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samedi 2 août 2025

De la pluie en août, n'en faut pas du tout ?

N’étant moi-même anonyme nulle part, je demanderais à qui désirerait laisser un commentaire de ne pas le faire anonymement. Je déteste l’anonymat. Quand on dit quelque chose, on doit en assumer la responsabilité, sinon ça n’a aucune valeur.

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Chaude lumière du vieil or crépusculaire qui entre par la fenêtre ouverte dans la pièce du Philosophe en méditation de Rembrandt. Et l'odeur du feu. Rencontre heureuse de deux feux, celui du crépuscule et celui crépitant lentement à droite et qui laisse son reflet sur le visage de l'homme qui veille à ce qu'il brûle correctement. Une poignée d'idées chauffent dans les lueurs brumeuses et dansent sur le mur jaune suspendues par la queue. Le sage qui semble endormi et l'ombre de l'autre qui se penche pour remuer les braises en silence pour ne pas le troubler.

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Communication codée : les oiseaux du matin tiennent à nous informer qu’il fait jour, juste quand nous voudrions dormir encore un peu. Depuis je ne sais combien de jours, les terrasses de notre Zabaltza Plaza ressemblent à un décor de cinéma où la pluie serait protagoniste indiscutable. Il ne se passe quasiment pas d’heure sans que les serveurs ne soient pas obligés de faire descendre un auvent à cause d’une averse aussi dense que brève. Je ne me souviens pas de quand date le dernier bel été à Irun. Les touristes qui viennent ici pour éviter la chaleur ont raison. Qu’ils n’oublient pas leurs parapluies ! Ce temps médiocre me permet néanmoins de lire plus longtemps que jamais. Sur les pots du jardin, les fleurs et plantes des différentes espèces, si bien entretenues par R., redoublent de splendeur sous la lumière verte et la haie demande à cris d’être tondue par un professionnel. Entre deux lectures et entre deux averses, je me risque à fureter dans la bibliothèque à la recherche de livres que je pourrais éventuellement offrir. J’en trouve plusieurs que je mets de côté en attente d’une main qui voudrait les rouvrir. Beaucoup de fenêtres fermées autour, les gens sont sans doute partis en vacances. Volets clos et grand silence. Je souris en pensant aux appartements d’Alicante, fenêtres grand ouvertes tout le temps, où les habitants ont trouvé la parade aux menaces de la télé. Elle reste allumée toute la journée mais personne ne la regarde. Sauf les enfants, ces victimes, qui n’y échappent pas. Longue promenade, l'après-midi, dans la baie de Tingudi. Nous découvrons une jolie terrasse, Obakartier, à Belcenia, et immédiatement après, au nouveau fronton  Daniel Ugarte, une jolie inscription en basque se demandant ce que serait ce pays sans la pelote basque ...  


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M., notre fille qui n’avait pas deux ans et n’avait jamais vu tomber ces flocons légers qui font froid dans le cou et s’exclamait dans la fenêtre : « Maman, de petits pigeons tout blancs ! »

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Je puis admettre beaucoup de choses, à l'âge que j'ai, ce n'est pas très difficile. Je pourrais par exemple convenir que je ne suis pas sûr de tout ce que j'ai écrit dans chaque ligne que j'ai écrite, de ce que je rédige dans chaque post. D’ailleurs, il n'y a pas grand-chose dont je sois absolument certain. Mais je peux tout de même déclarer ouvertement que beaucoup de textes de gens connus sont ennuyeux, et me rendormir tranquillement, sans forcer la note. Et puis il faut bien que quelques vérités, très peu nombreuses, tiennent le coup, malgré tout, jusqu'à la fin, qu'on puisse se reconnaître dans le miroir, le matin. Il y a si peu de choses qui résistent au temps. Autant les critiquer sans complexe. Il y a énormément de livres que je n'ai pas su aimer, que je n'ai pas été capable d'aimer comme il l'aurait fallu. Il n'y a pas un mois qui passe sans que je constate que mes goûts changent, et très souvent dans un sens imprévisible. Ces choses-là sont passionnantes à observer, même si elles peuvent inquiéter. Le goût littéraire a toujours été la grande inspiration de ma vie autant privée que professionnelle pour briser les grisailles quotidiennes. Cette question ne cesse de me poursuivre et je vois bien qu'elle éclaire tout le reste, qu'elle fait ressortir des questions, des amours et des détestations, des instants de bonheur et d’intervalles d’écœurement : pourquoi aime-t-on certains auteurs et pas d’autres, qu’on déteste, en fonction des propres changements intérieurs ? 
Car l'amour et la détestation ne s'excluent pas, en ce domaine, au contraire. La force de ce qu’on écrit par rapport à la vie qu’on vit, justement, est l’une des formes qui, déjà dans ma jeunesse, me semblait la formule la plus intéressante, la plus difficile, la plus imperméable aux clichés, et j'ai cru, et je maintiens dans le déclin de ma vie, qu'elle est aussi la forme de la plus extrême exigence. Ce n'est pas pour rien que les chefs-d'œuvre les plus incontestables de la littérature de tous les temps répondent à ce critère. Elle est devenue, cette forme, quelque chose qui m'a troublé en permanence et je sens toujours qu'elle m'accompagne dans tout ce que je prends entre mes mains. Avant même d’en lire une ligne, avec l’envie, lecture faite, de communiquer mes impressions à d’autres. Intellectuellement, cela répond à la modalité « d’engagement » qui me plaît davantage, parce qu'elle s'affronte à la dualité fiction/vécu dans les faits accomplis. La science-fiction, les chimères et utopies purement imaginaires n’y échappent pas. Le plus bizarre, intraduisible et séduisant d’un Kurt Vonnegut, par exemple, réside justement dans l’interconnexion entre les frontières du réalisme de son vécu, qu’il fait ressentir physiquement au lecteur, l’anéantissement terrifiant de Dresde sous les bombes alliées et la descente dans le plus profond du champ du fabuleux, du fantastique, de la main de Billy Pilgrim, drôle de "pélerin" sur le plus terrible des chemins. Et puis, il y a pas mal de fiction dans la vie réelle, en même temps que de réalité dans la plu excentrique fiction. Une vie d'homme n'est-elle pas une changement permanent sur l’immutabilité apparente ? 

