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mardi 29 décembre 2020

Si vous êtes unijambiste (confiné), évitez le funambulisme (vanité du gouvernant) !


Vilem Reichmann Douleur et compassion


Si vous êtes unijambiste (confiné), évitez le funambulisme (vanité du gouvernant) ! 

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La littérature porte malheur à ceux qui ne l’aiment pas. Lu quelque part… 

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Deux citations pour le prix d’une, d’un classique bien bourgeois : 

« Les sots vont loin quelquefois, surtout quand le fanatisme se joint à l’ineptie, et à l’ineptie l’esprit de vengeance » 
Voltaire, Dictionnaire philosophique

« … la barbarie, devenue plus insolente par notre silence, égorgera demain qui elle le voudra juridiquement … » 
Voltaire, lettre à d’Alembert, 18 juillet 1766 
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Il est dans l’ADN du conformiste de proximité, selon l’hideux mot à la mode, de garder le silence sur les sujets qui fâchent et de jeter hors de sa conversation les interlocuteurs qui fâchent davantage. Gouvernants au-dessous de tout, incompétents, crétins gonflés du néo-gauchisme juste bon pour l’autopromotion éhontée ? Pas de moyens pour la santé, pour le commerce, pour les gens ruinés, pour les jeunes ? Dehors, le facho, le conspiro-paranoïaque, l’empêcheur de tourner en rond ! 

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Proust considère la bonté comme l’intelligence véritable. La seule, par la grâce de la vertu d’empathie, capable de délier l’imagination et de la permettre de tout étreindre. Capable de transformer le cosmos en spectacle de bonté où peut avoir lieu le dialogue du pécheur Claudel avec le réprouvé Rimbaud… Chacun d’eux, en dépit de leur nature humaine, donc imparfaite, sait s’élever au-dessus de leur condition au-delà de ce que la société de leur époque aimait déjà auréoler de vertu, exactement aux antipodes de la bonté. La bonté aujourd’hui ? Qui la reconnaîtrait comme un fruit de l’Esprit qu’on n’obtient qu’au combat permanent contre soi-même ? Qui serait en ce moment prêt à combattre quoi que ce soit ? Du combat avec l’ange, Jacob est revenu victorieux mais boiteux… 
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Je semblais avoir été fait pour devenir un garçon de ferme et gagner ma vie dans la bouse. Mes parents me l’ont évité. Ils m’ont facilité la prise d’un ascenseur social durement accessible, inabordable pour eux, tout juste travailleurs dans un milieu, comme partout, peuplé de squales. Je suis né après la mort d’un enfant de quatre ans, qui m’avait précédé, et de deux autres plus petits dont mon père et ma mère ont gardé une mémoire douloureuse et discrète. Avec moi, ils ont tout fait pour m’épargner la marque du sceau de l’enfant de remplacement ou de la condition de victime de la pauvreté ou de je ne sais quelle pleurnicherie encore. Discours dont raffolent les bourgeois plutôt nés une cuillère dans la bouche ! Tous les enfants devraient pouvoir dire à leurs parents ce qu’Anna de Noailles écrivait à sa mère : « Je suis née tout entière du bois de ton piano ». Le lien parents-enfant ne se résume aux mots de la bave freudienne. Amour et tragédie peuvent exister ensemble au cours d’une vie. Avant de mettre bas parce que l’horloge biologique ou je ne sais quelle fadaise lue dans un journal vous tourmente, avant que d’enfanter, d’adopter, d’acheter un jouet-bébé, homoncules de tous les genres ou transgenres ou mixtes, on devrait se demander si on pourra à perpétuité aimer pour de vrai le fruit de ces lubies à la mode et, en ce cas seulement, se reproduire, adopter, se faire cloner (en moins cons), etc. En cas contraire, sauvez la planète, la couche d’ozone et le bonheur animal et regardez-vous vieillir, seuls, en couple ou en groupe. Agissez à votre guise mais arrêtez de la remplir d’enfants malheureux qui devraient attendre tout de vous et que non seulement vous décevrez mais que vous conduirez au malheur, par vos soins précieusement préparé. 

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Paraphrasant Cioran, au bout d’un certain temps, un certain nombre de ceux qui m’ont trouvé à un moment donné quelque mérite ont fini par se détourner de moi. J’ai perdu de la sorte une certaine quantité de mes amis, si tant est que j'en aie jamais eu un seul. Si le sage roumain semblait « avoir inspiré la déception », je préfère quant à moi, me leurrer de l’espérance d’avoir inspiré la proximité chez quelques bons
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Premier brouillon – écarté, par inutile – pour un message de vœux cette terrible année 2020, juste au moment où un gouvernement de pignoufs à la tête de l’État espagnol (monarchie pourrie qu’ils ont soigneusement édifiée pour croquer à pleines dents des millions d’argent public) refuse à la langue espagnole son caractère de langue véhiculaire… 

Hermanos, los que estáis en lejanía
tras las aguas inmensas, los cercanos
de mi España natal, todos hermanos
los que habláis esta lengua que es la mía.

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Textes finalement adoptés, avec une légère modification dans Et le peuple qui tremble aux frayeurs de la guerre  remplacé par Et le peuple qui tremble au virus délétère, idéal pour l’occasion… 


La moisson de nos champs lassera les faucilles,
Et les fruits passeront la promesse des fleurs. 
François de Malherbe, Stances

Les veilles cesseront au sommet de nos tours,
Le fer mieux employé cultivera la terre,
Et le peuple qui tremble aux frayeurs de la guerre,
Si ce n'est pour danser, n'aura plus de tambours.
François de Malherbe
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« Le mal et la bassesse sont la seule transcendance qui puisse, à la rigueur, éveiller un monde assez oublieux des hiérarchies pour se faire raison de son ignominie et la résorber dans la nature ». Pierre Boutang, Les Abeilles de Delphes (relecture confinée, avec l’extraordinaire La source sacrée, du même auteur) 

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Squatteurs d’État et squatteurs de quartier … 

Le squat est à la mode en ce moment. Normal. Cela fait aussi plus de 70 ans qu’un État larmoyant et impudent se permet de squatter, de spolier, de voler, d’emprisonner et d’assassiner des autochtones de la terre de Palestine. Sur une musique de fond à base de délires racialistes et de l’apartheid le plus éhonté, on a assisté à l’installation de colonies de provocateurs défiant l’entendement et à l’utilisation d’une force disproportionnée – incluant des bombes au phosphore contre des femmes et des enfants en dépit des lois internationales les interdisant – sans la moindre réaction efficace de cette plaisanterie appelée communauté internationale. En toute impunité. Et grâce encore et toujours au même chantage ignoble qui leur permet de se goinfrer de milliers de milliards de dollars au titre de réparations pour des victimes souvent problématiques (cf. l’honnête intellectuel Norman Finkelstein et son travail classique sur l’industrie de l’holocauste). Et vous voulez sévir contre les squatters de cité ou de locaux inoccupés ? 

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Plus les mois passent, plus la nouvelle (?) gauche me gonfle. Déconnectée de ce qu’on appelait le peuple, donc, de son univers de base, yankeesée jusqu’au tréfonds elle ne représente plus l’avenir et d’ailleurs elle n’a rien à proposer à part une caricature de l’immonde clan mafieux au pouvoir au Venezuela. 
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A presque 70 piges, j’ai vu d'assez près la vie politique pour savoir qu'il existe un degré de puissance où le politicien le plus infâme se trouve protégé contre lui-même par ses propres infâmies grâce à l’ignoble ignorance de ses électeurs. Et, à plus forte raison, protégé contre les autres par les infamies des autres. Dans le marécage politique, Il n'est qu'une chose irréparable : être honnête. 

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« Les mêmes qui pleurent le maïs modifié marient l’homme avec l’homme, la femme avec la femme, veulent donner à l’enfant des parents du même sexe, accepter que le fœtus soit créé ici, porté là-bas, nourri ailleurs, qu’il naisse en pipette ou qu’il soit introduit dans l’utérus d’une vieille folle qui veut encore sentir son ventre, tout cela n’a pas d’importance. Mais que personne ne touche aux légumes ! » Pasquin, L’Homme Nouveau 

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« ... au tournant du troisième millénaire, la permanence du corps accordée sans condition à chacun des quatre-vingts milliards qui nous ont précédés n’est déjà plus absolument garantie à ceux qui vont venir. Non pas que la sélection naturelle soit en passe de fomenter quelque nouvelle forme d’humanité. Mais plutôt qu’un autre mode de sélection est en train de se mettre en place : une sélection artificielle, erratique mais voulue, commandée mais aveugle, promue par ceux qui étaient, au même titre que les autres espèces, les objets passifs de cette sélection, les hommes eux-mêmes. Tu lis ces dépêches qui relatent comment l’homme apprend, chaque jour un peu mieux, à intégrer dans le germen, le patrimoine génétique de telle espèce, des traits importés de n’importe quelle autre. Tu suis les progrès de ce thaumaturge. Il devient capable de provoquer des mutations artificielles qui retirent au monde du vivant son naturel, sa nécessité, son évidence et son inéluctabilité. Elles rendent ce monde chaque jour un peu plus surnaturel et beaucoup plus baroque qu’il était déjà. Tu sais tout de ces maïs qui résistent désormais aux herbicides en intégrant une hormone humaine, de ces porcs qui produisent des organes vitaux humanisés, cultivés pour nous être bientôt greffés, de ces étranges souris qui exhibent une grande oreille humaine sur leur dos, de ces veaux-usines qui produisent de l’insuline ou d’autres substances organiques utilisées ensuite dans l’industrie médicale, alimentaire, chimique… Tu visites le monde comme une salle d’exposition qui s’accroît chaque jour de produits vivants inventés par des créateurs géniaux, par des esthètes suspects, par des commerçants sans scrupule, par des médecins fous, par des mages douteux prêts à remédier à l’imperfection humaine… C’est Florence au réel, une étrange Renaissance éclatée aux quatre coins du monde où le vivant renaît selon d’autres lois. Une nouvelle genèse. Nous sommes entrés dans un fabuleux bricolage des formes et des conditions du vivant, tellement incontrôlé que nul ne saurait, ne fût-ce qu’à moyen terme, anticiper les effets locaux et encore moins globaux. Mais puisque l’homme altère tout, pourquoi n’altérerait-il pas l’homme ? » 

Dany-Robert Dufour, Lettres sur la nature humaine à l’usage des survivants 

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J’ai remis l’autre jour la chanson Hasta siempre par l’inusable Carlos Puebla (Youtube). Le temps ne passe pas. Chaque fois que j’entends cette chanson, dont la musiquette n’est pas désagréable je suis frappé de son caractère foncièrement religieux. Elle est toujours très populaire vouant à l’idole castriste, icônifiée à travers le vaste monde jusqu’à la nausée, un culte doucereux surtout dans son refrain qui n’arrête d’envoyer un message de satiété au cerveau : « Ici demeure la claire / La chaleureuse transparence / De ta précieuse présence / commandant Machin… »). Il m’en reste toujours une nostalgie mêlée de gêne au souvenir que moi aussi, dans ma jeunesse, mouton ignare parmi les moutons ignares, j’ai fredonné ces âneries-là... 


