J'aime

dimanche 27 juillet 2025

Vanitas vanitatis, tel est le moteur du machin

NEC SPE NEC METU

Le fait que P. S. soit passé par la procédure pour obtenir un doctorat en économie grâce à un texte dont il n'a très probablement rédigé que quelques lignes, selon toute vraisemblance plagié et truffé de formules et d'expressions qui témoignent que la thèse a été torchée à la hâte, n'a pas aidé à rehausser le prestige de nos diplômes./ Que se haya asumido que Pedro Sánchez ha pasado por el trámite de hacerse doctor en Economía con un texto del que, con mucha probabilidad, no ha escrito más allá de unas pocas líneas y que, con certeza, está plagiado y repleto de fórmulas y expresiones que evidencian lo chapucero de la tesis no ha servido para acrecentar el prestigio de nuestras titulaciones.

La foire aux faux CV et faux diplômes. 
La société de consommation engloutit une terrifiante production de diplômes qui se succèdent au podium des surgelés de l’enseignement supérieur et de collectionneurs pour qui leur simple exhibition les ferait se transformer magiquement en spécialistes dans les différents domaines du hit-parade intello-universitaire. L’accélération de modes s’accompagne d’une accélération du principe premier du commerce, la rotation des stocks. Le principe marchand de la rotation rapide des stocks domine aussi les industries académiques et la production intellectuelle lutte pour la diffusion de ses productions traitant d’éviter la saturation de son marché par l’épilogue périodique des soldes. Dans le secteur de la représentation politique, le marché ressemble beaucoup à ce que décrit le professeur A. Elorza à propos du parti socialiste, qu’il appelle le « parti-passoire » : une clientèle qui se renouvelle si vite que le public, ignorant du passé et crédule au présent, en vient à ressembler au célèbre couteau de Lichtenberg, qui manquait de lame et n’avait pas de manche en se voulant toujours couteau. On a assisté ainsi chez nous depuis des années à l’apparition dans les rangs de la classe politique d’une longue et pittoresque liste de « détenteurs d’études » sans diplôme, d’experts de formation sans valeur académique ni professionnelle et de diplômés bidon. Devant l’opinion publique ignare et crédule, pour des gens dont le gagne-pain se base sur le blablatage dans le vide et les apparences, la réputation, aussi fausse soit-elle, obtenue par le biais de contrefaçons de toute espèce, de la licence en kinésithérapie amazonienne au master ringard à deux balles, est plus important que tout autre chose. Le bluff et le déshonneur, ils s’en foutent royalement. Les électeurs, eux, ne gardent pas mémoire des itinéraires, ni des formations, ni des documents éventuellement présentés pour attester, prouver ou confirmer quoi que ce soit. Avec le temps, un curieux mécanisme d’anonymisation couvre tout. Les « études » des uns, la « chaire » de Mme la Présidente Consort, les « masters » des autres. Grand brouhaha académique d’un intarissable brouillamini politicard aux noms fondus et disparus avec les neiges d’antan. Seuls les sous soutirés aux cons de contribuables restent frais pour très longtemps.
***


