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mardi 19 décembre 2023

Promenons-nous dans le bois des vœux ...


Quand j'écrivais quelques lignes de vœux de Noël à quelqu'un, j'étais pris d'une fièvre douce. Écrire ce qu’on pense en pensant à quelqu’un : je ne vois rien de plus sacré, de plus simple mais de plus essentiel. Le texte pouvait ne rien contenir de grave, d’important, ne rien apporter au quotidien du récepteur, que ce geste suffisait pourtant à me combler et à exprimer tout ce que je pensais d’un instant de nos vies et tout ce qu'il y avait à en retenir. Tout le sens était là, très simplement rédigé. Nommer et adresser. Mettre quelques phrases dans une bouteille de naufragé, quelques phrases qui prendraient de la hauteur au moment de la lecture. Je savais que peu de personnes lisent vraiment, mais ça ne faisait rien, il fallait quand-même les envoyer, il fallait quand-même faire comme si la réception de ces quelques lignes allait bouleverser quelque chose, comme si quelqu'un, quelque part, les recevant allait ressentir une émotion imprévue. Je n’ai jamais su, je l'avoue, faire la différence entre la littérature et la correspondance, entre la conversation et la fiction ; je sors d'un songe pour tomber dans un autre songe : j'ai eu le temps de m'apercevoir, depuis toujours, que peu de gens ont jamais répondu à mes vœux. L’exercice de l'enseignement m'a assez prouvé que personne n'écoute personne, jamais ou presque, et que de cette infirmité première découlent toutes les autres. D’un classique bouleversant, un quelconque maitre Aliboron n'aura gardé que les ornementations et les effets, pas la substance qui pourtant se donne comme jamais elle ne s'est donnée dans aucune œuvre pareille. À qui s'adresse-t-on dans un message de Noël ou de fin d'année ? Qui veut l’entendre ? Qui prendra le temps de songer, à sa lecture dans la solitude et le chagrin d'un après-midi de décembre, aux liens qu’entretiennent les gens dans le creux profond d'une vie, au milieu des gesticulations désordonnées qui les font exister un instant aux yeux des autres ? Les lignes rédigées, une fois lues, s'achemineront en toute connaissance de cause vers le silence de l'être et la paix invincible de la solitude. Que chaque phrase arrive, au moins, à bon port, pour que les signes un moment suspendus et virtuels soient enfin délivrés et se révèlent comme appel à l’amitié car il n'existe pas de fin meilleure, d'autre destination plus souhaitable, pour l’éphémère. Mais qui sera là pour un prochain message ? Qui aura veillé jusqu’à la dernière lettre ?

dimanche 17 décembre 2023

Dramatique silence assourdissant pour la Palestine en agonie ...


Bientôt, les retrouvailles pour les fêtes de Noël en famille : les enfants arrivent, chacun s'étreint avec les autres dans l’entrée, nous changeant en une masse de têtes, d’épaules et de bras. Et on passe rapidement à table. Je suis plus que content et je pense à la première semaine de janvier prochain comme si j’avais déjà perdu une parcelle de mon âme ...

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Dans la vie privée, intime, le fait de savoir que Dieu voit toujours tout et qu’il sait qu’on existe, alors qu’Il disparait (« vere tu es Deus absconditus ») aux yeux des autres, aide chaque pauvre mortel qui se pose des questions à supporter son sort. Dans la vie publique, visible, avec la foi qui réconforte le croyant face à l’inéluctabilité de la mort, on se tient à côté les uns des autres, se respectant, mais se taisant. Comment pourrait-on vivre ensemble sur terre, si ce n’est des gens persuadés qu’il y a quelque chose plutôt que rien avec des gens qui comprennent qu’il n’y a rien, rien que le vent. Qu’est-ce que l’existence ? Les physiciens écrivent qu’il y a eu une explosion de gaz et que l’univers s’est formé : le ciel, les étoiles, les comètes. Bon, mais d’où venait ce gaz qui a explosé ? Non, interviennent d’autres physiciens, ce n’est pas comme ça : il n’y avait rien, c'était l’antimatière, puis cette antimatière a éclaté, et l’explosion en question a eu lieu. D’accord, mais d’où venait ce rien ? De quelque part – et la même question se répète à l’infini. Ainsi, le temps et les événements tournent en rond, rampent comme des fourmis sur le ruban collé par l’expérimentateur ? Mais d’où vient le ruban, où est le début du rond ?
On ne peut pas se reposer sur nos sens pour faire entrer dans notre tête la réponse à cette question. Comment s’imaginer que tout a toujours existé et n’est venu de nulle part ? Il y a une éternité, lors d'une discussion avec un mathématicien, à la Fac de lettres, il n’avait pas pu répondre à la question de la définition d’une ligne droite, illimitée des deux côtés : si elle n’a pas de point final, elle est infinie, et s’il y a un point final, ce n’est déjà plus une droite ... D’où viennent les droites ? Qui les trace ? Si quelqu’un a tracé une droite, il a bien commencé quelque part ! Oui, le temps et l’espace sont beaucoup plus complexes qu’il nous semble. Mais même si l’on admet que le temps et l’espace ne sont pas linéaires, il n’en reste pas moins cette question : comment le monde est-il advenu ? Et s’il a toujours existé, qui l’a créé, et d’où vient ce « qui » ? Et ainsi de suite, à l’infini. Les gens religieux estiment que c’est Dieu, mais on peut Lui appliquer la même question : « D’où vient-Il, même s’Il a toujours existé ? », et de nouveau, nous nous heurtons à la limite de nos moyens ... L’homme est incapable d’appréhender toute la difficulté de l’absence d’un commencement. La quantité de matières existantes est inconnue, et c’est hors de notre portée, sinon nous ne serions pas des créatures humaines. Combien de choses inutiles ont été écrites, combien d’incongruités philosophiques, combien de labyrinthes de diverses sciences, et tout cela ne fait qu’encombrer notre cerveau le détournant de l’absence de réponse à la question essentielle. Mais, d’ailleurs, pourquoi pourrions-nous y répondre ? L’univers est insondable, infini, et la Terre n’est qu’un petit grain qui, dans ses entailles microscopiques, a développé des cellules dotées de pensée ...