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La croyance selon laquelle l’altérité homme/femme se réduit à une construction sociale n’est qu’une une formule dogmatique basée sur des stéréotypes idéologiques sans fondement scientifique aucun. 

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Même dans les expériences communistes les plus acharnées, aucun régime n’a jamais poussé l’égalitarisme au point d’abolir le clivage entre ceux qui bossent et ceux qui contrôlent ceux qui bossent. Aucune société n’y parviendra jamais. Il y a là une sorte de malédiction, dont il faut s’accommoder. Cela dit, l’inégalité n’est pas nécessairement tyrannie, les rapports de hiérarchie ne sont pas forcément injustes ou source de discorde. 

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Émérite, drôle de titre académique pour des retraités entourés d’une cour d’obligés reconnaissants ! / Emérito ¡vaya titulito académico para jubilados con corte de agradecidos ! (Gregorio Morán) 

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mardi 1 décembre 2020

una campana muda, sin campanario / en medio de la niebla / del calendario



NOVEMBRE A TIRÉ SA RÉVÉRENCE…

Mon émotion du moment, juste avant son départ : je me sens comme…
una campana muda, sin campanario / en medio de la niebla / del calendario = une cloche en silence et sans clocher / dans le brouillard épais du calendrier


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Deuil pratiquement universel à la mort du footballeur Diego Maradona. J’ai du mal à partager que l’habileté d’un homme à jouer au ballon présente un intérêt réel (à part les milliards générés part la publicité et les paris en ligne) pour une société quelle qu’elle soit. Le personnage, sur le plan personnel assez misérable (machiste violent et bouffon histrionique, zombie drogué menteur sans se départir de son style maquereau à bagouzes guévariste) n’a rien fait après sa mort, pour relever sa cote. Son pays, l’un des plus riches du monde, tombé au plus bas entre les mains des politiciens au-delà de l’indécence, lui a rendu un hommage transformé fatalement en chaos. Spectacle à la hauteur de l’un et des autres…

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Si le bourgeois de l’ascendance a forcé l’admiration de l’Histoire pour son sens critique (Voltaire, Rousseau…), le bourgeois de la décadence peut se définir par son conformisme. Comme nous l’a amplement démontré Flaubert, il fait là où on lui dit de faire. Ainsi, en réponse à l’insupportable délinquance nord-africaine subie par le beauf depuis qu’il fut chassé des centres-villes, le bourgeois, pourtant responsable de son sort, le traitait invariablement de « facho » comme on le lui avait appris. « On » désignant plus précisément l’intellectuel français souvent issu d’une communauté très en pointe dans le secteur des idées depuis son émancipation des ghettos au dix-neuvième siècle, et plus encore sur le terrain du discours après la défaite nazie. Or, chose étrange, depuis que le beur de banlieue n’aboie plus « sale français » mais « sale feuj » pour cause de solidarité « imaginaire » (comme dirait Alain Finkielkraut) avec les petits palestiniens de l’Intifada, ces mêmes intellectuels français (dont énumérer les patronymes friserait la faute de goût), eux qui nous avaient interdit de nous plaindre, eux qui exigeaient même que nous battions notre coulpe de vilains colons exploiteurs, nous intiment l’ordre, dans autant de médias à la botte, de châtier les vilains beurs, ni jeunes, ni différents, ni pauvres, ni victimes  désormais ; seulement machos et antisémites. Message on ne peut plus clair : dans la République française, être anti-français ce n’est rien, mais être anti-israélien c’est impardonnable… surtout pour des intellectuels français qui ne manquent pas une occasion d’afficher leur soutien à ce champion contemporain du fascisme colonialiste et dont le chef vient d’être démocratiquement réélu haut la main, j’ai nommé l’État d’Israël du coolissime général Sharon ! Depuis les années 70 jusqu’au 21 avril 2002 (pour faire simple), le discours dominant, officiel, nous interdisait de nous plaindre des délinquants nord-africains sous prétexte qu’ils étaient jeunes (argument 68), qu’ils étaient différents (argument communautaro-différentialiste), qu’ils étaient pauvres (argument marxiste) et surtout que leur ressentiment légitime leur venait de l’odieuse colonisation française. Marc-Édouard Nabe, Les porcs 1

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Anagramme pour amateurs : Pascal Obispo = Pablo Picasso…

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Foutage de gueule démocratique. Indécent exhibitionnisme de bonne conscience dans notre parlement autonome. Un gros con social-démocrate (vieux ragoût et soupe rance) reproche à un sale con soi-disant d’extrême droite (soupe rance et vieux ragoût) son déficit de conviction pour servir la cuisine électorale dont les vertus ne sont plus à démontrer. La recette en est extrêmement simple :  périodiquement, des milliers de sales cons veulent convaincre d’autres sales cons d’aller voter pour un grand con plutôt que pour un gros con. Foutage de gueule et spectacle garanti ! Finalement, pourquoi ça marche ? Parce que cela flatte les égos des électeurs qui ont ainsi l’impression qu’ils contrôlent quelque chose, et encourage le narcissisme généralisé. Encore une conquête des années de la transition... Reste à se demander pourquoi le citoyen, pourtant éduqué dans une école rationnelle (de moins en moins mais quand même), gobe ce genre de discours. Là encore, il faut se dire que toute croyance a une fonction. On ne croit que si l’on a envie de croire. Le discours platement démocrate est accepté parce qu’il flatte l’égo du public. Et le démagogue se sent pousser des ailes en dénonçant les turpitudes supposées des puissants, des grands, des riches (et le riche est toujours l’autre, comme l’illustre le panel de pauvres dans le gouvernement actuel), pour flatter les faibles, les pauvres, les petits. Si on admettait que les politiques ne sont généralement que des porte-voix corrompus doublés de médiocres manipulateurs ambitieux, on serait donc forcés de conclure qu’ils ne valent pas mieux que nous. Voilà : les élites n’existent pas ! On aurait saisi les clés du fonctionnement du système ! Très satisfaisant pour l’égo à défaut d’être vrai. Car cet antiélitisme rudimentaire couvre un nouvel élitisme. Simplement, il s’agit d’une nouvelle élite : ce n’est plus le spécialiste, l’ingénieur ou le scientifique qui disent la vérité, c’est le journaliste. Loin d’être un contre-pouvoir, le journaliste est devenu le pouvoir. Un pouvoir fondamentalement négatif : il peut faire arrêter un projet, faire renvoyer un ministre, traîner dans la boue n’importe qui mais ne construit absolument rien, tout simplement parce que la construction nécessite la mise en commun et donc la confiance en qui sait construire. Or, c’est précisément cette confiance que les médias détruisent en bénéfice des tireurs des ficelles, ce qui leur permet de vivre dans toutes les régions du globe mondialisé.

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Fin de semaine d’horreurs répétées. Images insoutenables. Exemples à répétition de charmantes villes légèrement soulagées d’un confinement dramatique pour tant de gens à bout de souffle. Le tabassage de Michel Zecler provoque partout de véritables émeutes. Paris, Bordeaux, Marseille sous la colère débordante, sagement canalisée, de masses en folie… Incendies volontaires, policiers et pompiers attaqués, tirs de mortiers, affrontements avec les forces de l’ordre, jusqu’à des bombes artisanales à l’acide destinées à des guet-apens. Il n’y a pas à tortiller : même en plein confinement, la France sait s’amuser !

 
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Le métier d’écrivain est générateur d’une vanité qui s’augmente au fur et à mesure qu’il est mal exercé. Ce défaut qui coûta au corbeau de la fable un fromage continue chez les humains une carrière sans obstacle majeur. Les contacts humains n’étant jamais sûrs, il vaut mieux toujours se centrer sur la lecture, sur les textes que sur les anecdotes plus ou moins croustillantes de la personne qui les produit. Il ne faut jamais se morfondre sur cet horizon bouché. MEP n'a pas de bornes sur certains points et il est en revanche extrêmement borné sur d'autres qui touchent à sa représentation de certains problèmes... Il me fait penser, MEP, à tant de faux rebelles favorables à la fellation forcée et universelle aux tenants d’un pouvoir pourvu qu’il se dise progressiste. Certains de ses articles portent la marque indélébile de l'ami du gouvernement madrilène actuel, toujours excité par la prétention d’imposer ses lubies au nom d'un hypothétique bien commun « des gens » dont seul il décide, contre toute sorte de complotistes, conspirationnistes, nazis, fascistes, droitistes, populistes... En fonction de ses préférences, subjectives et lourdement pérorantes dans leur fausse recherche d’équilibre, MEP arbore des masques différents : voyageur infatigable (toujours de retour !) faussement détaché de tout, censeur, donneur de leçons – surtout en politique – sans en avoir l’air… Connement arrogant se la jouant modeste. Ses coups de gueule provoquent des likes admiratifs en cascade. Les trolls semblent partout insatiables ! Quand on les fait tomber, ses masques pitoyables, ils révèlent toujours la même absence de visage. RIP : qu’il radote en paix ! Les moutons à forme humaine ne jugent qu’en fonction de l’avis du berger. D’autant plus que la littérature des temps des égouts en crue d’aujourd’hui transforme en chefs-d’œuvre d’inimaginables merdes à peine lisibles… En tout cas, ne confiez jamais votre amitié à un homme de lettres : Dieu sait dans quel état il vous la rendra ! Les amertumes, les emportements et les règlements de comptes propres à tout métier restent dans le microcosme des lettres ou dans celui de la culture les principaux fournisseurs de matière première. Heureusement, la route est courte qui mène de la louange à l’hostilité et beaucoup de génies auto-désignés, riches en faconde et suffisance, risquent toujours de se retrouver à leur véritable place d’idiot du village. En littérature, hélas, l’homme du jour est rarement celui du lendemain.  