Il pleut. Je surveille avec fascination la pluie sur la partie visible du Jaïzkibel. Plus loin, le brouillard. Rendez-vous médical à midi moins dix. Nous sortions, hier, sous l'averse, en direction de l’hôpital. Pluie pratiquement toute la journée. Passé l’après-midi en lisant quelques pages de Claude Roy (Les rencontres des jours 1992-1993), un peu de Maritain (Le paysan de la Garonne), trois dates du journal de Camus (Renaud), Septembre absolu, et quelques lettres de la correspondance de L. Bloy avec Henri de Groux. Quand je termine, au retour de R., je n’ai plus envie, vu la météo, d'aller faire un tour. Je sors prudemment dans le jardin, rentre rapidement, mets de la musique. Vent, pluie, nuages, en quantité suffisante pour décourager la promenade. Je n’aime pas la panique en terrasse, le moment où il se met à pleuvoir et tout le monde panique et se replie à l’intérieur. Le weekend s'annonce mauvais pour la visite du front de mer à Hendaye ou Fontarabie. Pour aujourd’hui, la pluie est annoncée sous forme d’averses mais elle ne semble pas pressée. R. accomplit de petites tâches, toujours remises à plus tard de mon côté. Je lis rapidement la presse française. Polémique à propos de la proposition de Bayrou de faire sauter deux jours fériés. En effet, le jour férié n’est qu’une réminiscence chrétienne et il est plus que normal de faire disparaître tout ce qui est chrétien, parce que ça suffit, l'hypocrisie qui consiste à bouffer du curé mais à profiter des jours fériés. Hop, disparus, l'Ascension, l'Assomption, le lundi de Pâques, le bordel du lundi de Pentecôte et la Toussaint, que personne ne distingue. Ça aurait aussi l'avantage de diminuer les ponts du mois de mai et juin. Aujourd'hui l'école et la vie en général s'arrêtent à Pâques pour reprendre en septembre. C'est la course contre la montre pour réussir à boucler les programmes ou les projets avant que tout le monde ne s'éparpille pour solder ses congés, en mai, puis prendre ses vacances, l’été. On garderait Noël, intouchable grande fête du consumérisme, et on ajouterait une fête juive et une fête musulmane, à choisir avec les personnes concernées. Moins cinq plus deux : trois jours en moins. Et certains prétendent encore que le travail est une valeur de gauche. C'était vrai quand l'oisiveté était une marque de l'aristocratie. Aujourd'hui, la valeur de gauche, c'est le temps libre. Avec l'IA, ça va devenir atteignable. Reste à savoir ce que feront les gens de leur temps libre. Le futur va être intéressant. Par ailleurs, et pour continuer dans le « travail », ou dans sa fin définitive, j'ai découvert par hasard qu'au Danemark, l'âge de départ à la retraite est revu tous les cinq ans depuis 2006 et indexé sur la durée de vie. Il vient de passer à 70 ans pour les personnes nées après 1970. Rien à faire, mon beau-frère, né en 1952 et qui n’est pas danois, donne l’exemple, par pur « âgisme » militant, et repousse sa retraite à 72 ans plus tard. Ça me donne une envie de rire méphistophélique.



                                                                     ***

La caste politique actuellement au pouvoir a du mal à comprendre qu’étiqueter ses opposants avec des qualificatifs aussi infâmants que nazis, fascistes, racistes, extrémistes, complotistes, pro-Poutine, et j’en passe, fonctionne de moins en moins bien : petit-à-petit, les gens maltraités, insultés par leurs dirigeants, finissent par ne plus porter attention à ces stigmatisations qui ne marchent que par ostracisation notamment dans les médias traditionnels, qui, bien malheureusement pour la caste dirigeante, perdent régulièrement leur pouvoir au profit d’internet et notamment des réseaux sociaux.

***

Je n’écrirai pas que ce président du gouvernement est le président de mes rêves, il me suffit de constater jour après jour qu’il est le non-président d’une croissante majorité dans la poisse. Je le croyais dans un tourment extrême à cause de la fétidité de son entourage le plus proche, mêlée aux relents des figures politiques qu’il a promues au rang de pairs de la table ronde du socialisme prédateur, qu’il lui manque des dizaines de milliards pour tenir ses promesses les moins loufoques, qu’après avoir promis une ou deux lunes, son millier de conseillers travaillant dans l’ombre l’avertissent qu’il ne faut pas espérer de miracle, enfin qu’il a des ennuis. Mais il déclare à des journalistes triés sur le volet qu’il adore mettre dans la confidence, qu’il se trouve personnellement frais comme un pinson et que son ressenti par rapport à ce qui lui arrive n’est que la plus ferme disposition à combattre le fascisme sur tous les fronts : Adolf et Benito n’ont qu’à bien se tenir ! L’annonce presque quotidienne, par des personnalités de tout bord, de sa chute imminente m’ennuie.
Car c’est ignorer, ou oublier, que derrière ce sinistre clown, squattant le pouvoir sans gouverner en compagnie du ramassis d’incompétents qu’il s’est choisi comme ministres, se trouve toute la machine oligarchique mondialiste : des marionnettistes qui ne le lâcheront pas tant qu’il n’y aura pas de remplaçant capable de poursuivre leur projet. Et de ce côté-là, c’est la médiocrité absolue, même en comptant sur l’incroyable indulgence du contribuable espagnol actuel. À chaque étape de son sinistre itinéraire, il a avoué se voir en forme, plus fort que jamais. Avec l’extraordinaire assurance du patineur inconscient du craquement du gel sous ses souliers, il avise qu’il a l’intention de se présenter pour un troisième mandat, au risque d’être élu. Force est de constater que nous vivons une période charnière entre un monde ancien, hérité des certitudes démocratiques de l’après-guerre et une chimérique société ouverte dans laquelle on tente de nous faire accepter à grand renfort de propagande et de duperies les pires absurdités. Nous en sommes au point où le pouvoir ne prend presque plus la peine de se dissimiler derrière une pseudo-bienveillance envers la population : il n’y a qu’à voir le ridicule des campagnes de communication et l'arrogance désinvolte d’un individu de cette audace à son poste. Qui ne se maintient point en se renforçant, mais en acceptant le chantage quotidien de ceux qui gouvernent à sa place et, le cas échéant, en réprimant les voix les moins cyniques de son propre parti. Les actions de ses ministres sont certes chaotiques, ruineuses et inefficaces mais radicales dans leur chemin de non-retour quand, par malheur, elles s’appliquent. Cette méthode, bien qu'efficace à court terme, entraîne tout le monde vers le précipice. Difficile d’imaginer comment contrôler efficacement des élites supranationales déconnectées des réalités et aveuglées par leur projet dément, comment stopper leurs nuisibles laquais corrompus, confits dans leurs privilèges ou, encore, comment réveiller, ouvrir les yeux d’une population divisée, sans repères, trop occupée à survivre regardant ces dangers de loin. 