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Guardado en la tartana de hojalata


“Era flipante ! (sic)”. Mi dulce Adou, “radiante y alerta como un aleph”, mientras yo le contaba los cuentos por la noche, no veía al día siguiente, ya de día, al Zampapanes atravesar corriendo el camino para esconderse detrás de la ermita de San Marcial. Pero sí creía, imperturbable, en cada historia de Abul Quasimi, el tamborilero de Bagdad. En los viajeros misteriosos por los caminos de Egipto, en las historias de Sheherazade al sultán Shahriar. En el cortejo de la Santa Compaña bordeando el caserío Xenperenea. En elfos y lamias, en zapaterillos o sastres valientes y en ogros muertos de hambre, en el Tío del Saco, en ballenas perdidas en los remotos mares que algún navegante confundía con islas despobladas, en haditas cautivas en frascos de cristal, en magos imitadores del gran Merlín y en los ardides de la Princesa Micomicona poco dispuesta a matrimoniar con el gigante Pandafilando. En el recuerdo quedan chispas de la fiesta de cada noche, de infinitas aventuras con héroes de sueños que no robará nadie, compañeros de viaje en el océano fabuloso que cientos de pescadores de cuentos han recorrido para amarrar sus barcas en recodos de la memoria de incontables abuelos.

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Frente a la gran mentira

Derrière les grotesques formes partitocratiques de démocratie parlementaire à l’espagnole sous le gouvernement frankenstein sanchiste, les forces agissantes sont des bandes qui se concurrencent entre elles et s'allient pour le pillage et la répartition du butin. Le modèle de gouvernement adopté par la monarchie partitocratique, sous les derniers Bourbons, est l'association de malfaiteurs. Selon les termes attribués dans de différentes procédures en cours relatives aux grands personnages et aux petits personnages du microcosme qu'est ce sanchisme rédempteur et immaculé au pouvoir. Des scénarios politiques qui font rire à partir d'expériences qui font mal. Surtout, qu'à la rentrée, le comique risque de monter et ne plus cesser, avec le dramatique de la main de la tyrannie, des humiliations sans compter des gouvernés au gré des humeurs des sinistres gouvernants et de la cécité simulée des soutiens d'un "pouvoir progressiste à reculons" pour prolonger la kermesse.

dimanche 27 juillet 2025

Vanitas vanitatis, tel est le moteur du machin

NEC SPE NEC METU

Le fait que P. S. soit passé par la procédure pour obtenir un doctorat en économie grâce à un texte dont il n'a très probablement rédigé que quelques lignes, selon toute vraisemblance plagié et truffé de formules et d'expressions qui témoignent que la thèse a été torchée à la hâte, n'a pas aidé à rehausser le prestige de nos diplômes./ Que se haya asumido que Pedro Sánchez ha pasado por el trámite de hacerse doctor en Economía con un texto del que, con mucha probabilidad, no ha escrito más allá de unas pocas líneas y que, con certeza, está plagiado y repleto de fórmulas y expresiones que evidencian lo chapucero de la tesis no ha servido para acrecentar el prestigio de nuestras titulaciones.

La foire aux faux CV et faux diplômes. 
La société de consommation engloutit une terrifiante production de diplômes qui se succèdent au podium des surgelés de l’enseignement supérieur et de collectionneurs pour qui leur simple exhibition les ferait se transformer magiquement en spécialistes dans les différents domaines du hit-parade intello-universitaire. L’accélération de modes s’accompagne d’une accélération du principe premier du commerce, la rotation des stocks. Le principe marchand de la rotation rapide des stocks domine aussi les industries académiques et la production intellectuelle lutte pour la diffusion de ses productions traitant d’éviter la saturation de son marché par l’épilogue périodique des soldes. Dans le secteur de la représentation politique, le marché ressemble beaucoup à ce que décrit le professeur A. Elorza à propos du parti socialiste, qu’il appelle le « parti-passoire » : une clientèle qui se renouvelle si vite que le public, ignorant du passé et crédule au présent, en vient à ressembler au célèbre couteau de Lichtenberg, qui manquait de lame et n’avait pas de manche en se voulant toujours couteau. On a assisté ainsi chez nous depuis des années à l’apparition dans les rangs de la classe politique d’une longue et pittoresque liste de « détenteurs d’études » sans diplôme, d’experts de formation sans valeur académique ni professionnelle et de diplômés bidon. Devant l’opinion publique ignare et crédule, pour des gens dont le gagne-pain se base sur le blablatage dans le vide et les apparences, la réputation, aussi fausse soit-elle, obtenue par le biais de contrefaçons de toute espèce, de la licence en kinésithérapie amazonienne au master ringard à deux balles, est plus important que tout autre chose. Le bluff et le déshonneur, ils s’en foutent royalement. Les électeurs, eux, ne gardent pas mémoire des itinéraires, ni des formations, ni des documents éventuellement présentés pour attester, prouver ou confirmer quoi que ce soit. Avec le temps, un curieux mécanisme d’anonymisation couvre tout. Les « études » des uns, la « chaire » de Mme la Présidente Consort, les « masters » des autres. Grand brouhaha académique d’un intarissable brouillamini politicard aux noms fondus et disparus avec les neiges d’antan. Seuls les sous soutirés aux cons de contribuables restent frais pour très longtemps.
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Il pleut. Je surveille avec fascination la pluie sur la partie visible du Jaïzkibel. Plus loin, le brouillard. Rendez-vous médical à midi moins dix. Nous sortions, hier, sous l'averse, en direction de l’hôpital. Pluie pratiquement toute la journée. Passé l’après-midi en lisant quelques pages de Claude Roy (Les rencontres des jours 1992-1993), un peu de Maritain (Le paysan de la Garonne), trois dates du journal de Camus (Renaud), Septembre absolu, et quelques lettres de la correspondance de L. Bloy avec Henri de Groux. Quand je termine, au retour de R., je n’ai plus envie, vu la météo, d'aller faire un tour. Je sors prudemment dans le jardin, rentre rapidement, mets de la musique. Vent, pluie, nuages, en quantité suffisante pour décourager la promenade. Je n’aime pas la panique en terrasse, le moment où il se met à pleuvoir et tout le monde panique et se replie à l’intérieur. Le weekend s'annonce mauvais pour la visite du front de mer à Hendaye ou Fontarabie. Pour aujourd’hui, la pluie est annoncée sous forme d’averses mais elle ne semble pas pressée. R. accomplit de petites tâches, toujours remises à plus tard de mon côté. Je lis rapidement la presse française. Polémique à propos de la proposition de Bayrou de faire sauter deux jours fériés. En effet, le jour férié n’est qu’une réminiscence chrétienne et il est plus que normal de faire disparaître tout ce qui est chrétien, parce que ça suffit, l'hypocrisie qui consiste à bouffer du curé mais à profiter des jours fériés. Hop, disparus, l'Ascension, l'Assomption, le lundi de Pâques, le bordel du lundi de Pentecôte et la Toussaint, que personne ne distingue. Ça aurait aussi l'avantage de diminuer les ponts du mois de mai et juin. Aujourd'hui l'école et la vie en général s'arrêtent à Pâques pour reprendre en septembre. C'est la course contre la montre pour réussir à boucler les programmes ou les projets avant que tout le monde ne s'éparpille pour solder ses congés, en mai, puis prendre ses vacances, l’été. On garderait Noël, intouchable grande fête du consumérisme, et on ajouterait une fête juive et une fête musulmane, à choisir avec les personnes concernées. Moins cinq plus deux : trois jours en moins. Et certains prétendent encore que le travail est une valeur de gauche. C'était vrai quand l'oisiveté était une marque de l'aristocratie. Aujourd'hui, la valeur de gauche, c'est le temps libre. Avec l'IA, ça va devenir atteignable. Reste à savoir ce que feront les gens de leur temps libre. Le futur va être intéressant. Par ailleurs, et pour continuer dans le « travail », ou dans sa fin définitive, j'ai découvert par hasard qu'au Danemark, l'âge de départ à la retraite est revu tous les cinq ans depuis 2006 et indexé sur la durée de vie. Il vient de passer à 70 ans pour les personnes nées après 1970. Rien à faire, mon beau-frère, né en 1952 et qui n’est pas danois, donne l’exemple, par pur « âgisme » militant, et repousse sa retraite à 72 ans plus tard. Ça me donne une envie de rire méphistophélique.