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Une partie de la gauche a manifesté depuis longtemps une étrange tolérance envers l’islam qu’elle n’avait jamais admise pour les autres cultes, en particulier le culte catholique.



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Livres à lire Dieu sait quand : 1) Cristián Rodrigo Iturralde, 1492 : fin de la barbarie, comienzo de la civilización en América, Unión Editorial, Buenos Aires 2019. 2) José Luis Rodríguez García, Postutopia, Prensas de la Universidad de Zaragoza. 3) José Luis Pardo, Estudios del malestar. Políticas de la autenticidad en las sociedades contemporáneas, Barcelona, Anagrama

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Celle-là, je l’avais déjà mise sur mon mur il y a quelques jours, histoire d’encourager une bonne amie stressée sous la botte d’une sous-merde, patronne tyrannique : « Ne permettez à personne le soin de vous insulter, de vous humilier ou de diminuer votre estime de soi. » W. Shakespeare

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Staline victorieux voulait que sa victoire militaire fût implacable, sans concession pour les vaincus. Ses alliés lui emboîtèrent le pas. Or, l'une des choses que ces vainqueurs de 1945 (désormais « la communauté internationale ») pensèrent faire, c’était de renverser le régime de l'Innomable récemment exhumé. Dans son cas, le vainqueur devait accepter d’être puni pour sa victoire puisque plus ou moins allié des vaincus italo-germano-nippons…


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Chancre moins budgétivore que le journal ou le film, le livre est reçu par le public d’une manière mouvante. Elle varie, reste influençable, et les éditeurs savent bien en quel cas X peut aider Y à juger un livre excellent ou inversement. Comme au théâtre, une claque est donc nécessaire pour déclencher l'enthousiasme, d'où le rôle de mains vigoureuses, celles des grands critiques consacrés (!), pour un lancement que l'on exige exemplaire. Laisser à un profane, tout simplement lecteur avisé, le soin de se prononcer sur un ouvrage serait folie et imprudence : le talent, voire le génie, restent une chasse gardée, ils ne sont plus aujourd'hui que la force de l'affirmation de ceux qui sont dans le secret de la chose. Les grands éditeurs le savent bien, eux qui dépensent des millions de publicité dans la littérature, car les spécialistes restent toujours réservés, timorés, et il s'agit de les entraîner. Fragilisés dans leurs convictions, ils attendent de prendre connaissance de l'avis d'autrui pour émettre le leur ; cette sorte de plume en retrait est prompte cependant à se porter au secours de chaque victoire, d'où l'intérêt d'un pilonnage intensif pour faire tomber les hésitations. Dans cet univers « culturel » personne ne rechigne sur cette allégeance à la publicité et surtout au pouvoir, surtout quand il apporte un plein panier de poires pour la soif (de savoir ?) sous forme de fric dans la caisse.  

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Changement d’équipe dirigeante à la tête de l’UPV/EHU. Combien d’illustres robes universitaires ont fini dans les placards entre la naphtaline et l’indifférence des mites ?

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La France est le pays des « meilleurs ». « La meilleure santé du monde, la meilleure armée du monde, le meilleur quelque chose du monde »... Comme elle est celui des décorations, parce que la vanité et la gloriole sont ses péchés mignons. Souvenez-vous de l’Histoire relativement récente : après avoir pris une raclée superbe en 1940, il se produisit une telle inflation de croix de guerre décernées en veux-tu en voilà que le gouvernement dut en retirer un certain nombre par décence : on commençait à ricaner dans les chancelleries où l'heure n'était pourtant pas à la joie. Sous de Gaulle (Monsieur « Je vous ai compris ! Vive l’Algérie française ! »), la Légion d'honneur fut prise d'assaut et atteignit de tels effectifs qu'il créa l'ordre du Mérite dont l'objectif était de faire baisser la crue, tel un réservoir de secours. Après, la Mitterrandie et les gangsters consécutifs ont déjà atteint les limites de la décence et du comique. Le pouvoir est un ascenseur que les assoiffés de gloire de tout pelage (de Louis-Maire Turreau à Rambo ou du tailleur de Sarkozy à J. Debouzze) ne refusent pas de prendre. Y aurait-il un fondement à l’idée que l’honneur des uns, modelable à souhait, fait l’envie du reste ?

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Pas envie de regarder la série Patria. Une société close, fermée et fétide par manque d’air, ridicule et provinciale à force de se vouloir supérieure au commun et en même temps universelle (elle a, elle aussi, sa Diaspora, jumelée partout au Trésor public !), encensée par des planeurs estampillés intellectuels hors du commun. On se demande quelle place y tenait ce que le commun des mortels considère les démocrates, au milieu de tant de mafieux dominant l'arbre d'un establishment dont les branches généalogiques faisaientt déjà partie pendant la longue période du régime de l’Innommable, mort dans son lit. Et l’église locale, un jour courageuse, caracolant péniblement depuis des années à la recherche d’un impossible ravaudage après l’aggiornamento vaticanesque qui la conduirait inéluctablement aux poubelles de l’histoire, entichée de ses ex-ennemis égorgeurs et incendiaires.

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Casas y tumbas me tombe dessus. Et ensuite, des mains. Plus que marre de cette machine à ramasser des prix dont le chef-d’œuvre intégralement en langue basque gît encore au fond d’un encrier ou sur les touches d'un clavier. Doit-il son succès au fait que les Espagnols ne parlent pas le basque ou que, ceux qui le parlent l’ont encore plus mal lu qu’à l’ordinaire ? Certains poèmes, peut-être ?


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mardi 17 novembre 2020

Le bûcheron avec sa hache...



« Lorsque, la hache à la main, le bûcheron atteint la forêt, les arbres se disent : le manche est des nôtres… » René Hausman

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Une position fréquente des « années de plomb » consistait à dire que les terroristes basques n’étaient pas vraiment des basques. « ¡No son vascos, son asesinos! » scandait la foule compacte et bien intentionnée. Ni ces foules manifestantes ni les spécialistes médiatiques voulaient accepter la rupture radicale avec les conceptions traditionnelles de la « basquité » historique. Une nouvelle optique suggérait que l’identité basque n’était pas une question d’héritage mais de choix et qu’on pouvait s’en défaire ou la perdre aussi facilement qu’on l’adoptait. Les Basques n'étaient plus un peuple élu mais des individus qui choisissaient d’être basques. Pour certains, il suffirait de parler la langue, pour d’autres ce serait simplement une forme spécifique d’affiliation politique. Mais l'objectif était toujours de détruire toute trace du passé [du passé faisons table rase] : de la toponymie à l’onomastique, dans un présent bien présent et au nom d’un passé rêvé, pour construire un futur dont les contours simplistes (indépendance et socialisme comme sésame de la libération) - mais ô combien meurtriers - n’existaient que dans la tête des concepteurs de ce futur. On pourrait encore y trouver un détail de proximité avec le sionisme constructeur de chimères par antonomase. Capable, lui aussi, des rapprochements les plus inattendus. Qui considère un jour les textes de la Bible (historiquement parlant assez problématiques !) comme autant de titres de propriété devant notaire et, sur la même lancée, le lendemain, qui fait courageusement coïncider ces mêmes textes bibliques avec le moindre vestige archéologique. Et avec ce tour de passe passe bluffant, il déplace des populations, s'appropprie leur terres et se dépeint lui-même comme la victime entre les victimes mettant ses détracteurs en difficulté. Revenant à nos années de plomb, le problème sera toujours que, si les exécuteurs n'étaient pas basques, ils étaient bel et bien réellement des assassins, basques ou pas. Mais identifiés par l'une des plus arrogantes et indigentes formules léninistes (chaque nation aurait deux cultures : la prolétaire, bonne et positive, et la bourgeoise, foncièrement mauvaise) à la fraction authentique (?) du peuple basque au nom de l’avenir radieux, ils touchaient automatiquement des dividendes à la bourse des valeurs électorales sur un fond d’obscurité chauviniste et de fanatisme ethnique - dont ils voulaient ocassionnellement se défaire pour se réclamer de gauche à chaque fois -  tout à fait extravagants. La foi en la révolution avait déjà remplacé la foi des ancêtres. Cette arithmétique implacable, bien qu’élémentaire, réduit à néant les détours intellectuels de la dialectique et les coupages des cheveux en quatre propres aux critiques (tous réactionnaires, par définition) qui oseraient se situer en face d’eux. La Raison qui, comme tout le monde sait, tonne en son cratère, finit par abandonner les subtilités propres à l’ensemble des facultés de penser et de la dialectique pour se contenter d’assurer la transformation de la spontanéité (prolétarienne) en conscience (révolutionnaire). Bagage suffisant. Que la fête commence. Combien d’étudiants, d’universitaires, de travailleurs et de professionnels de toute branche, appelés en principe à assurer le remplacement social après de dures années de travail, auront-ils franchi ce pas automatique, auront-ils été détournés d’une trajectoire normale par les nouveaux mythes sacrés, auront-ils été formatés en termes du catéchisme de cette vague générosité, communautaire, abstraite, agissant au nom d’une insatiable soif de justice (révolutionnaire), se transformant en combattants disciplinés (avec la conscience d’appartenir au cercle restreint des élus en possession d’un savoir authentique acquis par le biais d’une illumination subite) d’une nouvelle forme de guerre sainte face à l’inertie des masses ? Comme pour une inimaginable quantité de générations précédentes, le prix à payer pour arriver à une humanité parfaite présentera une lourde facture aussi terrible que mystérieusement efficace et pleine superficiellement de noblesse en carton-pâte. Elle englobe la nécessité historique, révélée à peu de gens (les militants conscients, l'élite, l'avant-garde), et la responsabilité personnelle, capable d’éveiller et d'orienter « ce qui est nécessaire » chez les masses débonnaires, conformistes, fût-ce au prix d’actions normalement considérées comme criminelles ou immorales (tuer, voler, racketter, torturer, emprisonner...) par ce passé qu’on vomit, nourri de fables mensongères qu'on écarte d'une pichenette. 