 ***



L'impunité honteuse des crimes sionistes et le silence complice d'une grande partie de la société me révulse sans appel.

mardi 22 juillet 2025

Comment se débarrasser des vautours (politiques) en essaim

 Benjamin Lemoine

                                                                                                                   Antonio Elorza



***

La maladie politique qui nous étouffe, la main tendue de ceux de qui on détesterait être proche, la sympathie de certains vis-à-vis desquels on sent surtout l’envie de rester aussi loin que possible, les journées de guerre partout, l’angoisse sourde qu’on ressent par le génocide en Palestine, le pédantisme et le charabia « idéologiques » où que l’on mette les pieds, tout cela éclipse durablement les petits plaisirs quotidiens de somnoler dans l’oisiveté, d’apprendre (beaucoup), de parler (de moins en moins) et d’écrire (un tout petit peu), de rêver de voyages comme Larbaud, en pratiquant les langues des pays séjournés et en n’étant pas seulement amoureux à Alicante d’une charmante Ella mais aussi des sonnets de Malherbe, des sentences de N. Gómez-Dávila ou des labyrinthes de la vieille ville d’Oran.

***

Les deux corps du roiIl semblerait qu’il circule une singulière version élaborée par l’une des formations politiques qui font tenir debout la coalition au gouvernement selon laquelle P. S., sur le plan personnel, serait une pure crapule, sans besoin d’une longue enquête pour le prouver, mais sur le plan professionnel on aurait affaire à un combinard étonnant et, surtout, que le critiquer enchanterait la droite et l’extrême droite « espagnoles » et pourrait précipiter sa chute avec la convocation d’élections anticipées. Elle préfère, constamment préoccupée par ses propres besoins et intérêts, tenir pour négligeables les déshonorants reniements à répétition de ce même P. S., menteur compulsif, considérant surtout son aversion présente au rituel électoral, pas très favorable ni à sa personne ni à ses prétendues qualités. Elle lui assure, donc, son soutien inconditionnel, « produit des circonstances », comme elle-même l’affirme sans sourciller.

***

Fidèles à leur habitude, quelques raclures de bidet flanquées par pas mal d’ovnis et de plusieurs revenants, s’alarment dans leur habituel pathos rhétorique visant à affirmer en disqualifiant, que des leaders de la droite et de l’extrême droite, de l’église, des conservateurs, des gangs violents de mangeurs d’enfants à Noël et au nouvel An et des philatélistes radicalisés conspirent contre le « gouvernement légitime » (n’est-ce pas !) en vue de le renverser. On chercherait en vain dans la prose de ce manifeste aussi provocant qu’inepte un indice quelconque de connaissance sérieuse de la réalité sociale espagnole depuis des années. On y décèle sans peine, en revanche, la confirmation de l’état de dégénérescence idéologique avancée atteint par des gens qui se sont toujours fait forts de « former l’opinion » ou de « représenter le peuple ». Enfermé dans sa solitude, Big Boss (el Puto Amo) réfléchit, apocalyptique et agonique, à son habitude, à la meilleure manière d’échapper au traquenard ourdi par les méchants, tendu par les forces obscures. Il semble n’avoir pu, malgré son désir d’y arriver, accéder au statut de grand leader incontesté et universellement aimé, devant se contenter du soutien inconditionnel de quelques fantoches crépusculaires qui ne provoquent que le dégoût et le mépris et se sont condamnés par l’arrogance de leur geste purement rituel à l’impuissance et à l’indécence. Ils croient combattre toujours pour la gauche et le progrès au moment même où ils incarnent parfaitement le dédain de l’autocrate tout en l’entretenant.