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Je ne ralentis pas parce que je suis vieux et que mes forces m'abandonnent, au contraire, je ralentis parce que chaque nouvelle lecture m'enrichit (lexique propre du capitalisme cognitif que je déteste, mais quel terme employer ? m'améliore ?) : il y a plus à voir, plus à entendre, plus à comprendre.

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Plusieurs jours que je n’arrive pas à dormir comme il faut depuis notre retour d’Alicante. Je n’arrête pas de penser à l’appart endommagé par la catastrophique fuite d’eau des voisins de dessus. La flemme de l’assurance, le retard inexplicable – à part l’incompétence et la nullité – dans les réparations. Micmacs de toute sorte. Douleurs de dos, angoisses, délires nocturnes divers. J’ai du mal à rester à flot. Depuis des semaines, je reste dans cette zone cauchemardesque dans laquelle un marteau impitoyable me frappe un peu partout, au hasard semble-t-il. Mais le pire n’est pas l’intranquillité, le pire, et de loin, c’est le sommeil qui se refuse à moi. Des nuits, j’ai dû me lever près de quatre fois. Dans ces conditions, il est difficile de se reposer, d’autant plus que trois fois sur quatre, je ne parviens pas à me rendormir, même pour une très courte durée. Je me sens fatigué. Quand tout provoque en nous le dégoût, vers quoi se tourner, surtout si le silence et la paix du sommeil nous sont refusés.

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Nos retours à la maison, rue Gaston Marchou, ont été souvent sabordés par les étourneaux. Leur troupe des milliers d’oiseaux se posant sur les arbres puis s’envolain et tournoyant, se massant en formations fantasques et dessinant des vagues aériennes. Fascinés, nous sortions au balcon pour les observer.

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J'ai regagné péniblement une fois El Vivero en voiture. Je n’avais nulle part où retrouver des repères. Quand j’eus réfléchi pour en provoquer dans ma tête, je me dis que j’étais peut-être trompé par mes propres souvenirs, que des objets m’avaient échappé, que je n’avais pas fouillé suffisamment toute la partie du terrain où se trouvait notre maison. Dans l'état actuel des parages, j’avais de la peine à marcher, mais j’y allai tout de même, et retrouvai les traces de ce que fut l'entrée. Je repérai l’endroit où les colonnes en briques plus ou moins debout avec des herbes folles faisaient place à un champ vide. À part mes propres traces, je ne trouvai aucun signe de vie dans les champs labourés. Il me fallut un bon bout de temps pour m’assurer qu’il ne restait vraiment rien, aucun signe, aucune indication : absolument tout était effacé, comme si j’avais dessiné mentalement le plan mais que mes parents n’avaient rien laissé, qu’ils n’avaient pas planté d’arbres. Tout s’était dissous comme dans un rêve. La rivière se révéla incroyablement proche, alors qu’autrefois elle me semblait dans le lointain, derrière les arbres voisins. Le soleil se couchait. Je compris que je ne voulais pas rester une seconde de plus sur place me détournant de la terre labourée sur l’emplacement de notre maison.


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Neuf pour cent d'Espagnols pauvres. L'infâme social-démocratie ne sait que faire des gens vivant dans des conditions d'extrême dénuement. Et la gôôôche préfère la lutte contre le cholestérol à la lutte de classes. Quand les électeurs mettent la gauche au pouvoir, elle les entube sur le social : l’oligarchie utilise la gauche pour faire justement passer les lois antisociales, soit au moment où les pauvres se sentent protégés, croient avoir un des « leurs » (ou leurres) au pouvoir. Et quand les électeurs choisissent un candidat de droite, l’oligarchie en profite pour faire passer des lois antinationales. Logique du machiavélisme. On dirait une diatribe des années 30. Socialement, on a régressé d’un siècle.


