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vendredi 12 septembre 2025

Chasse constante au merveilleux derrière le « vrai de la chose »


Va là où ton désir te porte

Kant donne dans son Canon de la raison pure la définition de la foi que voici : « L’opinion est une croyance qui a conscience d’être insuffisante aussi bien subjectivement qu’objectivement. Si la croyance n’est que subjectivement suffisante, et si en même temps elle est tenue pour objectivement insuffisante elle s’appelle la foi. La croyance suffisante aussi bien subjectivement qu’objectivement s’appelle science ». À partir de là, chaque individu qui a « une opinion » devrait être conscient, aussi bien subjectivement qu’objectivement, de son insuffisance. Tout comme celui qui nourrit « une foi » devrait accorder à un observateur objectif qu’elle est objectivement insuffisante. La question qu’on devrait se poser alors serait : pourquoi une croyance devient-elle subjectivement suffisante ?


Dès le début, l’objectif et le subjectif, le réel et l’irréel, se trouvent condamnés à l’affrontement. Déjà dans l’Iliade, récemment relue pour situer certains passages des Cantos de Pound, toujours en cours de relecture, le nom même des choses est différent dans le domaine des dieux et dans celui des hommes. Don Quichotte est fou par les romans de chevalerie, mais pour tout le reste, il fait preuve « d’une intelligence claire et facile » qui lui inspire son éloge des armes ou ses conseils à Sancho pour le bon gouvernement de son île. Dans chacun de ces deux mondes, les choses et les êtres n’ont pas la même substance ni le même nom. Les géants et les ailes de moulin sont simultanés, en même temps. Alonso Quijano « le Bon » et don Quichotte, la même personne. Persuadée d’un perpétuel « enchantement » qui trouble le cours naturel des choses réelles. Mais dans l’ordre de la connaissance, il n’est pas plus fou que Descartes avec son « malin génie » capable de troubler toute évidence sensible. Sauf que les allers-retours du « réel » à l’arbitraire de la fantaisie sont généralement pleins de malheurs, de peines dures, « d’aventures », d’épreuves impitoyables à subir, inévitablement. La même « volonté pure » qui fait choisir à don Quichotte le merveilleux a fait choisir l’idéalisme à Emmanuel Kant. Qu’il prétend éloigné d’un « idéalisme visionnaire » et sans déranger nullement « les objets ». Le seul bémol serait que le monde « objectif », des objets, le monde des « évidences sensibles », n’a jamais pu enchaîner la folle du logis. (*)

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(*) Expression de Sainte Thérèse de Jésus (El Libro de la vida), attribuée à Malebranche ou encore à Sainte Thérèse de Lisieux ... 

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