gens, demain, contre-je-ne-sais-plus-quoi mais toujours bolivarien en anticapitaliste, vu que le libéralisme économique a été ringardisé partout, et dans tous les domaines, par les avances vénézuéliens. Quand il ne décoche pas des ruades contre Pedro Sánchez, il fait également mine de s’alarmer (« alerte antifasciste ») de la collusion objective entre les riches et la droite contre le gouvernement-surprise du même Sanchez qu’il a été le premier a installer président par motion de censure « constructive » interposée, après un long jeûne de succès électoraux, soutenu également par les nationalistes basques et catalans, de dangereux gauchistes comme tout le monde sait. Pour mémoire, la première personnalité reçue tout en velours par le docteur Sanchez, en gérant empressé des intérêts capitalistiques les plus nobles, a été George Soros en personne… bête noire des complotistes et de la fachosphère !

Les débats télévisés de Tintin Iglésias face aux hommes de paille des média espagnols paraissaient présager l’arrivée en trombe d’un grand leader. Un communiste trois point zéro avait dit l’ancien président Felipe González. Il voulait partir à l’assaut du ciel. Vu l'évolution des faits au fil des années, toutes ces galipettes ne peuvent manquer de faire sourire. En 2019, ce même épouvantail de la gauche au chéquier-entre-les-dents jette ses dernières forces dans la défense d’un gouvernement socialiste en minorité. A-t-il changé à travers toutes ses métamorphoses ? Là encore, force est d'en douter. Toute sa vie publique, il a pioché dans le même sac de farces et attrapes rhétoriques de plateau de télévision, toujours visant au même but : prospérer sur les apparences de l’engagement, en évitant toujours de s’engager fermement en faveur des gens si ce n’est en faveur du maintien d’un gouvernement problématique avant même de voir le jour, opportuniste, qui avait fait de lui, dans un passé récent, le roitelet de quelques mois et, dans l'avenir, peut-être un futur ministricule.

Après les européennes-municipales et territoriales en Espagne, Unies, nous pouvons, au féminin, saigne de toutes ses plaies. Désuni(e). Éclaté(e). Et l’ancien virtuose de la politique importunant sans relâche des adversaires débordés, voit aujourd’hui ses anciens féals se rire impudemment de lui dans son dos. Jusqu’à encore récemment, ses coups de patte étaient encore terribles. Moins précis qu’auparavant, ceux-ci manquaient fort heureusement le plus souvent leur cible. Au moins, Mélenchon, après sa déconfiture aux européennes a eu le courage de comparaître devant les caméras, avec plus de courage que notre modeste homme au foyer dans sa villa de Galapagar (Madrit). Les européennes ! Quel événement ! Ça s’oublie vite. Au bout du compte tout le monde s’en foutra d’ici trois semaines-un mois.  
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Ciel morose en mars : Mmes et MM. Amalgame au Sénat français font taire Mmes et MM. Pasdamalgame qu’on promène partout...