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Pauvre Amérique qui hésite un vieillard à crinière blondasse quasi dément, personnage qui a le mieux incarné l'Amérique après Reagan, persuadé d’être le vainqueur et un vieux canasson quasi sénile. J’espère bien la défaite du premier mais mon opinion et mon désir ne présentent pas le moindre intérêt. C'est surtout pour me faire plaisir dans l’inutile ! Pour le déplaisir, j’en ai ma tasse presque tous les jours devant les photos de Pierre et de Paul, ces deux pitres répugnants en phase civilisationnelle terminale qui nous conduisent depuis des mois immanquablement dans le mur. Le système médiatique dans son ensemble a refusé de voir lors de la motion de censure (une éternité déjà) le vide pourtant flagrant qui habitait Môsieu Sánchez, le candidat Frankenstein. C’est aussi que ses amis propriétaires de médias avaient tout intérêt à édulcorer sa biographie, les conditions dans lesquelles certaines étapes avaient été enjolivées et la vente normalisée de certains aspects vraiment puants de son CV, tel sa thèse plagiée sur commande. 


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Je jubile. Quel plaisir de voir, dès qu'on ne parle encore d'État espagnol mais tout simplement d'Espagne, que le visage de certains interlocuteurs (espagnols !) se contorsionne de manière clownesque pour finir par ressembler à la figure emblématique et inquiétante du personnage du Cri de Munch. Quelle joie d'entendre des bégaiements incontrôlés, souvent incohérents puisque réduits à l'éternel système irrationnel d'appréciation sans fond mais toujours à partir de la haine inavouée de soi-même. Pauvre Espagne ! Réduite à un épouvantail à moitié mort par les zombies (autodésignés progressistes) de retour des années trente et de la plus infâme classe politique qu’il nous ait été donné de supporter. Des zombies crépusculaires à la gueule comique mais plus dangereux que l’actuelle pandémie qui nous crève en silence depuis des mois ! Bientôt 45 balais d’État des autonomies dans notre Zombieland en formation incessante. Et l´Europe court toujours !... 


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Hommage involontaire et inattendu à Régis Messac (ah, son Smith Conundrum !)
Lu un article sur le mur d’un ex-collègue de la fac à propos de la condescendance du microcosme académique à l’égard de Tolkien. Il y a déjà une éternité, mais rien n’a presque changé ! Que ne seraient-ils prêts à dire aujourd’hui ceuzecelles bien de chez nous ! Bardés de mérites ronflants et de notoriété locale, pur folklore de magouilles, tout le kitsch de leurs livres-articles-prix vulgos pour arrivistes débutants ne valant même pas pour se torcher le derrière. Et malgré tout, profondément malheureux, frustrés aussi, de finir en ectoplasmes de la recherche comme on en connaît des milliers dans l’affreux cloaque littéraire. Imbus, frustrés, tyranniques et puis encore gaffeurs truqueurs salopeurs… Toujours soumis à quelqu’un de plus haut placé, ils ont besoin des revues merdiques de leurs potes pour leurs articulets de branquignols ou d’un site sans aucune relecture de pairs, pour donner l’illusion d’un talent porté disparu, en proposant, toute honte bue, des études bancales, trafiquées, ineptes… Émonctoires du savoir académique… Et comme je déteste l’écriture inclusive, je suis forcé à suivre toute la chaîne de la rédaction de mes colères au masculin, conscient néanmoins que c’est la « gent féminine » qui domine largement la colline du marigot philologique sur laquelle j’ai vu grimper pas mal d’individualités atteintes de crétinisme. J’aurais dû rester tranquille dans mon coin comme Messac, au lieu de vouloir fricoter avec cette aristocratie des imbéciles. Ça aurait pu m’éviter d’être aux prises avec des gens nazes, riches d’un QI à un chiffe, ayant l’habitude de parler de haut au commun des mortels. Je vois toujours dans ma tête ces espèces de cons qui résument, ramassent, condensent tout ce que je déteste et ai détesté depuis toujours : les cucuteries, les niaiseries d’abrutis, le ridicule profil de bourgeois cupides et stupides… symptômes d’une époque sinistre et destructrice. Non mais regardez bien autour de vous, regardez-moi ces gueules de con ! Et surtout de conne !
Parenthèse à propos de l'écriture inclusive. Ses fans prétendent qu'elle est née de la volonté de promouvoir l'égalité/femme par le langage. Or, le français et sa grammaire comme son orthographe ont une forme fixe. L'écriture inclusive, ce n'est pas du français et ce n'est pas aux féministes ni aux ramasseurs de champignons de décider quelle langue doit être pratiquée par les francophones et encore moins de se poser en censeurs ou de faire la morale à qui que ce soit. Ils n'ont aucune légitimité pour le faire et ils ne représentent jamais qu'eux-mêmes. La seule puissance des fanas de l'écriture inclusive est celle de la pression médiatique, c'est celle de l'argent du contribuable dépensé pour leur faire plaisir. Enfin si l'écriture pouvait agir sur l'égalité homme/femme, ça se saurait. Le basque est une langue qui ne connait pas le masculin ou le féminin et sa sociéte est loin de connaître l'égalité homme/femme. Il faut tout de même reconnaître que le principal pays du monde où une langue sans genre est couramment pratiquée, le persan, est l'Iran. Grâce à la neutralité du langage, la vie des femmes y est merveilleuse et toute femme rêve de s'y installer, comme tout le monde sait. 

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Après six mois d’épidémie, de négation de l’épidémie, d’incompétence pour traiter l’épidémie, de confinement tardif, de déconfinement non-accompagné, de relâchement y’a de la joie, de confusion entre déconfinement et fin de la pandémie, de reprise de l’épidémie, et enfin de reconfinement et de couvre-feu nocturne, on est toujours à la case départ. En train de revivre, comme dans le film, Un jour sans fin


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Ceux qui disent/écrivent ce qui se passe sont les maîtres de ce qui se passe, les seuls autorisés à expliquer ce qui s’est passé y compris les commémorations détaillées de ce qui s’est passé et les autorisés à annoncer ce qui se passera : le récit des événements par ceux-là même qui les construisent contrôle la conduite du monde au présent et au passé ainsi que sa projection dans le futur. 

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Séries Histoire BBC (Netflix, Movistar…) : là où on mettra ses pieds, on est assuré de rencontrer un excrément anglais à chaque pas… J’ai du mal à ne pas associer nationalisme et catastrophes mondiales. Une bonne partie des tragédies que nous vivons actuellement a été déclenchée par les rêves de grande Serbie, de récupération de l’Alsace et de la Lorraine, des rivalités impérialistes. Le meilleur de la jeunesse européenne décimée, les empires détruits, remplacés par des nations mal découpées, dans lesquelles les nationalismes se sont exacerbés et ont contribué à mettre encore le feu aux poudres. Alors qu’auparavant, les minorités européennes posaient des problèmes à une autre échelle. Le bon usage de l’Histoire ! Il serait bien dommage qu’un perpétuel mauvais usage de l’Histoire transforme l’Espagne en chaudron de haines recuites, en effervescence de communautés irréconciliables. La dernière guerre civile tient dans la mémoire des générations actuelles, des années quatre-vingt-dix à aujourd’hui, une part anormale, presque bouffonne, comme s'il fallait la revivre pour que perdent les méchants. Ça tourne à l’obsession, provoquée et maladive, dangereuse pour aujourd’hui et pour notre avenir. 

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Blagues (sinistres) à propos du gouvernement Frankenstein actuel en Espagne. Largement méritées. Gouvernement de bric et de broc. Car P. Sánchez n’est pas arrivé au pouvoir tout seul. Homme de la jeune génération social-démocrate espagnole – jeune requin apparatchik chassé de son vieux parti par la fenêtre et revenu par la porte des magouilles et de l’auréole tissée toute à son honneur par de puissants  médias affidés –, il a surtout cherché l’alliance hégémonique du côté de Unidas Podemos pour l’appui nécessaire à contrer le poids de ce qu’on est convenu appeler la droite, forcée à quitter le pouvoir en vitesse après une truculente motion de censure. Suprémacistes catalans, nationalistes basques de toute obédience et tout un tas de partis et de formations minuscules le hissèrent sur le pavois avant d’entreprendre une démolition de la monarchie qui finira par tous les dévorer s'ils ne se dévorent pas entre eux avant. 