***

Le champ lexical des stars médiatiques du sanchisme pour éventer la bonne nouvelle par le biais du commando de « l’opinion synchronisée » est émaillé de mots et d’expressions tels que : « parti exemplaire », « transparence », « sabotage », « fange », « fausses nouvelles », « réponse immédiate à », « tolérance zéro », « complot », « féminisme », « homophobie », « mémoire », « mémoire historique », « mémoire démocratique », « devoir de mémoire », « gouvernement de progrès », « légitime », « droite déjà extrême », « extrême droite », « fachosphère », « nazis », etc. Ce vocabulaire n'est pas chiche de grandiloquente dissimulation, et ces quelques formules déposent autour du néant centripète dont ils partent des éléments cardinaux qui délimitent un champ de signes se resserrant sur ce qu'il est possible de penser et de ressentir en pareille circonstance. Aucune liberté, zéro débat : il convient et il suffit de déposer sa lourde croix verbale dans les sarcophages prévus à cet effet. C'est un questionnaire à choix unique que la meute analphabète brûlée de lumière artificielle remplit consciencieusement, fidèle jusqu'au bout à ce qu'elle aura été jusqu’à la fin, un troupeau de laborieux adorateurs du faux et des célébrants serviles du vide, de grossiers personnages qui se sont fait une place à la seule cène qu'ils connaissent, la scène médiatique servile et bien rémunérée. Je n'imagine pas, de manière efficace, une formule pour décrire, pour formuler l'insignifiance de ce monde de pourris. Chacun des mots serait à arracher au sérieux du dictionnaire lui insuffler une dose de sublime ridicule, mais ce serait vouloir rendre un semblant d’existence à ceux qui ne le méritent pas. Ils ne font qu’occuper une scène. Les admirations et les stars d'une époque en disent long sur elle. La mémoire « démocratique », est partout particulièrement convoquée, fût-ce à titre privé, peut-être parce qu'elle a, avec la culture et « les discriminations », ce que les professionnels du wokisme ont toujours convoité durant toute leur existence avec un entêtement admirable : le flou conceptuel absolu. Qui permet de saper fermement ce qu'ils détestent ou d’encenser durablement leurs lubies. Et pour cela, il n'est nul besoin d'être « cultivé, subversif ou révolté », comme l'affirment les crétins qui bavent d'admiration quand ils s'alignent sur les positions (prétendument) progressistes des leurs politiciens professionnels préférés. C'est tout le contraire, bien entendu : il faut être servile, illettré et tenu par le conformisme le plus poisseux, c'est-à-dire, depuis les années 70, un anticonformisme théâtrale, spectaculaire, bien rodé qui n'impressionne que les naïfs et les nigauds. Un ersatz de féminisme. Une volonté farouche de s'attirer les sympathies du « camp progressiste » sous le trompe-l’œil de l’anticonformisme (absolument conforme) et les bénédictions d’une gauche mal nommée qui n’est en réalité qu’une une droite déguisée, sensible jusqu'à la sensiblerie. Prétendant jusqu'à l’exténuation à se voir « rebelle » alors qu'elle a été le plus efficace promoteur de l'idéologie impériale anglo-américaine qui s'est diffusée après 1968 sans aucune véritable objection. Mais elle a perdu en partie son influence sur l’information générale et sur l’actualité : on est maintenant plus vite informé des événements par les réseaux sociaux que par les médias professionnels. Ceci dit, les professionnels de l’imposture ne se lasseront jamais d’exposer leurs âneries, les malfaiteurs leurs crimes, et les affreux leurs horreurs, mais au moins, on est plus largement édifié sur leurs agissements.

 

jeudi 17 juillet 2025

Jours de juillet, jours moroses


***

« Les gens sont portés à justifier les affronts dont ils ne se vengent pas », Guy Debord, In girum imus nocte et consumimur igni.

 


***

L’installation d’Abu Mohammad al-Jolani, à la tête de la Syrie visait à provoquer l’autodestruction de ce pays. Elle est déjà en marche. Une fois que les Alaouites, les chrétiens et les Druzes auront été complètement massacrés, sauf ceux qui auront pu prendre le chemin de l’exil avant, l’entité sioniste sera tranquille sur sa frontière est et pourra conserver le Golan sans rencontrer d’obstacles majeurs. Une guerre civile chaotique longue durée, rien de tel pour servir les intérêts sionistes et anglo-américains au Proche-Orient. À la suite des nouveaux massacres, « Israël », qui occupe depuis 1967 la partie du Golan syrien, annexée depuis 1981, invoque la protection des Druzes pour justifier ses frappes à Damas et au sud du pays. « Israël » siegt an allen fronten.