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Fin du principe d’intouchabilité développée par nombre de responsables juifs dans le monde depuis des générations : la liberté d’expression est plus forte que la censure, parce que la raison est plus forte que le mensonge. Le mensonge, avec toutes les polices du monde, ne peut tenir éternellement : il s’effrite avec le temps, le temps tue le mensonge. Le temps serait-il raison ? Sur la réponse virulente, odieuse, criminelle de l’entité sioniste, la tension est montée depuis le 7 octobre entre les gardiens du dogme – pour qui les Israéliens sont des démocrates et les Palestiniens des terroristes – et les diverses gauches qui retrouvent leurs fondamentaux, l’humanisme et l’anti-impérialisme. À noter que même si ces gauches s’avouent anticléricales, sur le papier, leur humanisme descend tout droit du christianisme, et leur raison de la Grèce ancienne. Ces gauches qui ne veulent plus se taire devant l’injustice majeure se retrouvent mises au ban, comme elle avait mis au ban la droite depuis 40 ans. Droite qui s’est rangée sous le drapeau israélien au moment où tout basculait. Surtout ne pas tenir tête au monstre anglo-américano-sioniste devant sa folie destructrice et devant la meute médiatique inféodée à ce monstre destructeur. Au lieu de quoi, même les journalistes de la radio épiscopale espagnole (Cadena COPE) aboient avec les Américains et les Israéliens, qui sont mis au ban des nations. Il n’y a qu’à regarder les derniers votes à l’ONU, qui servent au moins à quantifier le rapport de forces. Quelle manque d’humanité et quelle erreur devant l’Histoire ! Ione Belarra, accusée de tous les maux par le lobby médiatique, soit la meute, seule capable de faire face à l’agente sioniste de l’ambassade d’Israël à Madrid, RodicaRadian-Gordon. Chez elle, ça parle tout seul ! Seule capable d’inspirer, devant le sinistre Netanyahu, un chouia d’énergie à son président du gouvernement, P. Sanchez, qui pourtant a suffisamment fait bonne mesure sur la condamnation obligatoire du Hamas, affaire devenue même pas une question de journalisme ou de politique, mais une injonction. Cette sommation non-discutable, d’où vient-elle ? À qui profite-t-elle ? Devant ce mur de haine et de mépris envers les Musulmans en général et les Arabes en particulier, la réaction de I. Belarra devant le massacre de masse de Gaza et pour un cessez-le-feu permanent et définitif relève de la pure et simple décence ! D’accord aussi pour qu’on libère des otages, si on fait en sorte qu’on puisse avoir en même temps la libération d’un certain nombre de prisonniers politiques palestiniens qui croupissent aujourd’hui dans les prisons israéliennes. Oui, quelque chose a changé, que ce soit sur Facebook ou sur « X » ex-Twitter où la liberté d’expression a été rétablie, au grand détriment des destructeurs des nations qui pillent le trésor européen, ou sur les médias subventionnés, qui coulent idéologiquement en direct devant tout le monde. G. Albiac, qui promène dans chaque article les philosophes de sa bibliothèque comme un montreur de marionnettes, J. Juaristi, « juif » (converti) de fraîche date, ou le pitre Losantos, qui terrorisait de ses vannes le Parti populaire, les dirigeants de VOX, les antivax et les antipass il y a encore peu, ne terrorisent plus personne aujourd’hui. Les gens sont aux abois, se demandant comment ils vont finir le mois, et on leur demande de chanter chaque jour, en versant si possible une larme hypocrite, l’hymne israélo-américain. Surréaliste.



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Abrégé d’histoire d’Israël : racisme institutionnel, colonisation en continu et massacres de masse. Les Palestiniens sont otages des Israéliens ! Des millions en otage, et depuis le 7 octobre quelques palestiniens ont invité quelques israéliens à partager leur vie d’otage à Gaza. Les tueurs de femmes et d’enfants portent une kippa sous leurs casques, il y a des images mais il faut se donner la peine d’aller chez les chaînes non européennes, c’est pas sur CNN ou BBC que vous allez voir les tueries de masse perpétrées par l’armée la plus humaniste du monde : corps déchiquetés, visages broyés, amputés, mutilés à vie. Une boucherie inimaginable si on ne va pas sur les plateformes de sauvegarde contre la censure. Allez courage vous allez trouver de quoi affiner votre opinion, mais il faut chercher pour établir la différence fondamentale entre liberté d’expression, c’est-à-dire, levier de chaos détournant la parole publique vers le n’importe quoi et opinion libre, prise de parole courageuse guidée par la quête de vérité.


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On me casse de temps à autre les pieds avec Sartre. Que reste-t-il de ce Sartre, bourgeois anti-bourgeois fanatique et bigleux, calculateur « philosophe de la liberté » qui s’est distingué en ne levant pas le petit doigt contre l’occupation allemande, puis après-guerre en défendant systématiquement les dictatures les plus abjectes ? Un beau salaud parmi les salauds, que vaut n’importe quel salaud et qui les vaut tous.