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Si l’appartenance à une nation pouvait constituer un motif de fierté, elle devrait dès lors être aussi une source de responsabilité. Être fier du bon signifie aussi assumer la responsabilité pour les méfaits au-delà de cette volonté permanente de prétendre que le mal vient toujours des autres et est toujours dirigé contre nous. Le cirque effronté qu’on s’est fabrique autour des noms illustres, vieille manie de chanter les louanges des individus éminents qui se sont illustrés dans les différents domaines de la vie culturelle, du sport, de la science, ne devrait pas supprimer habilement des pistes pour que s'y produisent également d’autres étoiles moins reluisantes : les crapules, les assassins et les plus sanguinaires des bourreaux… qu’on se hâte d’occulter ou de renier quand le bilan doit être établi. Si tout le monde a quelque chose à se reprocher (fadaise sartrienne), il faudrait connaître qui serait capable de nous fournir un critère universel pour mesurer la culpabilité respective de chacun : pour que tout le monde reconnaisse honnêtement les crimes de sa communauté, il faut que tout le monde se défasse de son hypocrisie ne manifestant toujours que l’urgence de faire battre leur coulpe aux autres. L’identité nationale ne repose pas tant sur des actions singulières, frappantes ou remarquables que sur des récits fictifs capables de stimuler la fierté et d’effacer la honte des destinataires. Quelle serait donc la dose de pénitence légitime et sur quelle proportion de la population l’appliquer ? Comment évaluer la sincérité des remords ? Sous quelle autorité incontestable et universelle ? 


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La gauche n’a pas seulement le droit à la censure ! Elle a même le droit au mensonge, au harcèlement, à l’incendie, à l’explosif, à la destruction, aux coups, à la torture, aux mutilations, à l’assassinat, à l’attentat ou au génocide. Et elle ne s’est pas privée d’en profiter. Il y a une légitimité intellectualisée de la violence antifa, dans l’esprit du jeune antifa comme dans celui du juge progressiste ou du policier politisé dans le camp du bien. Parce que c’est le sens de l’Histoire. Voyez comment le même acte va être considéré, tantôt, comme un acte de terrorisme qui porte atteinte à la démocratie et à la liberté et tantôt comme un acte de résistance qui lutte contre la dictature et le fascisme. Et si vous réagissez (« réactionnaire ! ») à cet état de choses, c’est que vous êtes empli de haine. Liberté d’expression ? C’est devenu une peau morte, avec derrière les plus salingues des censeurs, des délateurs pathologiques qui ont trouvé avec ce concept de « haine » de quoi interdire tout ce qui les dérange. Qui, comme par hasard, coïncide avec ce qui dérange le pouvoir, particulièrement le pouvoir invisible, celui des lobbies. Il y a donc deux camps, le camp du Bien, progressiste, de gauche, qui a le droit de s’exprimer, et le camp du Mal, qui a le droit de fermer sa gueule. Contentez-vous de pleurer en silence et ça marche. George Sorel avait écrit un livre essentiel (Réflexions sur la violence) pour expliquer que l’esprit traditionnel est mort de perdre le courage d’employer la violence. Une longue trajectoire, de la vocation pour le martyre qui saisissait les premiers chrétiens au fanatisme des réformateurs au XIe siècle et au radicalisme des réformés. Au XIXe siècle il voyait cette énergie poindre chez les masses prolétariennes. 



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Tout politique digne de ce nom pratique la censure comme celui qui le finance et le soutient. Il y a deux cas où je comprends que l’on puisse croire à la liberté d’expression. Soit vous êtes en position de domination sur les médias et c’est vous qui fixez les limites de la liberté. Soit c’est que vous n’avez rien à dire. Dans le premier cas c’est du machiavélisme, dans le second c’est de la naïveté de l’électeur mouton moyen. Que dire de l’état de la liberté d’expression aujourd’hui en Espagne ? C’est très simple. Lorsque vous êtes pour le reniement des valeurs traditionnelles ou pour la haine de tout ce qui peut rappeler la nation (pas les fictions historiquement inexistantes), la langue commune, comprise de tous et parlée par tous, la religion, le beau, le bien et le vrai, que vous soyez artiste, cinéaste, politique ou citoyen lambda gavé par les médias, vous bénéficiez automatiquement de la carte de la liberté sans limite. Si ce n’est pas le cas et qu’en outre vous ne manifestez pas un soutien particulier pour les séparatismes, les refugees de tout poil, la mémoire de ci ou de ça… faites attention ! Vous êtes « de droite ». Emballage de détail ou bien en vrac. Il n’y a plus de liberté d’expression qui tienne. Aucun passe-droit ne vous sera toléré. Invoquer le chant des Muses vous sera retenu à charge, parce que vous dissimulez. On vous accusera de faire semblant pour pouvoir échapper aux poursuites. On niera que vos critères soient vraiment de la pensée. Et en ce domaine toute politique est prohibée. Vous pouvez critiquer les régimes et dictatures que vous voulez mais vous aurez du mal à parler des mafias narco-gauchistes au pouvoir dans le vaste monde. 


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L’alternative pour la promenade longeant la Bidassoa avec des lunettes en automne par temps de Covid, comme je le fais ces derniers jours avec ma femme, est de les ôter, pas de baisser son masque façon bavoir comme le fait une multitude d’écervelés tenaces. Sans cela, impossible d’y voir quoi que ce soit, embuées qu’elles sont. Cette avancée sans visibilité est à l’image de celle de nos gouvernants. Le vaccin (les vaccins ???) promis pour fin deux mille vingt, puis pour le premier semestre deux mille vingt et un, semble désormais à portée de main, grâce à un labo qui fait de la magie. Aucun commentateur emballé ne semble envisager l’hypothèse qu’il ne soit que partiellement efficace, à cinquante pour cent par exemple, et qu’il faille continuer à protéger la moitié de la population. L’économie ne va pas supporter ça. Au marché, seuls sont installés les marchands de nourriture, des fruits et légumes, ce qui laisse de la place aux clients. On s’y sert soi-même. On remplit son sac puis on rentre dans les mêmes conditions. L’après-midi, je passe des heures à organiser mes notes de lecture puis je classe mes photos de vadrouille ou de souvenirs. Une copie d’icelles est dans la mémoire de Google photos où je pourrais les retrouver en cas de besoin. Que ce logiciel me serve au moins à ça. Car côté réseaux sociaux, c’est de plus en plus décevant. Outre qu’on y est désormais envahi par les liens sponsorisés, beaucoup de celles et ceux qui figurent dans ma liste d’amis y publient peu voire plus du tout. D'autres lisent mais ne plublient rien. Enfin, bref... Biden paraît enfin élu Président des Etats-Unis, ça fait surtout plaisir pour la défaite de l’autre enflure, con arrogant pas prêt du tout à déguerpir de sa maison blanche de merde. 

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Il y a des moments où le système de pompage d’argent installé par l’État est particulièrement injuste et spoliateur, et il est ressenti comme tel d’autant plus fort que le produit de l’impôt est utilisé à des choses qui ne servent pas à ceux que l’on tond, ou même qui les desservent. Aider l’immigration qui échappe à tout contrôle, par exemple. Les îles Canaries semblent au bout du gouffre. Un rythme effréné d'arrivants par jour. Il n'y a pas que les dépenses militaires qui échappent au contrôle. Une majorité de contribuables renâclerait à financer les lubies des professionnels de la générosité aux dépens des autres pour peu qu'on se donnait la peine de leur expliquer. De même, il semble normal que les commerçants et artisans de proximité trouvent particulièrement pénible d’entretenir grassement un État qui les mène à la mort. 

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12 novembre. Loin, les enfants ! Le moral est au beau fixe. Les blocs de graisse et la mangeoire pour les oiseaux sont arrivés aujourd’hui. 

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Celiniana
« Céline, c’est un révélateur chimique. Il met à jour les secrets de famille honteux de la société, tout le refoulé d’une époque déchirée par des contradictions et des hantises qui reflètent celles d’un siècle de fer et de sang. Ce blasphémateur absolu qui répétait après Renan que « le pire est toujours certain », il était juste qu’il incarnât, aux yeux des éternels pharisiens, le bouc émissaire idéal. […] Si Céline croupit toujours dans les dernières bolges de l’Enfer, c’est moins par ses errements politiques et ses fantasmes racistes que son langage métissé, libertaire, subvertissait en sous-main, que pour avoir été la bouche d’ombre sacrilège qui osa dire, à contretemps, la férocité naturelle de l’homme, le mensonge fondamental de la société, la novice illusion du bonheur, la stupide chimère de l’espoir et le vide du ciel où rien ne luit. » Bruno de Cessole, in Céline, l’infréquentable, sous la direction de Joseph Vebret, Jean Picollec, 2011. 


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samedi 31 octobre 2020

Reconfinement ! Retour de chacun dans sa chacunière...





" J’ai oublié, moi qui le connaissais si bien pourtant, le mot de Talleyrand : « Méfiez-vous du premier mouvement : il est toujours généreux. » Je ne l’oublierai plus. " 

Paul Léautaud, Paris le 31 décembre 1906, à Paul Valéry, après avoir été mal récompensé de son aide à une femme dans la misère.

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L’Histoire n’est pas un self-service au gré des susceptibilités des uns ou des autres : multiculturalistes, welcome refugees, etc. Mais si l’on veut éviter vraiment la soumission, alors, il ne reste qu’une seule issue : celle de la guerre, mais vraiment la guerre, pas avec des dessins ni des pleurnicheries répétées après chaque égorgement, chaque décollation, chaque assassinat. Les « insoumis » pour rire, genre mélanchonisme bouffon, penchaient pour accompagner ceuzezelles criant à tue-tête Allah ou Akbar et vociféraient avec eux. Après coup, on pleure tous ensemble… Une fois installés dans le ténèbres, c’est trop tard pour les clamor et stridor dentium !