                                                                         ***

Lire. Fusionnés dans le mutisme, les lecteurs solitaires acceptent de partager des événements imaginaires avec les auteurs qu’ils aiment, qu’ils peuvent lire, consulter, voire, éventuellement, contacter, sans forcément partager leur manière de penser ni leur genre de vie. Ces événements imaginaires constituent le genre d’événements qui font du bien à la solitude et à la pensée. On sait qu’ils existent pour nous. Ce qu'il faut, c'est pouvoir y participer mentalement sinon physiquement, ou couper avec l’histoire quand on le désire. Ce qu'il faut, c'est le retrait paisible, la retraite choisie sans impositions. Tout le contraire de ce que l’actualité exige dans un contrat que nous n'avons jamais signé. La vieille urbanité permettait la solitude et la compagnie, l'incivilité actuelle impose à la fois la promiscuité étouffante et l'isolement impuissant.


                                                                   ***

Écrire pour le plaisir du divers, en faisant une sorte de bilan de presque tout ce qui se passe « au dehors » avec les surprises que cela comporte et pour lesquelles on n’est pas préparé. On est normalement à la merci d’énigmes impossibles. Avec des reprises (y compris d’images ou de photos) et des développements qui ne signifient jamais une fin, une cause, une utilité, mais bien au contraire un horizon lointain, entrevu, jamais out très rarement atteint. Beaucoup d’amertume, de désillusions fruits de la vieillesse mais sans se refuser l’ironie, le traitement du grotesque par le burlesque ou, tout simplement, l’éloge de la vie : « C’est une absolue perfection, et comme divine, de sçavoyr jouyr loiallement de son estre » (Montaigne, Essais, III, 13).

***

Écouter. Vagabondage indolent d’une musique à l’autre, d’une chanson à l’autre, lâchées au hasard comme des oiseaux. Par caprice absolu, comme si c’était de la poésie. Ou de la peinture. Instants de bonheur passagers et répétés par la recherche simple de l’émotion livrée d’emblée, de l’impression primaire de plaisir, appréhendée rapidement. Ma tête, sans repos, passe de l’hommage vibrant à l’Iran de la composition Iran Iran, de l’émouvant Mohammad Noori à L’Orphée et Eurydice de Gluck, de Canciones y madrigales de Francisco Guerrero, à Jordi Savall / Hespérion, Lacrimae Caravaggio  … Grâce à ces « distractions » la monotonie estivale devient seule source de vie, de réalité et, presque, de vérité : étrange assortiment d’existentialisme biscornu mâtiné de doute méthodique dans lequel se confirme ma conviction que l’âge marque la fatigue des certitudes et le déclin des absolus. Et je rends hommage au dur labeur de C. Foulon, La ópera en disco de Mozart a Britten, qu’il compte éditer prochainement. Rien que les trois dernières lignes de l’introduction mériteraient le déplacement, je veux dire, l’achat et la lecture de cette étude de plus de sept cents entrées.



lundi 14 juillet 2025

Cuisine actuelle : tout savoir sur le maquereau

Lectures d'été pour l'édification des plus jeunes et des vieux oublieux


Un troussage de domestique (aïe, encore un socialiste qui joue le rôle de méchant !)


Le vrai roman de Dominique Strauss-Kahn (le meme que ci-dessus mais en calibre)



Du couvent au bordel: Mots du joli monde (frise explicative de pas mal de choses)