Quarante et un sénateurs (milledieu de catsalh de macarèl de hilhdépute de diou-biban de saloperie de politicards !!!) de l’État musclé fwançais au service de la waie Vrounze, qui ont dû récupérer le sommeil avec la loi anticasseurs, s’inquiétaient en mars dernier des garanties offertes par les autorités socialistes espagnoles, ô combien caressantes, aux prédateurs maffieux séparatistes qui terrorisent sans pitié depuis des années une bonne moitié de leurs concitoyens et font chier la planète avec leurs micmacs et le silence complice de la conscience universelle. Ils devraient plutôt s’inquiéter de la dérive répressive rampante anti Gilets jaunes chez eux. Être contre les coups de matraque de policiers bien français, contre les mutilations et les éborgnements à des Français répétés semaine après semaine. Contre les agressions à une large palette de pauvres gens, bien de chez eux, d’un pompier volontaire bordelais à une septuagénaire niçoise… Et se prononcer clairement contre l’appel à l’armée ! Et là, il y a bien confusion entre ordre public et lutte anti-terroriste ! L’armée !!! Qui pourrait tirer contre « la foule haineuse » et tout … Tout pour protéger la sûreté de leurs sales séants de sénateurs à n’en branler pas une. L’excès de répression afin ne pas compromettre l’ordre établi, c’est bien chez eux. À cette seule réaction, on mesure à quel point la France est déjà en train de se liquéfier, de muter monstre. On fait la morale à Orvan. On crache sur Salvini, ami de Poutine ! Mais on défend les racistes séparatistes juste à côté. Et on peut, en même temps, se réclamer sans pudeur de la défense des libertés ... chez les autres. Qui n’en demandent pas tant. La liberté d’expression ! Faut pas y toucher ! En France, la liberté d'expression n'a jamais été aussi clairement promulguée dans sa Constitution. Et pourtant, dès 1972, une loi Pleven est ouvertement apparue comme une entrave officielle à la liberté d'expression. S'en sont suivies les lois Gayssot, Lellouche, Perben et encore récemment la loi Taubira, qui, toutes, s'inscrivent dans la répression de la liberté de penser et de parler. Les 41 en question se sont non seulement ridiculisés dans cette affaire. Ils auraient mieux fait de continuer à vaquer à leurs inutiles affairements (écrire des romans, rentrer sous terre, se faire oublier) mais ces gens-là n'ont aucune vergogne. Ils ont désormais du pain sur la planche avec la victoire du RN aux européennes. Cette histoire est révélatrice : les 41 sénateurs conscience universelle n'ont eu rien à dire à propos des libertés concrètes de citoyens concrets piétinés, victimes du racisme abject, quotidien, des séparatistes mais seulement leur bonne conscience universelle. À ces citoyens sans importance, il peut leur arriver les pires avanies, ils s'en foutent; ça a été toujours, dans un passé récent, le rôle des bonnes âmes sensibles, dans le pourrissement progressif des conflits tels que la guerre civile syrienne, le génocide rwandais, la Yougoslavie… Ils sont totalement imperméables aux faits qui les dérangent. Tout humain tend à rejeter les faits qui le dérangent, en effet, mais ce coté despotique-paternaliste chez le pleutre sénateur fwançais gentil professionnel me révolte. La connaissance de la réalité catalane au quotidien pour les non-suprémacistes n’est pas leur fort. Tournure d'esprit idéologique des plus désagréables. Ne sont-ils pas devenus, eux, puissants parmi les puissants de la ripouxblique, des pri­son­niers des divers lieux com­muns, calom­nies et médi­sances mis en circulation par la mouvance séparatiste ? Ils sont fascinés par les causes qu’ils considèrent justes, sans plus. Qu’une large moitié de la population concernée soit donc aujourd’hui, dans cette communauté autonome qui se veut continent, empire, phare du monde, sous la coupe implacable d’une poignée d’individus corrompus jusqu'au tréfonds mais bien capables de salir tous les opposants à leur folie, ça ne les intéresse pas. Cela ne vous rappelle pas « les heures les plus sombres… » ? On entend partout comme dogme de foi que les différences entre humains, de couleur, de confession, de nationalité… sont superficielles. Ça, même les 41 sénateurs français, l'admettront facilement. Et bien, non ! Fausse route ! En réalité, à en croire les suprémacistes catalans qu'ils aiment tant, les différences entre eux et le reste des Espagnols sont très profondes. Et même leur ADN qu'est différent ! (cf. les nombreux articles du pauvre crétin qui est institutionnellement à la tête de la Catalogne). Comme dit l’autre : « … et quand on vient d’en rire on devrait en pleu­rer ».