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Mes élucubrations mentales, une fois publiées, se transforment en opinions exposées ouvertement, en réalité objective pour d’autres. En effet, la dichotomie qui semble exister entre le privé et le public disparaît à partir du moment où on rend « sociale » cette privacité.  N’étant privées qu’en apparence, puisque je ne les garde plus pour moi tout seul, mes pensées individuelles exprimées par écrit s’exposent au regard de tous : regards autour de qui je suis, de quel milieu je suis issu, du parcours social de ma famille, de l’éducation que j’ai reçue, des convictions idéologiques et politiques du cercle d’amis et d’agents sociaux en tout genre qui ont facilité mon intégration à la vie professionnelle, de mon action professionnelle (politique donc politisée) aux différents niveaux, de ma place concrète dans la hiérarchie sociale. J’ai occupé des places dans la fonction publique, dans le secondaire, l’enseignement de langues et le supérieur. Mes postes dans de différents échelons administratifs m’ont permis d’élargir les cercles d’influence et de responsabilité. Chaque étape m’a ouvert la possibilité de développer des contacts avec de différents groupes et de m’en affirmer membre. Ainsi que le remarque Durkheim, l’individu agit toujours comme un être appartenant à un groupe, car toute action personnelle s’inscrit dans « des manières d’être collectives ». Pour des publics différents, il existe des manières d’être qui représentent autant de rôles. Elles s’appuient sur des idéologies partagées à des degrés différents. Les contradictions inévitables acquièrent un sens si elles sont envisagées à la lumière des choix (professionnels) des étapes précédentes et des suivantes. Dans chaque cas, elles sont nécessairement politiques car elles visent à façonner un rôle social exécuté par des individualités dans des cadres conjoncturels (collectifs) précis. J’ai l’impression d’avoir passé une bonne partie de ma vie à me démarquer de groupes que j’avais pourtant impatiemment cherché à intégrer, ou d’individus avec lesquels j’ai d’abord éprouvé quelque affinité intellectuelle ou politique. Sans avoir à justifier mes choix pour chaque étape, il est clair que les antagonismes qui en résultent ont été la conséquence d’un télescopage (subjectif : évolution des opinions, objectif : changements dans les comportements, c’est-à-dire, les praxis) de caractères individuels à l’intérieur des groupes auxquels il m’a été donné d’appartenir et par le conflit permanent dans les groupes dominant eux-mêmes ces groupes. Opinions et praxis sont en même temps étroitement liées aux visées professionnelles et aux parcours publics qu’elles réclament. S’il est difficile de croire qu’une personne ne valorise raisonnablement son intérêt personnel[1], il faudrait avant d’évaluer une trajectoire publique, recourir à la totalité de sources de renseignement disponibles, loin d’une rapide impression platement spéculative et sans fondement tangible. La complexité de la démarche rend insignifiante toute tentative de verdict axée sur des trajectoires qu’on veut expliquer simplement par l’intérêt individuel, source de toute action, alors qu’elles sont indissociables, de près ou de loin, de l’accomplissement d’un certain intérêt de groupe orienté vers des formes diverses de bien commun.

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On lit des discours sur le dérèglement climatique, comme si le climat était réglé comme une horloge sans variation ! Le réchauffement climatique, peut-être ou pas, d’origine anthropique – la faute plutôt à l'homme blanc – si la pollution est une calamité et la surpopulation un désastre, dire que le CO2 est un gaz polluant est absurde : sans CO2 pas de plantes... Quoi qu’il en soit, c’est surtout la bonne occasion pour nous fourguer du baratin écolo, des taxes, des voitures électriques, des éoliennes, etc... Et de nous foutre la trouille comme pour le coronavirus ! Sans oublier le changement climatique qui nous renvoie à tout ce qui précède. Comme si nous maitrisions l’axe d’inclinaison de la terre, le fonctionnement des volcans, l’activité rayonnante du soleil... Encore et toujours : gouverner en manipulant la peur.  On est sommé de ne pas négationner le réchauffisme, la pandémie, les invasions migratoires... Bien sûr je peux faire erreur je ne suis pas spécialiste (pas plus que les journaleux ou toute l’engeance qui gueule dans les rezozozios) mais comme l'on entend/lit tout et son contraire ! Les résultats de la science tout comme les idées en général, ont-ils besoin de militants ? Je ne supporte pas les bavardages de n’importe qui sur n’importe quelle chose où chacun croît qu’il peut pouvoir exprimer la petite idée qu’il s’est faite dans son cerveau à propos de n’importe quoi.

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Nausée. Vidéos historiques BBC à vomir. Répétition jusqu’à l’exténuation du dogme « Hiroshima, Nagasaki, bombardements sur la population civile allemande pour accélérer la fin de la guerre et pour sauver de vies ». A combien d’innocents ont sauvé les bombardements des villes japonaises, de Tokyo, de Hambourg ? Au nom de qui brûlait-t-on Dresde ? Au nom de Juifs eux aussi brûlés ? Peut-on croire une seconde que Britanniques ou Américains agissaient au nom des Juifs tués ? Et qui pourrait agir au nom des autres tués ? Si chacun a ses raisons particulières de tuer, où s’arrête la notion de crime ? Au nom de quelle foi, de quelle liberté peut-on tuer ses semblables ? Au nom du Prophète, des Palestiniens, des Kurdes, des Afghans, des Arméniens… ? Du socialisme ? Sans le respect d'une LOI commune, comment garantir une honnête vie en commun entre des libertés différentes. Si l’on préfère la lutte sans règles sur le marché des libertés, le résultat est connu d’avance ! Si au lieu de la loi on préfère un simple empilement de légendes au jour le jour, chacune se considérant comme authentique et dénonçant celles des autres comme factices, on sera toujours perdu. Indéniablement, une rhétorique vaguement socialiste a toujours la côte auprès de la population. Le problème vient du fait qu’un nombre incalculable de crapules (et de banquiers !) s’en servent pour justifier les principes de leur domination. Néo-tchékistes milliardaires, fous d’Allah, narcotrafiquants au pouvoir… voilà une symbiose d’illusions unique en son genre... Mais la surprise chine : socialisme et marché, quand même !

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La Constitution espagnole de 1978 ne protège pas les gens mais le pouvoir sur les gens. Elle protège aussi des zones de pouvoir, l’espace des différents clans autonomes installés par les équarrisseurs.

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P. Iglesias T., notre dirigeant bien-aimé à queue de cheval rebelle et chignon obéissant, fait penser à ce chevalier de l’Arioste, tué dans un combat mais qui, ne s’étant pas aperçu de cet accident dans la chaleur de l’action, continue à se battre tout mort qu’il est. Cynique chantre de tyrannies stupides déjà dépassées et condamnées à finir dans les poubelles de l’histoire, son triomphe passager de feuilleton américain sera sans doute le présage d’une fin elle aussi tragiquement ridicule. Le niveau de bouse de vache diffusé chaque jour par la 6e chaîne espagnole (« la secte ») en direct finira par tous les noyer. Pour le moment, la demeure madrilène du cacique, à Galapagar (littéralement, un endroit où abondent les tortues d’eau douce), reste intacte et à l’abri, en y apportant une note romantique à l’intérêt qu’elle suscite chez les journaleux de la presse la plus people. Comme tout bon reptile qui se respecte, le podémite mue. Pas en une seule fois comme le serpent, bien entendu, mais au fur et à mesure qu’il occupe des postes. Les filaments d’endogamie, de corruption et d’incompétence encombrant sa carapace sociale l’écartent progressivement du principe farcesque de dictature du prolétariat pour gagner de nouveaux morceaux de peau qui grandissent progressivement aux airs triomphants de celle du propriétariat.    

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Les profs mordus d’écriture et se voyant écrivains ! Un mail de ce pauvre FJGDC ancien prof à la retraite, pardon, « écrivain », me fait penser, avec ses gribouillis prétentieux d’amateur, à la souris de l’histoire drôle qui court à côté d’un éléphant et qui lui dit tout à coup : « Qu’est-ce qu’on soulève comme poussière ! »


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“Desgraciadamente en nuestra Universidad, donde no existía lo que Luis Trías de Giralt (en un alarde menos retórico de lo que podría pensarse) dio en llamar la cúpula democrática, la conciencia política nació de una ardiente, gozosa erección y de un solitario manoseo ideológico. De ahí el carácter lúbrico, turbio, sibilino y fundamentalmente secreto de aquella generación de héroes en su primer contacto con la subversión. En un principio ninguno parecía tener el mando. Ocurre que de pronto en 1956 se les ve andar como si les hubiesen dado cuerda por la espalda, como rígidos muñecos juramentados con un puñal escondido en la manga y una irrevocable decisión en la mirada de plomo. Impresionantes o impresionados de sí mismos, misteriosos, prestigiosos y prestigiándose avanzan lentos y graves por los pasillos de la Universidad con libros extraños bajo el brazo y quién sabe qué abrumadoras órdenes sobre la conciencia, levantando a su paso invisibles oleadas de peligro, de consignas, de mensajes cifrados y entrevistas secretas, provocando admiración y duda y femeninos estremecimientos dorsales junto con fulgurantes visiones de un futuro más digno. Sus nobles frentes agobiadas por el peso de terribles responsabilidades y decisiones extremas penetran en las aulas como tanques envueltos en la humareda de sus propios disparos, derriban núcleos de resistencia, fulminan rumores y envidias, aplastan teorías y críticas adversas e imponen silencio...” 

Juan Marsé, Últimas tardes con Teresa, Salvat, Barcelona 1965, p. 188

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Tous les jours, je me rends compte à quel point je suis encore imprégné des impératifs religieux et moraux de ma mère. Plus anecdotique mais tout aussi puissant, il m’est encore aujourd’hui impossible de regarder un morceau de pain posé à l’envers, dans la panière ou ailleurs, sans le remettre à l’endroit. J’ai gardé un rapport au pain que mes parents avaient hérité d’un âge où ils ne mangeaient pas toujours à leur faim.