***

Ça n'arrive qu'à l'étranger ! Que le journal de référence que El País est censé être – « de révérence » à l’égard du gouvernement sanchiste, en fait – se fasse le relais de mensonges et de contrevérités destinés à dissimuler ou travestir une réalité de plus en gênante aussi bien pour la mouvance sanchiste que pour ses associés n’a en réalité de quoi surprendre. La présentation unilatérale, pour ne pas dire caricaturale, qui est faite des cas de corruption et des magouilles de la vermine au pouvoir offre un bon exemple de manichéisme primaire auquel cède depuis des années le complexe médiatico-politico-intellectuel de notre pays pour embrigader une opinion publique qu’il formate plutôt qu’il ne la forme. Exemple visible de ce que peut être produit et reproduit, en compagnie d’autres média stream du même acabit, comme récits alternatifs de la réalité, réécrits en phase avec la version la plus favorable aux intérêts des autorités officielles, afin de relativiser l’importance des événements sordides et criminels qui sillonnent la trajectoire chaotique de plusieurs ministres et dirigeants « socialistes » et qui hantent le quotidien du pauvre contribuable, ponctionné sans pitié, abandonné à son sort. Les conditions de vie, les besoins et les aspirations des classes populaires, auxquels le fatras présidentiel plein d’idées pures ne peut que demeurer étranger, comptent pour du beurre. Falsifier les faits ou nier l’implication des fautifs en plus de celle, avérée, de leurs complices nécessaires a pour objectif la perpétuation de la bande depuis son accession au pouvoir. Les récentes égratignures de carrosserie de l’image du Big Boss, pataugeant dans un vaste et sordide univers prostibulaire connu depuis longtemps, entament considérablement sa réputation auprès d’un électorat féminin incessamment caressé dans le sens du poil, envers et contre tout. Ignorant les implications politico-idéologiques des activités de sa belle famille dont il a largement été bénéficiaire, le président n’a pas hésité une seconde pour proclamer haut et fort sa répugnance pour celles des deux derniers secrétaires d’organisation de son parti, par lui nommés et de sa confiance la plus totale, faisant semblant de vouloir s’attaquer de face au problème la prostitution. Et de prendre de façon urgente et définitive des mesures, avec des amendes et tout. De sorte que, à force de cynisme et de tartuferie, mettre sur le tapis, dans le débat public qui agite le microcosme politique, ce qui restait un point aveugle ou une question tabou pour l’opposition, revient à parler de corde dans la maison du pendu. Les vitupérations franchement délirantes, frisant souvent l’hystérie, dont ont fait l’objet les allusions du chef du parti populaire (PP) à ce sujet sont la meilleure marque de l’allergie viscérale à tout ce qui peut mettre en cause la haute opinion qu’ont d’eux-mêmes les adeptes autoproclamés « progressistes » de la secte, toujours à la traine du président, qui jugent sacrilège toute contestation de leur monopole de l’honnêteté, voire de la décence, institué en Table de la Loi. Tout ce qui porte atteinte à l'image de leur Narcisse est faux et archi-faux. Point barre. Commençons par écarter les faits et la discussion sera définitivement tranchée. 

*** 

Bienheureux les silencieux. Blogueur laborieusement insignifiant, je sais pourtant que j’ai de vrais lecteurs qui, eux, préfèrent se taire et ne pas faire confiance aux mots. Ils savent sans doute combien il est difficile de trouver le ton juste, les mots à la fois singuliers et pertinents qui pourraient sinon apporter quelque chose au jeu de sortie du labyrinthe quotidien, du moins y répondre autrement que par des réflexions rapides, des hors-sujet navrants ou des blagues consternantes dans chaque case du chemin parcouru. La « facilité » du blog autorise à raconter n’importe quoi sans avoir à le prouver par « une analyse concrète d’une situation concrète » comme l’intimait ce penseur et leader rétrograde de Lénine. Tout n’étant qu’affaire de « discours », comme le croyait ce philosophe à la con de Laclau, il suffira toujours de substituer un mot à un autre et l'affaire sera dans le sac …

***


***

jeudi 3 juillet 2025

La fabrication du consentement : gare aux loutons !

 

Les loutons, des loups déguisés en moutons. Incapables d’un cri de dignité, d’une protestation, d'une réaction courageuse, les médias d'obéissance sanchiste (La Sexta, El Plural, El Pais, RTVE, Cadena SER, et un long etcétera), aussi bien ceux du service public, financés par le contribuable, que les privés favorables au gouvernement, refusent de manière opiniâtre et dévouée toute amorce de vraie critique ou autocritique face à la corruption galopante du chef de l'exécutif, afin de préserver sa légitimité (notion qui l'obsède), fragilisée par les cas, plus inadmissibles les uns que les autres, qui jalonnent le chemin de putréfaction de cet individu à vocation de chef éternel, mais pratiquement inopérant depuis le premier jour de son incrustation au pouvoir. Chaque info qu'ils lancent, savamment décortiquée, suit un parti pris dans l’utilisation des procédés indispensables à l’enregistrement du réel en tant que matière première (collecte, filtrage et sélection des sources, « mise en boîte » des faits, synchronisation des argumentaires), une stratégie commerciale extrêmement peaufinée dans la diffusion des résultats (contrats mirobolants passés avec des stars médiatiques ou des célébrités du monde du divertissement, meilleures heures d’audience, distribution gratuite de journaux aux gens dans les lieux de passage, abonnements gracieux) et une soumission à part entière aux intérêts de la coalition de gouvernement dans l’interprétation des données traitées (victimisation systématique, malgré la position dominante des auto-désignées « victimes », en réalité des gens et des institutions qui ont le bras long, prêts à la répression de la moindre dissidence, experts en abus de pouvoir ; réquisitoires sans appel ; violence sournoise contre des catégories chosifiées, galvaudées et, en fin de compte, discréditées partout depuis longtemps, comme peuvent l'être l’idéologie de droite et d’extrême droite et leur masse électorale en vrac, en tant que dangers imminents pour le genre humain en général et notre avenir de plus en plus progressiste en particulier) permettant aux « journalistes » et aux créateurs d’opinion de venir expliquer à un large public résigné, avec décontraction et sur de bonnes doses de cynisme, les dessous de chaque affaire, étouffée à l’instant même où elle est présentée à l’opinion, si susceptible de mettre en difficulté le pouvoir sanchiste ou dûment cuisinée, si capable d’embarrasser l’opposition. 

En le faisant, sous la commande et la manipulation des maîtres au pouvoir, ils prétendent à des titres d’objectivité au-dessus de tout soupçon, alors que de ce point de vue, leur travail s’apparente pleinement à celui des propagandistes sinon des thuriféraires. Pourrait-il en être autrement dans un monde où des politiques professionnels s’arrogent le droit de tromper sciemment le public, y compris celui de leur bord, afin de durer longtemps au pouvoir et de ménager les puissants qui garantissent leur accès à la soupe (aux cochons) ? C’est pour cette raison incontournable qu’il est impossible de distinguer entre les simples récits ou exposés de la réalité et le regard intéressé des décideurs, fabriqué et formaté à des fins politiciennes. Il faudrait un effort surhumain pour ne pas perdre pied sur le terrain miné par ces faux-vrais informateurs, propagateurs d’illusions engendrées par les oligarchies qui les financent. Il n’est donc pas étonnant que le cinéma de fiction soit souvent plus intéressant, plus porteur, plus évocateur dans la représentation de la réalité sociale que les productions (documentaires, reportages, interviews, dossiers, etc.) des médias les plus réputés, ne reposant sur aucune enquête sociologique contrastée, sérieuse, fiable ou tout simplement honnête. Ils sont tous techniquement très efficaces mais sans véritable méthode analytique indépendante digne de respect. D’où la question du public de savoir où se cacherait le Luis García-Berlanga d’aujourd’hui, ou quelqu’un de toujours vivant, genre Santiago Segura, capable de remmettre en activité le commissaire J. L. Torrente.




mardi 1 juillet 2025

(Im)Puissances de la routine


Les queues de dragon de l’anxiété. Mes deux craintes principales, à l’aller ou au retour, de chaque longue journée de voiture pour rejoindre la maison à Irun ou quitter l’appartement d’Alicante : la première est celle d’un orage si je vois des nuages noirs au lever du jour au moment du départ, des coups de vent violent, de la grêle, du brouillard, etc. La seconde, liée aussi à des orages ou à du mauvais temps, des dégâts qui pourraient endommager notre habitation. Je redoute surtout la grêle car le souvenir d’un moment d’angoisse, en compagnie d’une collègue de la fac refugiée dans ma voiture sous l’auvent de fortune d’une station d’essence, pendant que des boules de grêle cabossaient sérieusement les carrosseries sans protection, est toujours trop fort. J’ai également d’autres craintes que je n’énumère pas. Je me demande à chaque fois qu’en sera-t-il à notre retour. Si ce n’était pas la voiture, ou l’état de la maison, ce serait l’ordinateur, et j’en passe. Jamais je ne voyage décontracté même si en apparence je garde le calme.