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La caste politique actuellement au pouvoir a du mal à comprendre qu’étiqueter ses opposants avec des qualificatifs aussi infâmants que nazis, fascistes, racistes, extrémistes, complotistes, pro-Poutine, et j’en passe, fonctionne de moins en moins bien : petit-à-petit, les gens maltraités, insultés par leurs dirigeants, finissent par ne plus porter attention à ces stigmatisations qui ne marchent que par ostracisation notamment dans les médias traditionnels, qui, bien malheureusement pour la caste dirigeante, perdent régulièrement leur pouvoir au profit d’internet et notamment des réseaux sociaux.

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Je n’écrirai pas que ce président du gouvernement est le président de mes rêves, il me suffit de constater jour après jour qu’il est le non-président d’une croissante majorité dans la poisse. Je le croyais dans un tourment extrême à cause de la fétidité de son entourage le plus proche, mêlée aux relents des figures politiques qu’il a promues au rang de pairs de la table ronde du socialisme prédateur, qu’il lui manque des dizaines de milliards pour tenir ses promesses les moins loufoques, qu’après avoir promis une ou deux lunes, son millier de conseillers travaillant dans l’ombre l’avertissent qu’il ne faut pas espérer de miracle, enfin qu’il a des ennuis. Mais il déclare à des journalistes triés sur le volet qu’il adore mettre dans la confidence, qu’il se trouve personnellement frais comme un pinson et que son ressenti par rapport à ce qui lui arrive n’est que la plus ferme disposition à combattre le fascisme sur tous les fronts : Adolf et Benito n’ont qu’à bien se tenir ! L’annonce presque quotidienne, par des personnalités de tout bord, de sa chute imminente m’ennuie.
Car c’est ignorer, ou oublier, que derrière ce sinistre clown, squattant le pouvoir sans gouverner en compagnie du ramassis d’incompétents qu’il s’est choisi comme ministres, se trouve toute la machine oligarchique mondialiste : des marionnettistes qui ne le lâcheront pas tant qu’il n’y aura pas de remplaçant capable de poursuivre leur projet. Et de ce côté-là, c’est la médiocrité absolue, même en comptant sur l’incroyable indulgence du contribuable espagnol actuel. À chaque étape de son sinistre itinéraire, il a avoué se voir en forme, plus fort que jamais. Avec l’extraordinaire assurance du patineur inconscient du craquement du gel sous ses souliers, il avise qu’il a l’intention de se présenter pour un troisième mandat, au risque d’être élu. Force est de constater que nous vivons une période charnière entre un monde ancien, hérité des certitudes démocratiques de l’après-guerre et une chimérique société ouverte dans laquelle on tente de nous faire accepter à grand renfort de propagande et de duperies les pires absurdités. Nous en sommes au point où le pouvoir ne prend presque plus la peine de se dissimiler derrière une pseudo-bienveillance envers la population : il n’y a qu’à voir le ridicule des campagnes de communication et l'arrogance désinvolte d’un individu de cette audace à son poste. Qui ne se maintient point en se renforçant, mais en acceptant le chantage quotidien de ceux qui gouvernent à sa place et, le cas échéant, en réprimant les voix les moins cyniques de son propre parti. Les actions de ses ministres sont certes chaotiques, ruineuses et inefficaces mais radicales dans leur chemin de non-retour quand, par malheur, elles s’appliquent. Cette méthode, bien qu'efficace à court terme, entraîne tout le monde vers le précipice. Difficile d’imaginer comment contrôler efficacement des élites supranationales déconnectées des réalités et aveuglées par leur projet dément, comment stopper leurs nuisibles laquais corrompus, confits dans leurs privilèges ou, encore, comment réveiller, ouvrir les yeux d’une population divisée, sans repères, trop occupée à survivre regardant ces dangers de loin. 

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L'impunité honteuse des crimes sionistes et le silence complice d'une grande partie de la société me révulse sans appel.

mardi 22 juillet 2025

Comment se débarrasser des vautours (politiques) en essaim

 Benjamin Lemoine

                                                                                                                   Antonio Elorza



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La maladie politique qui nous étouffe, la main tendue de ceux de qui on détesterait être proche, la sympathie de certains vis-à-vis desquels on sent surtout l’envie de rester aussi loin que possible, les journées de guerre partout, l’angoisse sourde qu’on ressent par le génocide en Palestine, le pédantisme et le charabia « idéologiques » où que l’on mette les pieds, tout cela éclipse durablement les petits plaisirs quotidiens de somnoler dans l’oisiveté, d’apprendre (beaucoup), de parler (de moins en moins) et d’écrire (un tout petit peu), de rêver de voyages comme Larbaud, en pratiquant les langues des pays séjournés et en n’étant pas seulement amoureux à Alicante d’une charmante Ella mais aussi des sonnets de Malherbe, des sentences de N. Gómez-Dávila ou des labyrinthes de la vieille ville d’Oran.

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Les deux corps du roiIl semblerait qu’il circule une singulière version élaborée par l’une des formations politiques qui font tenir debout la coalition au gouvernement selon laquelle P. S., sur le plan personnel, serait une pure crapule, sans besoin d’une longue enquête pour le prouver, mais sur le plan professionnel on aurait affaire à un combinard étonnant et, surtout, que le critiquer enchanterait la droite et l’extrême droite « espagnoles » et pourrait précipiter sa chute avec la convocation d’élections anticipées. Elle préfère, constamment préoccupée par ses propres besoins et intérêts, tenir pour négligeables les déshonorants reniements à répétition de ce même P. S., menteur compulsif, considérant surtout son aversion présente au rituel électoral, pas très favorable ni à sa personne ni à ses prétendues qualités. Elle lui assure, donc, son soutien inconditionnel, « produit des circonstances », comme elle-même l’affirme sans sourciller.

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Fidèles à leur habitude, quelques raclures de bidet flanquées par pas mal d’ovnis et de plusieurs revenants, s’alarment dans leur habituel pathos rhétorique visant à affirmer en disqualifiant, que des leaders de la droite et de l’extrême droite, de l’église, des conservateurs, des gangs violents de mangeurs d’enfants à Noël et au nouvel An et des philatélistes radicalisés conspirent contre le « gouvernement légitime » (n’est-ce pas !) en vue de le renverser. On chercherait en vain dans la prose de ce manifeste aussi provocant qu’inepte un indice quelconque de connaissance sérieuse de la réalité sociale espagnole depuis des années. On y décèle sans peine, en revanche, la confirmation de l’état de dégénérescence idéologique avancée atteint par des gens qui se sont toujours fait forts de « former l’opinion » ou de « représenter le peuple ». Enfermé dans sa solitude, Big Boss (el Puto Amo) réfléchit, apocalyptique et agonique, à son habitude, à la meilleure manière d’échapper au traquenard ourdi par les méchants, tendu par les forces obscures. Il semble n’avoir pu, malgré son désir d’y arriver, accéder au statut de grand leader incontesté et universellement aimé, devant se contenter du soutien inconditionnel de quelques fantoches crépusculaires qui ne provoquent que le dégoût et le mépris et se sont condamnés par l’arrogance de leur geste purement rituel à l’impuissance et à l’indécence. Ils croient combattre toujours pour la gauche et le progrès au moment même où ils incarnent parfaitement le dédain de l’autocrate tout en l’entretenant.

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Le champ lexical des stars médiatiques du sanchisme pour éventer la bonne nouvelle par le biais du commando de « l’opinion synchronisée » est émaillé de mots et d’expressions tels que : « parti exemplaire », « transparence », « sabotage », « fange », « fausses nouvelles », « réponse immédiate à », « tolérance zéro », « complot », « féminisme », « homophobie », « mémoire », « mémoire historique », « mémoire démocratique », « devoir de mémoire », « gouvernement de progrès », « légitime », « droite déjà extrême », « extrême droite », « fachosphère », « nazis », etc. Ce vocabulaire n'est pas chiche de grandiloquente dissimulation, et ces quelques formules déposent autour du néant centripète dont ils partent des éléments cardinaux qui délimitent un champ de signes se resserrant sur ce qu'il est possible de penser et de ressentir en pareille circonstance. Aucune liberté, zéro débat : il convient et il suffit de déposer sa lourde croix verbale dans les sarcophages prévus à cet effet. C'est un questionnaire à choix unique que la meute analphabète brûlée de lumière artificielle remplit consciencieusement, fidèle jusqu'au bout à ce qu'elle aura été jusqu’à la fin, un troupeau de laborieux adorateurs du faux et des célébrants serviles du vide, de grossiers personnages qui se sont fait une place à la seule cène qu'ils connaissent, la scène médiatique servile et bien rémunérée. Je n'imagine pas, de manière efficace, une formule pour décrire, pour formuler l'insignifiance de ce monde de pourris. Chacun des mots serait à arracher au sérieux du dictionnaire lui insuffler une dose de sublime ridicule, mais ce serait vouloir rendre un semblant d’existence à ceux qui ne le méritent pas. Ils ne font qu’occuper une scène. Les admirations et les stars d'une époque en disent long sur elle. La mémoire « démocratique », est partout particulièrement convoquée, fût-ce à titre privé, peut-être parce qu'elle a, avec la culture et « les discriminations », ce que les professionnels du wokisme ont toujours convoité durant toute leur existence avec un entêtement admirable : le flou conceptuel absolu. Qui permet de saper fermement ce qu'ils détestent ou d’encenser durablement leurs lubies. Et pour cela, il n'est nul besoin d'être « cultivé, subversif ou révolté », comme l'affirment les crétins qui bavent d'admiration quand ils s'alignent sur les positions (prétendument) progressistes des leurs politiciens professionnels préférés. C'est tout le contraire, bien entendu : il faut être servile, illettré et tenu par le conformisme le plus poisseux, c'est-à-dire, depuis les années 70, un anticonformisme théâtrale, spectaculaire, bien rodé qui n'impressionne que les naïfs et les nigauds. Un ersatz de féminisme. Une volonté farouche de s'attirer les sympathies du « camp progressiste » sous le trompe-l’œil de l’anticonformisme (absolument conforme) et les bénédictions d’une gauche mal nommée qui n’est en réalité qu’une une droite déguisée, sensible jusqu'à la sensiblerie. Prétendant jusqu'à l’exténuation à se voir « rebelle » alors qu'elle a été le plus efficace promoteur de l'idéologie impériale anglo-américaine qui s'est diffusée après 1968 sans aucune véritable objection. Mais elle a perdu en partie son influence sur l’information générale et sur l’actualité : on est maintenant plus vite informé des événements par les réseaux sociaux que par les médias professionnels. Ceci dit, les professionnels de l’imposture ne se lasseront jamais d’exposer leurs âneries, les malfaiteurs leurs crimes, et les affreux leurs horreurs, mais au moins, on est plus largement édifié sur leurs agissements.

 

jeudi 17 juillet 2025

Jours de juillet, jours moroses


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« Les gens sont portés à justifier les affronts dont ils ne se vengent pas », Guy Debord, In girum imus nocte et consumimur igni.

 


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L’installation d’Abu Mohammad al-Jolani, à la tête de la Syrie visait à provoquer l’autodestruction de ce pays. Elle est déjà en marche. Une fois que les Alaouites, les chrétiens et les Druzes auront été complètement massacrés, sauf ceux qui auront pu prendre le chemin de l’exil avant, l’entité sioniste sera tranquille sur sa frontière est et pourra conserver le Golan sans rencontrer d’obstacles majeurs. Une guerre civile chaotique longue durée, rien de tel pour servir les intérêts sionistes et anglo-américains au Proche-Orient. À la suite des nouveaux massacres, « Israël », qui occupe depuis 1967 la partie du Golan syrien, annexée depuis 1981, invoque la protection des Druzes pour justifier ses frappes à Damas et au sud du pays. « Israël » siegt an allen fronten.


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Lire. Fusionnés dans le mutisme, les lecteurs solitaires acceptent de partager des événements imaginaires avec les auteurs qu’ils aiment, qu’ils peuvent lire, consulter, voire, éventuellement, contacter, sans forcément partager leur manière de penser ni leur genre de vie. Ces événements imaginaires constituent le genre d’événements qui font du bien à la solitude et à la pensée. On sait qu’ils existent pour nous. Ce qu'il faut, c'est pouvoir y participer mentalement sinon physiquement, ou couper avec l’histoire quand on le désire. Ce qu'il faut, c'est le retrait paisible, la retraite choisie sans impositions. Tout le contraire de ce que l’actualité exige dans un contrat que nous n'avons jamais signé. La vieille urbanité permettait la solitude et la compagnie, l'incivilité actuelle impose à la fois la promiscuité étouffante et l'isolement impuissant.


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Écrire pour le plaisir du divers, en faisant une sorte de bilan de presque tout ce qui se passe « au dehors » avec les surprises que cela comporte et pour lesquelles on n’est pas préparé. On est normalement à la merci d’énigmes impossibles. Avec des reprises (y compris d’images ou de photos) et des développements qui ne signifient jamais une fin, une cause, une utilité, mais bien au contraire un horizon lointain, entrevu, jamais out très rarement atteint. Beaucoup d’amertume, de désillusions fruits de la vieillesse mais sans se refuser l’ironie, le traitement du grotesque par le burlesque ou, tout simplement, l’éloge de la vie : « C’est une absolue perfection, et comme divine, de sçavoyr jouyr loiallement de son estre » (Montaigne, Essais, III, 13).

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Écouter. Vagabondage indolent d’une musique à l’autre, d’une chanson à l’autre, lâchées au hasard comme des oiseaux. Par caprice absolu, comme si c’était de la poésie. Ou de la peinture. Instants de bonheur passagers et répétés par la recherche simple de l’émotion livrée d’emblée, de l’impression primaire de plaisir, appréhendée rapidement. Ma tête, sans repos, passe de l’hommage vibrant à l’Iran de la composition Iran Iran, de l’émouvant Mohammad Noori à L’Orphée et Eurydice de Gluck, de Canciones y madrigales de Francisco Guerrero, à Jordi Savall / Hespérion, Lacrimae Caravaggio  … Grâce à ces « distractions » la monotonie estivale devient seule source de vie, de réalité et, presque, de vérité : étrange assortiment d’existentialisme biscornu mâtiné de doute méthodique dans lequel se confirme ma conviction que l’âge marque la fatigue des certitudes et le déclin des absolus. Et je rends hommage au dur labeur de C. Foulon, La ópera en disco de Mozart a Britten, qu’il compte éditer prochainement. Rien que les trois dernières lignes de l’introduction mériteraient le déplacement, je veux dire, l’achat et la lecture de cette étude de plus de sept cents entrées.



lundi 14 juillet 2025

Cuisine actuelle : tout savoir sur le maquereau

Lectures d'été pour l'édification des plus jeunes et des vieux oublieux


Un troussage de domestique (aïe, encore un socialiste qui joue le rôle de méchant !)


Le vrai roman de Dominique Strauss-Kahn (le meme que ci-dessus mais en calibre)



Du couvent au bordel: Mots du joli monde (frise explicative de pas mal de choses)

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Ça n'arrive qu'à l'étranger ! Que le journal de référence que El País est censé être – « de révérence » à l’égard du gouvernement sanchiste, en fait – se fasse le relais de mensonges et de contrevérités destinés à dissimuler ou travestir une réalité de plus en gênante aussi bien pour la mouvance sanchiste que pour ses associés n’a en réalité de quoi surprendre. La présentation unilatérale, pour ne pas dire caricaturale, qui est faite des cas de corruption et des magouilles de la vermine au pouvoir offre un bon exemple de manichéisme primaire auquel cède depuis des années le complexe médiatico-politico-intellectuel de notre pays pour embrigader une opinion publique qu’il formate plutôt qu’il ne la forme. Exemple visible de ce que peut être produit et reproduit, en compagnie d’autres média stream du même acabit, comme récits alternatifs de la réalité, réécrits en phase avec la version la plus favorable aux intérêts des autorités officielles, afin de relativiser l’importance des événements sordides et criminels qui sillonnent la trajectoire chaotique de plusieurs ministres et dirigeants « socialistes » et qui hantent le quotidien du pauvre contribuable, ponctionné sans pitié, abandonné à son sort. Les conditions de vie, les besoins et les aspirations des classes populaires, auxquels le fatras présidentiel plein d’idées pures ne peut que demeurer étranger, comptent pour du beurre. Falsifier les faits ou nier l’implication des fautifs en plus de celle, avérée, de leurs complices nécessaires a pour objectif la perpétuation de la bande depuis son accession au pouvoir. Les récentes égratignures de carrosserie de l’image du Big Boss, pataugeant dans un vaste et sordide univers prostibulaire connu depuis longtemps, entament considérablement sa réputation auprès d’un électorat féminin incessamment caressé dans le sens du poil, envers et contre tout. Ignorant les implications politico-idéologiques des activités de sa belle famille dont il a largement été bénéficiaire, le président n’a pas hésité une seconde pour proclamer haut et fort sa répugnance pour celles des deux derniers secrétaires d’organisation de son parti, par lui nommés et de sa confiance la plus totale, faisant semblant de vouloir s’attaquer de face au problème la prostitution. Et de prendre de façon urgente et définitive des mesures, avec des amendes et tout. De sorte que, à force de cynisme et de tartuferie, mettre sur le tapis, dans le débat public qui agite le microcosme politique, ce qui restait un point aveugle ou une question tabou pour l’opposition, revient à parler de corde dans la maison du pendu. Les vitupérations franchement délirantes, frisant souvent l’hystérie, dont ont fait l’objet les allusions du chef du parti populaire (PP) à ce sujet sont la meilleure marque de l’allergie viscérale à tout ce qui peut mettre en cause la haute opinion qu’ont d’eux-mêmes les adeptes autoproclamés « progressistes » de la secte, toujours à la traine du président, qui jugent sacrilège toute contestation de leur monopole de l’honnêteté, voire de la décence, institué en Table de la Loi. Tout ce qui porte atteinte à l'image de leur Narcisse est faux et archi-faux. Point barre. Commençons par écarter les faits et la discussion sera définitivement tranchée. 

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Bienheureux les silencieux. Blogueur laborieusement insignifiant, je sais pourtant que j’ai de vrais lecteurs qui, eux, préfèrent se taire et ne pas faire confiance aux mots. Ils savent sans doute combien il est difficile de trouver le ton juste, les mots à la fois singuliers et pertinents qui pourraient sinon apporter quelque chose au jeu de sortie du labyrinthe quotidien, du moins y répondre autrement que par des réflexions rapides, des hors-sujet navrants ou des blagues consternantes dans chaque case du chemin parcouru. La « facilité » du blog autorise à raconter n’importe quoi sans avoir à le prouver par « une analyse concrète d’une situation concrète » comme l’intimait ce penseur et leader rétrograde de Lénine. Tout n’étant qu’affaire de « discours », comme le croyait ce philosophe à la con de Laclau, il suffira toujours de substituer un mot à un autre et l'affaire sera dans le sac …

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jeudi 3 juillet 2025

La fabrication du consentement : gare aux loutons !

 

Les loutons, des loups déguisés en moutons. Incapables d’un cri de dignité, d’une protestation, d'une réaction courageuse, les médias d'obéissance sanchiste (La Sexta, El Plural, El Pais, RTVE, Cadena SER, et un long etcétera), aussi bien ceux du service public, financés par le contribuable, que les privés favorables au gouvernement, refusent de manière opiniâtre et dévouée toute amorce de vraie critique ou autocritique face à la corruption galopante du chef de l'exécutif, afin de préserver sa légitimité (notion qui l'obsède), fragilisée par les cas, plus inadmissibles les uns que les autres, qui jalonnent le chemin de putréfaction de cet individu à vocation de chef éternel, mais pratiquement inopérant depuis le premier jour de son incrustation au pouvoir. Chaque info qu'ils lancent, savamment décortiquée, suit un parti pris dans l’utilisation des procédés indispensables à l’enregistrement du réel en tant que matière première (collecte, filtrage et sélection des sources, « mise en boîte » des faits, synchronisation des argumentaires), une stratégie commerciale extrêmement peaufinée dans la diffusion des résultats (contrats mirobolants passés avec des stars médiatiques ou des célébrités du monde du divertissement, meilleures heures d’audience, distribution gratuite de journaux aux gens dans les lieux de passage, abonnements gracieux) et une soumission à part entière aux intérêts de la coalition de gouvernement dans l’interprétation des données traitées (victimisation systématique, malgré la position dominante des auto-désignées « victimes », en réalité des gens et des institutions qui ont le bras long, prêts à la répression de la moindre dissidence, experts en abus de pouvoir ; réquisitoires sans appel ; violence sournoise contre des catégories chosifiées, galvaudées et, en fin de compte, discréditées partout depuis longtemps, comme peuvent l'être l’idéologie de droite et d’extrême droite et leur masse électorale en vrac, en tant que dangers imminents pour le genre humain en général et notre avenir de plus en plus progressiste en particulier) permettant aux « journalistes » et aux créateurs d’opinion de venir expliquer à un large public résigné, avec décontraction et sur de bonnes doses de cynisme, les dessous de chaque affaire, étouffée à l’instant même où elle est présentée à l’opinion, si susceptible de mettre en difficulté le pouvoir sanchiste ou dûment cuisinée, si capable d’embarrasser l’opposition. 

En le faisant, sous la commande et la manipulation des maîtres au pouvoir, ils prétendent à des titres d’objectivité au-dessus de tout soupçon, alors que de ce point de vue, leur travail s’apparente pleinement à celui des propagandistes sinon des thuriféraires. Pourrait-il en être autrement dans un monde où des politiques professionnels s’arrogent le droit de tromper sciemment le public, y compris celui de leur bord, afin de durer longtemps au pouvoir et de ménager les puissants qui garantissent leur accès à la soupe (aux cochons) ? C’est pour cette raison incontournable qu’il est impossible de distinguer entre les simples récits ou exposés de la réalité et le regard intéressé des décideurs, fabriqué et formaté à des fins politiciennes. Il faudrait un effort surhumain pour ne pas perdre pied sur le terrain miné par ces faux-vrais informateurs, propagateurs d’illusions engendrées par les oligarchies qui les financent. Il n’est donc pas étonnant que le cinéma de fiction soit souvent plus intéressant, plus porteur, plus évocateur dans la représentation de la réalité sociale que les productions (documentaires, reportages, interviews, dossiers, etc.) des médias les plus réputés, ne reposant sur aucune enquête sociologique contrastée, sérieuse, fiable ou tout simplement honnête. Ils sont tous techniquement très efficaces mais sans véritable méthode analytique indépendante digne de respect. D’où la question du public de savoir où se cacherait le Luis García-Berlanga d’aujourd’hui, ou quelqu’un de toujours vivant, genre Santiago Segura, capable de remmettre en activité le commissaire J. L. Torrente.




mardi 1 juillet 2025

(Im)Puissances de la routine


Les queues de dragon de l’anxiété. Mes deux craintes principales, à l’aller ou au retour, de chaque longue journée de voiture pour rejoindre la maison à Irun ou quitter l’appartement d’Alicante : la première est celle d’un orage si je vois des nuages noirs au lever du jour au moment du départ, des coups de vent violent, de la grêle, du brouillard, etc. La seconde, liée aussi à des orages ou à du mauvais temps, des dégâts qui pourraient endommager notre habitation. Je redoute surtout la grêle car le souvenir d’un moment d’angoisse, en compagnie d’une collègue de la fac refugiée dans ma voiture sous l’auvent de fortune d’une station d’essence, pendant que des boules de grêle cabossaient sérieusement les carrosseries sans protection, est toujours trop fort. J’ai également d’autres craintes que je n’énumère pas. Je me demande à chaque fois qu’en sera-t-il à notre retour. Si ce n’était pas la voiture, ou l’état de la maison, ce serait l’ordinateur, et j’en passe. Jamais je ne voyage décontracté même si en apparence je garde le calme.

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On n’y échappe pas. Quelqu’un qui réunit la triple condition d’ancien élève, d'ami et de lecteur habituel, me conseille d’envoyer promener la politique. Aristote affirmait que celui qui échappe à la vie sociale est une bête ou un dieu, un ermite ou un solitaire, se suffisant pleinement à lui-même et sans nul besoin des autres. Or, la vie de la polis en interaction et coexistence implique pas mal de choses. Actif, la fonction que j’ai exercée m’a fortement implanté dans la vie sociale et, sans vocation aucune, mission ni désir de suivre les voies de la politique professionnelle, pleinement conscient de ne pas avoir été appelé, par ma sagesse, à gouverner la cité, ambition plutôt platonique, je n’ai jamais eu l’impression d’être une bête ni prétendu au titre de démiurge sous l’auréole d’une activité surnaturelle : la « vie de l’esprit ». Dix ans après mon départ à la retraite, je me contente de vivre dans la contemplation une vie qui n’est pas purement contemplative, restant donc un homme, un membre vivant de la société, mais simple rouage de sa grande mécanique. Cela étant, je ne vois pas le moyen de me prémunir contre les appels de sirène de l'information qui nous submerge de partout, qui nous tombe dessus, « en spirale et non en ligne droite, par saccades, par catastrophes, par révolutions » comme les ondes de la dialectique déferlaient sur la tête de Lénine. En d’autres termes, impossible par là, de s’isoler des inévitables torrents de nouvelles qui nous inondent à chaque instant. Pour réussir cette entreprise, il faudrait savoir construire en nous-mêmes des châteaux forts, remonter complètement les pont-levis et en arriver à un hermétisme total. Il faudrait jeter par la fenêtre télé, portables et ordinateurs pour que le réel, ce piège invisible, ne passe plus avec ses bruits séducteurs et ses images tentatrices. Créer de la distance, si efficacement abolie par la vitesse en expansion et par l'idéologie faussement progressiste de la technologie imparable. Assommés par le monde qui déferle sur nos pauvres cerveaux, nos capacités de tri, de réflexion et de réponse rétrécissent jusqu’à disparaître. Le pire étant que chacun, euphorique, se croit le seul vrai et authentique relais, indispensable, bien éclairé, indemne d’ignorance, celui que les autres devraient écouter sous peine de mourir idiots. Plus jeune, le vaccin à deux doses contre la subordination calculée à une vision du monde pour améliorer « les choses » et contre l’optimisme béat et angélique de la « foi sociale » m’a facilité, je l’espère, une certaine immunité. Après avoir compris dans quelles illusions je risquais de me laisser entraîner sans remède.
Plus j’avais des choix : engagement politique valorisant, carrière dans l’administration, que sais-je encore, plus les possibilités paraissaient grandes, plus le droit chemin se révélait difficile, long, laborieux, incertain et arbitraire : hors de portée finalement, alors que c'était juste le contraire qui semblait garanti au départ. Déjà, une frontière devait été franchie presque sans s’en rendre compte : celle de la soumission, souvent aveugle, non pas à plus fort mais à plus con que soi. Pourtant, je ne suis pas le moins du monde réfractaire à l’autorité. Loin de moi la tentation de la nier ou de négliger son importance, mais je sais qu'au-delà d'une certaine hiérarchie, d'une certaine organisation pyramidale, les choses s’organisent toutes seules sans bruit tout en gardant leur cadre théorique, et vivre sous l’autorité d’autrui, souvent visiblement incapable, sans possibilité d’opposition, en renonçant à soi-même, dépasse, pour moi, les limites. Avec le risque de s’y habituer, une fois qu’on en a dépassé certaines. C'est toujours a posteriori qu'on se rend compte de l'escroquerie. C'est pourquoi les débuts sont toujours enthousiasmants, comme les révolutions, mais mènent invariablement au désastre.

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Mon très bel aujourd’hui. Il m'arrive de me fixer un objectif de lecture, mais il ne reste mon objectif que durant un quart d'heure, jusqu'à ce qu'un autre, plus séduisant, passe à portée de pensée. J'en rêve, en effet, d'avoir un objectif solide, un projet, comme disent les gens vraiment sérieux, de savoir où je vais, de ne pas dévier, de ne pas quitter le chemin, l'idée et l’itinéraire qui l'accompagne pour aboutir à un essai, un article, un livre, quelque chose de costaud. Une utopie, mais pas plus, et de moins en moins. Ma vie « retraitée » fuit par ces objectifs, ces trous, ces fenêtres, ces soucis incessants qui me renvoient d'une information à l'autre, d'une image à l'autre, d'un livre à l’autre jusqu'à en perdre la tête et le sens, c'est-à-dire le but que j’avais choisi et la concentration nécessaire pour y arriver. De plus en plus, je lis trois ou quatre livres à la fois, en parallèle. Signe tangible de l'égarement. Le savoir, à la fois verbe et substantif, m’échappe à grands pas. Je me console en imaginant que ces projets loufoques répétés me laissent quand même quelque chose de merveilleux que je ne pourrais même pas nommer. Impuissant, je finis, à coup sûr, toujours par capituler. Sachant l'obstacle trop haut, je choisis de le contourner ou de l'ignorer. J’écris « à coup sûr » puisque j’ai perdu la capacité de résister à mes fantaisies et je sais que tout recommencera le lendemain …

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jeudi 26 juin 2025

Après la guerre des douze jours



Bilan depuis des années de " conflit "



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Tôt chaque matin, j'ouvre grand les fenêtres de mon bureau à l'étage supérieur. Au nord, Hendaye sous la brume matinale, à trois kilomètres à peu près. Au sud, le bruit lointain de l'autoroute, atténué par le muret de la petite forêt sauvage, en expansion, qui se développe dans la zone de Txenperenea. Calme et quiétude absolus. Des chiens aboient plus loin. Tandis que nous petit-déjeunons dans la cuisine, j’observe les habituels passants matinaux du couloir piéton juste en face, des gens seuls, venus d'un peu partout dans le quartier, traînant leurs inévitables chiens, certains habillés de façon négligée, peut-être pas réveillés. Ils passent avec leur baguette et leur tristesse. Dans le ciel, des nuages rapides après les orages de ces jours-ci. La journée va être encore très chaude. Ému par une photo de gogueule correspondant à la date d'aujourd'hui, je me souviens avec délice, quelques instants, du balnéaire d'Olmedo, bâtiment moitié à l’ombre moitié au soleil, des odeurs de blé frais, rêches et douces à la fois, et du bruit des cigognes, en claquant du bec.

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Pour aboutir à une transformation profonde du système en vigueur, le Parti Sanchiste de l'Opportunisme Épileptique (PSOE), mis en place depuis des années à côté du système classique des partis, occupe à l'heure actuelle toutes les institutions et la pratique totalité de l'espace public, sans se faire du souci à propos des échéances électorales, dans la perspective non seulement d'un changement de régime mais aussi du système social. Vaste programme. Il avait déjà ses propres modalités de production de politique loin des contraintes institutionnelles. Le professeur A. Elorza a écrit, très justement à mon avis, que nous ne sommes pas en présence d'un cas de figure fréquent dans les démocraties occidentales : le pouvoir finit gangrené par la corruption. Non. Dans le cas présent, une organisation déjà corrompue incapable de gagner une élection développe une coalition gouvernementale, difficile par les objectifs propres à chaque parti membre, sans véritable projet politique autre que celui de faire de sa perpétuation au pouvoir son but ultime, et finit dans l'impasse sans pouvoir réellement gouverner que par décret-loi. Les charlatans diplômés de la caste universitaire, les réalisateurs branchés, les bobos bien-pensants et tous les bataillons du wokisme progressiste arrivent à peine à couvrir de leurs chants enflammés d'enthousiasme médiatique les couacs à répétition, les braiements des politiciens et des ministres qui n'ont que peu d'impact sur la plupart des gens, encore moins sur ceux qui, "la droite" au gouvernement, auraient allumé quotidiennement les feux dans les rues. Dans cette ambiance irrespirable, sur toutes choses, même les plus naturelles, même les plus innocentes, pèse un soupçon affreux de corruption, de bêtise, de perversion, de brigandage de grand chemin, qui me rend méfiant même quand il s'agit d'aller vider les poubelles ou faire des courses. Je vais régulièrement les faire au supermarché BM Alarde qui se trouve en bas de Lapice Kalea, et trois fois sur quatre, je m'aperçois que les prix ont flambé, mais il ne faut rien dire, tout le monde a l'air d'accepter ça de bon cœur, d'ailleurs quand la caissière demande aux clients s'ils veulent leur ticket de caisse, ils répondent d'un ton grand-seigneur que non, bien sûr que non, pour quoi faire ? Le client du BM et le Basque ordinaire sont les mêmes : ils ne voient pas où est le problème. D'ailleurs, s'ils pouvaient faire pareil, ils ne s'en priveraient sans doute pas. La corruption est quelque chose qui se décline à tous les échelons de la vie sociale, professionnelle et surtout politique. La corruption, à tous les sens de ce mot, fait partie de notre culture, ou est-ce l'inverse … Quand la "common decency" s'éclipse, tout devient possible, tout devient acceptable, même s'il est parfois difficile de distinguer entre fanatisme et brutalité sauvage, entre mensonge délibéré et imbécillité congénitale. D'où cette odeur de putréfaction qui se répand et gagne même l'intérieur de chaque appartement. Des problèmes mineurs comme ceux de l'éducation, de la santé, des transports, de la culture attendent des solutions urgentes au profit des classes populaires, mais nos "dirigeants" y pensent chaque jour. Nous pouvons dormir sur nos deux oreilles ...

Traduction du texte en image : Cette volet de notre histoire récente est peut-être le plus mal connu et aussi le seul nous permettant de comprendre comment deux personnalités sans relief et sans expérience, J. L. Rodríguez Zapatero et Pedro Sánchez, en arrivent à la tête du parti socialiste et comment la corruption, sous des formes parfois coïncidentes, d’autres différentes de celle propre au Parti Populaire, a accompagné le socialisme depuis sa vertigineuse croissance initiale. Et, ce qui n'est pas moins grave, elle a eu un impact sur la sélection de ses dirigeants. En peu de mots, très faible à la mort de Franco, le PSOE était un parti de clientèle très large, admettant des professionnels et des personnalités d’une valeur indéniable (les Borrell, Solchaga, Jordi Sevilla), et de vrais voyous par la même occasion, les Roldan, etc. prêts à se servir du pouvoir fraichement acquis pour en tirer un profit maximal et à grande échelle. Poussant des métastases dans le parti lui-même : Filesa.