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En vérité, je ne suis qu’un parasite habile qui, non sans une curiosité personnelle, transforme les connaissances des autres en ses propres intrigues. J’aime quand des événements d’importance en constituent le décor, mais leur essence, c’est toujours la vie qui passe comme un torrent, qui coule à grands flots emportant nos vérités. C’est pourquoi, peu importe le nombre de lecteurs d’un texte : je serai pareillement ravi par le fait de n’en avoir qu’un, représentant à lui seul l’immensité d’une mer (Hugo considérait la mer comme une personne !). Dans la cathédrale Notre-Dame de Chartres, on trouve le plus grand labyrinthe d’Europe dessiné sur un pavage. Labyrinthe que les fidèles traversaient et traversent parfois jusqu’à aujourd’hui, à genoux, en guise de métaphore d’un voyage jusqu’à la Terre sainte, jusqu’à la Vérité. J’ai rencontré des gens qui ont accompli ce geste symbolique. Cela m’a fortement impressionné. Et cela consolide ma conviction que la vérité est unique, mais compliquée comme un labyrinthe parce que chacun a quelque chose à cacher et quand on la dévoile, ça fait toujours plaisir de la voir simplement partagée ne serait-ce que comme une bouteille de naufragé, récupérée par un inconnu avec son rouleau de papier dedans. 

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Il m'a fallu nombre d’années pour comprendre un déclic, probablement plus important que la lecture de Geneviève de Brabant, premier déclencheur d’émerveillement de mon enfance actionné par ma mère. La scène se situe dans la petite métairie où ma famille vivait, en absence de mon père occupé toute la journée à l’abattage du blé. Devant la maison, bercé entre ses bras, ma mère me parle d’un fil invisible. Mais je ne le vois pas très bien, ce fil imperceptible. Ce soir-là, comme souvent le soir, ma mère a lu de vieux papiers échangés contre de sacs de pommes blettes destinées à nourrir les cochons des moniales de la charité. Elle avait une façon bien à elle de les lire. Elle étalait des revues dépareillées et des morceaux de vieux livres sur la table de la cuisine après avoir nettoyé et séché la toile cirée, puis elle jetait un regard sur l’ensemble. Cette fois-ci elle était tombée en arrêt sur un miracle de Saint Antoine de Padoue. Elle le lut et le relut lentement, puis s’en alla chercher ses ciseaux de couture et le découpa. Elle rangea ensuite le précieux carré découpé dans le buffet et il me fallut une lente lecture personnelle pointant du doigt chaque mot pour comprendre qu’un autre déclic avait été actionné : au retour d’un jour de labeur, un enfant, tombé raide mort sous les roues d’un tombereau chargé de paille était remis en place sain et sauf par la main de Saint-Antoine. Le fil invisible! Plus tard, je revoyais ce même fil mystérieux faire des virages et finir par émerger droit dans les légendes castillanes qu’elle me racontait ou quand elle me lisait des morceaux des miracles de Notre Dame d’un vieux moine poète moyenâgeux qu’elle paraissait avoir fréquenté dans les meilleurs rapports de voisinage. C’étaient sans doute des morceaux d’un même puzzle qui prenaient place dans ma tête avec les histoires magiques de ma grand-mère maternelle et d’autres récits truculents de mon père, lui-même très bavard et très porté sur l’invention de prodiges inexpliqués. L’attachement de ma mère à ce fil invisible, qui nous relie au mystère et ouvre en même temps les portes de la foi, s’est rapidement imposé comme toile de fond de mon enfance (et de toute ma vie ?). 

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Une bonne partie de leur vie mes parents ont été domestiques. Ma mère, dès l’âge de sept ans, domestique de maison logée chez ses patrons. Mon père, valet de ferme. Avec le recul du temps, comment ne pas être profondément touché par leur abnégation au profit de leurs différents maîtres et propriétaires, par cette acceptation d’une vie rude et improbable dans des conditions de travail difficilement supportables ? Je les ai toujours aimés et en même temps je n’ai cessé d’être profondément interloqué par ce que, chez tout autre, j’aurais qualifié de soumission. Or, le mot soumission ne leur convient pas du tout. Ils étaient plutôt fiers. Pas humbles pour un sou ! Ils étaient plus que pauvres et pourtant, avec leurs gestes, leur port de tête rigide, ils ont toujours salué les gens avec une certaine distance et préféré ignorer tout ce qui, à leurs yeux, traduisait le laisser-aller, l’abaissement, la saleté, le mal gratuit et la bêtise. Les rires vulgaires, les attitudes dites populaires leur étaient étrangers. Ils ont toujours promené sur les humains et les choses un regard digne, voire insolent. Je pense notamment aux propos moqueurs de ma mère sur la réalité quotidienne et les personnes soi-disant importantes qui l'entouraient. Et même à son regard sur mon père, comme si elle était d’une essence supérieure à lui… 

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Ne comptons pas sur les médias pour relater la décapitation d’un professeur d’histoire-géo dans toute sa cruauté et les circonstances abjectes qui y ont abouti. En 2017, l’égorgement de deux jeunes femmes en gare de Saint-Charles à Marseille par un islamiste était « un attentat à l’arme blanche ». L’euphémisation est toujours la règle en 2020. La succursale de la bienpensance, le New York Times, insiste le jour de l’attentat sur… la mort de l’agresseur. Le titre initial de l’article « la police française tire et tue un homme après une attaque fatale dans la rue » est remplacé par : « la police française tue un homme qui a décapité un professeur dans une rue ». Malgré la modification du titre, l’islamiste est toujours la première victime que présente le journal américain. Le service public de l’information a également été assez pusillanime dans la couverture immédiate de l’attentat. Un député de l’Essonne, Francis Chouat, a écouté France info peu de temps après l’attentat. Sa réaction sur Twitter est sans appel : « @franceinfo qui ose demander à une enseignante si elle estime que le professeur DÉCAPITÉ avait eu raison de parler caricatures. La réponse est tellement évidente!!! #ConflansSainteHonorine #terrorisme #Islamisme ». Et Claude Posternak constatant que « 8 heures après les faits, @franceinter première radio publique de France n’a toujours pas annoncé sur son fil Twitter la décapitation d’un enseignant par un terroriste islamiste ». Beaucoup ont écrit pour dire à quel point Samuel Paty était un prof formidable. Or, pour moi, même si c'était le pire des profs, il ne méritait pas ce sort. Je ne supporte plus que les victimes soient éternellement sur la défensive et doivent se justifier, je ne supporte plus les discours sur la liberté d'expression au-dessus du droit à la vie. On s'en fout. L'interdiction de meurtre devrait être absolue, de violence physique aussi.

Quelques heures après, rebelote ! Triple crime dans une église à Nice, avec assassinat par décapitation et mutilations. « Dites à mes enfants que je les aime... » : derniers mots prononcés la maman d'une quarantaine d’années qui avait pu sortir du temple, trop blessée cependant pour pouvoir survivre. C'est terrible, barbare, intolérable. Je n'ai pas de mots, je n'ai que des larmes sans décolérer contre les responsables d’une telle catastrophe répétée. L’évolution de la situation pourrait être résumée ainsi : on a imposé, sans jamais demander son avis à qui que ce soit, la présence d'individus violents n'ayant rien de commun avec la société les accueille. Année après année, on a fait des efforts (toujours jugés insuffisants !) pour assurer le bien-être de ces individus et de leurs familles qu'on a fait venir aussi afin qu'ils ne soient pas dépaysés. On a leur a inculqué que la société qui est forcée de les admettre a une dette imprescriptible envers eux et surtout qu'ils ont absolument tous les droits, à commencer par celui d'imposer leurs coutumes et croyances et de réclamer des aides par tous les moyens et sous la forme qui leur plaît. Quand un élément se « radicalise » et commence à donner libre cours à ses lubies, on interdit de l’en empêcher et même de défendre sa vie s’il veut bien vous la prendre. Faut descendre très bas dans le règne animal pour qu'il en aille autrement. Les arguments pitoyables en leur faveur remontent à cinquante ans. Tout ce qui précède étant dit, il y a donc lieu d’être laïc, athée et même, à certains égards, athée militant, de détester toutes les religions, y compris l’Islam, et de détester en même temps Charlie Hebdo. Par leurs dessins pas toujours drôles et souvent ridicules. Parce que la common decency (Orwell) suggère de s'attaquer d’abord à ses propres valeurs, religieuses ou autres, aux puissants proches pas aux intouchables lointains, surtout pas aux faibles et aux exclus des communautés qui ne vous sont peut-être pas sympathiques mais qui méritent du respect. Parce qu’il y a quelque chose d’odieux dans la satisfaction narcissique de mépriser et d'insulter l’autre à travers sa religion, sa couleur, sa culture. Les sous-merdes nationalistes suprémacistes, qui ne font que ça depuis leur origine de mini-sionistes complexés, en savent quelque chose. Toute leur action ne vise qu’à disloquer la société réelle au nom d’une société de rêve, à faire reculer la raison, particulièrement cette sacrosainte « fraternité » dont ils se réclament depuis les « Lumières » , pour autant qu’elle ait jamais existé. Parce que toute leur façon de faire est inspirée par un paternalisme raciste imbécile, profondément irrationnel, qui s’est emparé des soi-disant élites progressistes depuis plus d’un demi-siècle. Et parce que toute une série de pseudo-laïcs ont fait de ce journal un étendard anti-chrétien et férocement anti-islam discréditant ainsi la laïcité.


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Quand j’entends parler de défense de nos valeurs j’ai toujours l’impression que c’est un lapsus, on veut dire nos voleurs.

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La mémoire est une pâte qu’on peut malaxer à volonté et transformer en produits différents à chaque cuisson.