***

On n’y échappe pas. Quelqu’un qui réunit la triple condition d’ancien élève, d'ami et de lecteur habituel, me conseille d’envoyer promener la politique. Aristote affirmait que celui qui échappe à la vie sociale est une bête ou un dieu, un ermite ou un solitaire, se suffisant pleinement à lui-même et sans nul besoin des autres. Or, la vie de la polis en interaction et coexistence implique pas mal de choses. Actif, la fonction que j’ai exercée m’a fortement implanté dans la vie sociale et, sans vocation aucune, mission ni désir de suivre les voies de la politique professionnelle, pleinement conscient de ne pas avoir été appelé, par ma sagesse, à gouverner la cité, ambition plutôt platonique, je n’ai jamais eu l’impression d’être une bête ni prétendu au titre de démiurge sous l’auréole d’une activité surnaturelle : la « vie de l’esprit ». Dix ans après mon départ à la retraite, je me contente de vivre dans la contemplation une vie qui n’est pas purement contemplative, restant donc un homme, un membre vivant de la société, mais simple rouage de sa grande mécanique. Cela étant, je ne vois pas le moyen de me prémunir contre les appels de sirène de l'information qui nous submerge de partout, qui nous tombe dessus, « en spirale et non en ligne droite, par saccades, par catastrophes, par révolutions » comme les ondes de la dialectique déferlaient sur la tête de Lénine. En d’autres termes, impossible par là, de s’isoler des inévitables torrents de nouvelles qui nous inondent à chaque instant. Pour réussir cette entreprise, il faudrait savoir construire en nous-mêmes des châteaux forts, remonter complètement les pont-levis et en arriver à un hermétisme total. Il faudrait jeter par la fenêtre télé, portables et ordinateurs pour que le réel, ce piège invisible, ne passe plus avec ses bruits séducteurs et ses images tentatrices. Créer de la distance, si efficacement abolie par la vitesse en expansion et par l'idéologie faussement progressiste de la technologie imparable. Assommés par le monde qui déferle sur nos pauvres cerveaux, nos capacités de tri, de réflexion et de réponse rétrécissent jusqu’à disparaître. Le pire étant que chacun, euphorique, se croit le seul vrai et authentique relais, indispensable, bien éclairé, indemne d’ignorance, celui que les autres devraient écouter sous peine de mourir idiots. Plus jeune, le vaccin à deux doses contre la subordination calculée à une vision du monde pour améliorer « les choses » et contre l’optimisme béat et angélique de la « foi sociale » m’a facilité, je l’espère, une certaine immunité. Après avoir compris dans quelles illusions je risquais de me laisser entraîner sans remède.
Plus j’avais des choix : engagement politique valorisant, carrière dans l’administration, que sais-je encore, plus les possibilités paraissaient grandes, plus le droit chemin se révélait difficile, long, laborieux, incertain et arbitraire : hors de portée finalement, alors que c'était juste le contraire qui semblait garanti au départ. Déjà, une frontière devait été franchie presque sans s’en rendre compte : celle de la soumission, souvent aveugle, non pas à plus fort mais à plus con que soi. Pourtant, je ne suis pas le moins du monde réfractaire à l’autorité. Loin de moi la tentation de la nier ou de négliger son importance, mais je sais qu'au-delà d'une certaine hiérarchie, d'une certaine organisation pyramidale, les choses s’organisent toutes seules sans bruit tout en gardant leur cadre théorique, et vivre sous l’autorité d’autrui, souvent visiblement incapable, sans possibilité d’opposition, en renonçant à soi-même, dépasse, pour moi, les limites. Avec le risque de s’y habituer, une fois qu’on en a dépassé certaines. C'est toujours a posteriori qu'on se rend compte de l'escroquerie. C'est pourquoi les débuts sont toujours enthousiasmants, comme les révolutions, mais mènent invariablement au désastre.

***

Mon très bel aujourd’hui. Il m'arrive de me fixer un objectif de lecture, mais il ne reste mon objectif que durant un quart d'heure, jusqu'à ce qu'un autre, plus séduisant, passe à portée de pensée. J'en rêve, en effet, d'avoir un objectif solide, un projet, comme disent les gens vraiment sérieux, de savoir où je vais, de ne pas dévier, de ne pas quitter le chemin, l'idée et l’itinéraire qui l'accompagne pour aboutir à un essai, un article, un livre, quelque chose de costaud. Une utopie, mais pas plus, et de moins en moins. Ma vie « retraitée » fuit par ces objectifs, ces trous, ces fenêtres, ces soucis incessants qui me renvoient d'une information à l'autre, d'une image à l'autre, d'un livre à l’autre jusqu'à en perdre la tête et le sens, c'est-à-dire le but que j’avais choisi et la concentration nécessaire pour y arriver. De plus en plus, je lis trois ou quatre livres à la fois, en parallèle. Signe tangible de l'égarement. Le savoir, à la fois verbe et substantif, m’échappe à grands pas. Je me console en imaginant que ces projets loufoques répétés me laissent quand même quelque chose de merveilleux que je ne pourrais même pas nommer. Impuissant, je finis, à coup sûr, toujours par capituler. Sachant l'obstacle trop haut, je choisis de le contourner ou de l'ignorer. J’écris « à coup sûr » puisque j’ai perdu la capacité de résister à mes fantaisies et je sais que tout recommencera le lendemain …

***