Et quand la thèse du grand remplacement si chère auz suprémacistes de tout poil, énoncée par certains, produisait en mai ses premières victimes en Nouvelle-Zélande, on n'aurait pas dû faire semblant d'être surpris... Que je tue « il » ou il tue « je » au nom de je ne sais pas trop quoi, on n’exerce pas innocemment les pouvoirs de la parole. Quand les textes sont impregnés de poison, comme Jalousie/Déjanire, dans le bel opéra d’Haendel, imprègne le tissu - le textus - du vêtement d’Hercules (Jesper Svenbro, Le métier de Zeus. Mythe du tissage et du tissu dans le monde gréco-romain, éd. Errance, 1994) tout devient possible.
 
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Provoqués artificiellement par de minorités diligentes, les conflits linguistiques – dans les États multilingues, genre l’Expagne – sont essentiellement des luttes d’influence des castes dominantes au sein de la bureaucratie à la tête de l’État.
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Marxisme (Groucho Marx) pur

La politique, c’est l’art de chercher les problèmes, de les trouver, de les sous-évaluer et ensuite d’appliquer de manière inadéquate les mauvais remèdes. / La política es el arte de buscar problemas, encontrarlos, hacer un diagnóstico falso y aplicar después los remedios equivocados.

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Vieille note prise dans le tas : « Il ne suffit pas d'avoir du talent, il faut savoir se le faire pardonner » (Eric Fottorino, TF1 - 21:51 - 18-06-2017)
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Grand talent du cheptel classique des réputés, des bien notés socialement, des médaillés et candidats à moult récompenses : réussir à ériger leur buste en un endroit bien desservi par la racaille médiatique…
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Photo noir et blanc, exposée par M. Sánchez-Ostiz sur son blog, de Dominique de Roux, Jean-Edern Hallier [qualifié de « voyou parmi les voyous »] et Ezra Pound ... Savoir ce qu’ils avaient comme projet à triple bande, le voici : faire découvrir, partager, élargir le cercle des admirations d’auteurs très controversés par l’époque bien-pensante, que tout lecteur est prêt à intégrer en échange d’un surcroît de sentiment d’existence, d’un oubli éphémère de l’absurdité de vivre à quoi la lecture oppose un semblant de raison. Et de saper par des provocations intelligentes le conformisme régnant, en relativisant les admirations inconditionnelles dominantes pour d’autres à la limite du supportable, du raisonnable ou du dangereusement ridicule, selon ces trois mousquetaires... Cela m’a conduit à relire des poèmes de Pound. À admirer toujours cette sorte de perfection orageuse dans les différentes langues qu'il malaxe dont la polysémie permet d’accueillir les interprétations les plus antinomiques, jusqu’à celles qu'un lecteur informé devrait réprouver. Le Canto XLV, « A cause d’Usura » ! Il s’en prenait autant au capitalisme libéral qu’au capitalisme d’État. Bref, au profit économique de quelques-uns comme seul horizon de civilisation et, spécialement, dans sa déclinaison financière que constitue le prêt à intérêts, dont l’inventeur aurait été le peuple juif, selon la mythologie antisémite, et la cause princeps qu’il y ait des riches et des pauvres. Il voit la Technique comme son bras armé et spécialement l’industrie de l’armement à l’origine de la Grande Guerre où périt son ami, l’immense sculpteur Henri Gaudier-Brzeska (voir le splendide recueil d’hommages à lui rendus, dirigé par Pound en 1992 aux éditions Tristram).

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Vocation d'écrivain ? Comment y répondre ? Je me contente d'être lecteur. Et c'est déjà pas si mal que ça, à en croire certains gensdelettres genre Borges ou Georges Steiner. Bien amusé de voir que des amis, des connaissances ou des collègues fonctionnaires n'hésitent pas à se considérer spontanément eux-mêmes "écrivains". Rien que ça ! Pour une poignée de feuillets plus ou moins académiques puant le poncif ou le n'importe quoi... On ne naît pas suprématiste blanc, ni allemand antisémite, ni africain animiste, ni catalan ou basque, ni européen ni catholique ni juif, athée ou musulman… comme on ne nait pas écrivain : on le devient. Ce n’est pas un métier mais une occupation selon l’acception anglaise, qui demande une vie d’apprentissage comme celui de rémouleur (à l’affût des mots), à l’affutage de ces « couteaux sans manche » au grès de la syntaxe.

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La Voix du Nord et Le Télégramme, deux médias qui gardent leur dignité face aux chants de sirène (indignes) du pouvoir macronien.
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Arrestation de l'ancien chef de l'ETA Santi Potros : les gentils s'inquiètent ...
 
«… of all the world’s terrorisms, ETA’s was one of the hardest to understand. It was fuelled by a toxic combination of racist anti-Spanish nationalism, Catholic mysticism and a dogmatic Marxist-Leninism.» / « … parmi tous les terrorismes du monde, l’ETA est l’un des plus difficiles à comprendre. Il était nourri par une combinaison toxique de nationalisme raciste anti-espagnol, de mysticisme catholique et d'un marxisme-léninisme dogmatique. » / “… de todos los terrorismos del mundo, el de ETA fue uno de los más difíciles de entender. Fue alimentado por una combinación tóxica de nacionalismo racista antiespañol, misticismo católico y un marxismo-leninismo dogmático” Voir ici Maintenant, convenablement digérées les doses de la « combinaison toxique », d'anciens membres éminents de « l'organisation », survivants miraculés des prisons d'extermination de l'État espagnol, occupent le devant de la scène médiatique et peaufinent à leur guise la trame du « récit » des années noires.

Il s’agit de gagner la bataille, même pas de l'Histoire, mais de l’opinion publique. Locale et internationale. L’opinion publique ! « Chassez-la, cette intruse, cette prostituée qui tire le juge par la manche ! C'est elle qui, au pied du Golgotha, tendait les clous aux bourreaux, c'est elle qui applaudissait aux massacres de septembre et, un siècle plus tard, crevait du bout de son ombrelle les yeux des communards blessés. » (Vincent de Moro-Giafferri). Quand le dog­ma­tisme, la confu­sion entre le savant et le poli­tique, le jugement fondé et le droit d’avoir un avis sur tout s’assujettissent à la « doxa » de l'opinion correcte, les phi­lo­sophes deviennent des phi­lo­doxes. Ceux-ci devraient se sou­ve­nir ce que médi­tait Nietzsche, rappelle Michel Maffesoli, en se pro­me­nant dans les rues de Nice :  « Le voya­geur qui avait beau­coup vu de pays et de peuples et plu­sieurs conti­nents, et à qui l’on deman­dait quelle qua­li­té il avait par­tout retrou­vée chez les hommes, répon­dit : ils ont une pro­pen­sion à la paresse. D’aucuns pen­se­ront qu’il aurait répon­du avec plus de jus­tesse et de raison : ils sont tous lâches. Ils se cachent der­rière les cou­tumes et les opi­nions. » (Schopenhauer édu­ca­teur, téléchargeable sous pdf cliquant sur le lien).

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Voilà ma corvée : hisser ce drapeau belge en été plusieurs fois par semaine...



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Note à propos des traductions proposées ci-dessus :  Traduction n’est pas trahison car aucun des mots d’une traduction ne respecte le principe d’identité entre les codes. Quand bien même elle ne serait pas juste, au moins en donnerait-elle elle a minima une idée non contradictoire, et parfois même poétique, lorsque des tiers mots implictes ne sont pas exclus...  « Transporter »,
naqala comme on dit en arabe, serait plus juste, l’acception geôlière incluse : il y a ce que les mots disent et tout ce qu’ils maintiennent en réclusion, enfermé, en attente d’être libéré. Ou encore, metaphorá que l'on peut voir, en Grèce, écrit sur les ca­mi­ons et qui signifie trans­port : " transport dans l'espace, dans le temps - tran­s­port de sens aussi " (Clau­de Simon, Album d'un amateur, p. 18).