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Parabole du paralytique au pied du manguier : le paralytique ne peut jouer avec des feuilles vertes que s’il y a quelqu’un dans l’arbre qui les lui jette. Sinon il ne joue qu’avec les feuilles mortes… Les partis politiques-paralytiques – la plupart, sinon tous ! - n’existent que par l’argent public et par les fonds de leurs puissants protecteurs. Et donc, la seule façon de réagir face à eux serait de les démasquer et d’expliquer au contribuable que ceux qu’il considère de robustes paladins dévoués à son service ne sont en fait que des paralytiques. Leur pouvoir ne repose plus sur la confiance ou le respect de leurs électeurs, mais sur la crainte qu’ils inspirent et le bénéfice qu’ils tirent des autres pouvoirs. Grâce aux mercenaires des médias et surtout à la presse. Des journalistes aventuriers savent produire à la chaîne des articles et des dossiers dans une stratégie de « mise en scène de l’information » à force de « coups » truculents à même de satisfaire l’appétit des publics ignorants et acritiques. Dans un tel contexte, la peur est devenue leur principale arme. Une peur qu’on met au service d’un combat sans merci contre tout adversaire dénoncé comme corrompu. Car ces traqueurs de gibier – c’est devenu en quelque sorte leur fonction de base – autoqualifiés de gentils ne poursuivent que les secrets des pouvoirs, grands ou petits, qu’ils considèrent méchants. Au nom de cet objectif, ils s’autorisent des transgressions qu’ils condamnent inlassablement chez les autres: violer la confidentialité des sources ; faire fi du secret de l’instruction et malmener la présomption d’innocence ; utiliser la dénonciation, et attendre patiemment les fuites intéressées de juges amis ou de complices de la police. Dès lors, tout est en place, la trompe de chasse est prête. Assurés de leur impunité, les grandes stars du journalisme friqué autodésigné progressiste (espèces mammifères ibériques connues à l'étranger : gabilondos, escolares, ferreras et j’en passe et des meilleurs) peuvent stigmatiser les uns, encenser les autres avec l’aplomb qui leur est propre pour lancer sans scrupules ni décence de véritables campagnes d’opinion… Apparaissent ainsi la partialité de nombre d’enquêtes et cette inexplicable volonté de nuire, de faire mal, de pourrir un quotidien déjà suffisamment pourri par l’absence d’horizon face à la pandémie. Hommes politiques, intellectuels, grands patrons tremblent à l’idée de se faire descendre par ces stupides agents de la bienpensance. Les rédactions des grandes chaînes (quel nom si approprié !) de télévision préparent leur sommaire des heures d’audience avec les avis de ces pitres de référence sur les genoux. De telles attitudes de soumission ont fait de ces stars et de ces chaînes le cœur d’un redoutable dispositif médiatique et, en dernière analyse, le pouvoir d’entre tous les pouvoirs. S’ils ont le droit de vilipender tout ce qui est censé venir de « la droite », de crucifier un patron inamical et de salir des réputations politiques adverses, il est hors de question, jusqu’à présent, de publier la moindre virgule de travers sur les pantins – du microcosme politique, intellectuel ou de l’économie – qu’ils sont payés pour encenser. Ils gagnent partout, tout le temps. Par la peur. Cette façon de vouloir penser à la place des lecteurs, de faire constamment la morale, de traquer plutôt que d’enquêter, de prendre plaisir à pousser en prison ceux qu’ils pourchassent, d’être animés par la haine qu’ils dénoncent vertueusement chez les autres, c’en est trop. Et quand on se trompe par un faux scoop ou une fausse nouvelle, qu’importe l’erreur puisque les faits décrits étaient plausibles… Je m’en veux énormément, tant pis pour ce qui peuvent en penser un certain nombre d’amis, d’avoir attendu le soir de ma vie pour déboulonner des statues que nous avons passé toute une vie à ériger. Ça n’en valait pas le coup : c’étaient des statues à des pas grand-chose.


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Se présentant comme un beau rendez-vous pour les idéalistes de tout poil, les processus d’indépendance des nationalismes périphériques sont devenus de véritables bals des pros de l’embrouille. Surtout pour le cas de la Catalogne. Le spectacle est étalé au grand jour. Sans honte, sur la place publique. Retransmis même sur les ondes. Tous en costume d’emprunt de démocrates de vieille date, ils sont en piste. Ceux-là même que Gregorio Marañón dénonçait comme responsables d'avoir mené jusqu'au bout leur révolution "au nom de Cacus et de caca". Exploitant l’ignorance du peuple et rivalisant en habileté dans l’art de jeter la poudre aux yeux. Comme toujours ! Des leaders socialistes proches et complices de l’abject racialisme pujoliste ont amplifié cette musique. Maragall. Montilla. Pour une conscience réellement de gauche, c’est comme un deuil. Un peu comme celui que j’avais vécu avec la disparition des formes classiques du communisme ou, bien avant, de l’anarcho-syndicalisme. Je n’ai jamais approuvé aveuglement le stalinisme grossier ou le bienveillant fatras anar, mais c’étaient des engagements de jeunesse d'une génération et d'une classe qui brusquement cessaient d’exister. Plus de lieu pour se recueillir. Tous les décors sont occupés par d’autres figurants. Surtout du cirque podémite. J’imagine que la plupart des familles politiques peuplées d’opportunistes le sont aussi. Nous aurons rêvé de l’histoire avec des tas de figurants glorieux.


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On perd facilement de vue que tolérer le blasphème n’oblige nullement à l’admirer ou à le célébrer quitte à admettre qu’il devienne obligatoire.

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Claude Simon et la révolution. Le Palace (le Palace, l’hôtel Colon à Barcelone). Un des personnages, l’Américain, compare la révolution catalane au « cadavre d’un enfant mort-né enveloppé de vieux journaux », « un petit macrocéphale décédé avant terme parce que les docteurs n’étaient pas du même avis… ». À propos de George Orwell, dans les Géorgiques, deux travaux dont j’aurais bien aimé avoir pu disposer à l'époque pour élargir ce sujet (désenchantement de la révolution !) qui m’avait tant fait travailler lors de la rédaction de ma thèse : un exposé fait au Collège de France, Quand Claude Simon réécrit Hommage à la Catalogne (Jean-Jacques Rosat, 9 novembre 2010) et, dans les Cahiers Claude Simon,  L’Orwell travesti de Claude Simon, ou la quatrième partie des Géorgiques (Emelyn Lih, New-York University, 2016). D’autant plus qu’à l’époque (1990) je croyais que Claude Simon n’avait pas été juste ni avec le processus révolutionnaire ni avec ses reproches à Orwell… Avait-il donc subi une si forte désillusion ? Traduisait-il ainsi sa contestation foncière de l’engagement sartrien ?

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« On ne peut user d'un droit dans le dessein de nuire. » À ceux qui veulent se faire une idée précise de la réalité du « droit à la caricature » en France, je suggère d’en proposer une de Moïse de dos et à quatre pattes, à poil avec une étoile sur le trou de balle, les balloches apparentes, masquant mal une ridicule zigounette pendouillant. Éventuellement, vous pouvez en proposer la diffusion dans les écoles au nom de la liberté d’expression, de la liberté de conscience, du droit au débat et tout l’étalage habituel. N’oubliez pas de suggérer aux profs que les jeunes juifs sortent de la classe... Bon courage. Comme cela n’a pas l’air d’être clair pour tout le monde, je précise que pour ma part je récuse ce type de provocations obscènes et injurieuses, qui ne sont qu’accessoirement des caricatures blasphématoires. En Espagne, en Italie, l’exercice du droit au blasphème bassement con est présent partout (on en entend dans la rue, à tort et à travers et aussi bien dans la bouche des jeunes que des vieux, tous métiers confondus), mais pour ce qui est de la liberté d’expression, elle est réalité limitée ou carrément interdite dans moult domaines : prétendue hostilité à l'encontre des Juifs en tant que groupe ethnique à chaque fois qu'on s'oppose à l'État d'Israel, colonialisme, homosexualité, féminisme... L’inacceptable reste toujours le droit à l’injure, à la diffamation et aux obscénités gratuites, désormais gentiment autorisées contre beaucoup (hommes blancs en vrac, chrétiens partout, musulmans si pauvres...).

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12 octobre, fête nationale espagnole et hispanique. Sans nier les brutalités ou les injustices dont ont pu se rendre coupables les conquérants européens du Nouveau Monde, comment ne pas être estomaqué par les exagérations de la légende noire entourant l’action des Occidentaux en général et celle des Ibéro-catholiques en particulier, en rappelant par exemple que la législation royale n’a pas systématiquement négligé les intérêts des indigènes au profit de ceux des colons, et en valorisant l’action positive de la civilisation chrétienne dans son opposition à la polygamie et aux coutumes sanglantes. Peu importe qu’on ait pu démontrer la fausseté de la légende dorée selon laquelle les autochtones américains étaient de paisibles campeurs inoffensifs. Des historiens ont rappelé les multiples données fournies par les chroniqueurs et les anthropologues quant à des traits de mœurs répandus, chez les chasseurs-collecteurs de tout le continent comme dans les sociétés urbanisées du Mexique et des Andes, concernant notamment les sacrifices humains et le cannibalisme. L’abandon de ces rudes coutumes sous la pression de la doctrine chrétienne entraînant un grand soulagement pour les masses indigènes fait toujours tousser les tiers-mondistes des cinq continents, mais pour ma part je crois plausible qu’il y ait là un des principaux facteurs du succès de la conversion des âmes américaines.

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Commençons par le commencement : rien que la vue de Trump à la télé me met hors de moi. Mais quand on me dit qu'il est un parfait crétin, je réponds froidement qu’un type qui transforme son entreprise familiale en multinationale superpuissante est tout sauf un con. Ça a tendance à calmer l’opineur en face de moi. En revanche, j’aime bien recevoir ce même commentaire « Trump est un crétin » de la part d’un petit employé de la commune, feignant au-delà du supportable et en congé maladie le tiers du temps !

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Pauvres Arméniens ! Loin du clan des gentils professionnels... On tremble à se rappeler ce qu’il a fait, ce camp du Bien, pour le Kosovo.  Que les Albanais ont piqué aux Serbes. Que l’OTAN (Solana / PSOE secrétaire général) a copieusement bombardés (Belgrade 1999) pour les empêcher de reprendre leur territoire.

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[1] Ce n'est pas de la bienveillance du boucher, du marchand de bière et du boulanger, que nous attendons notre dîner, mais bien du soin qu'ils apportent à leurs intérêts. Nous ne nous adressons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme ; et ce n'est jamais de nos besoins que nous leur parlons, c'est toujours de leur avantage. Adam Smith, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations