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vendredi 16 juin 2023

Le semeur à sa charrue tient les roues du destin

 

Le semeur à sa charrue tient les roues du destin

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Je regarde de vieilles photos d’il y a un demi-siècle. L’amour rend l’homme semblable à un fou capable de détruire sur son passage tout ce qui pourrait briser son désir. Il n’a pas le temps de reprendre son souffle. C’était presque hier. Je me dis que la vie avance trop vite. Je n’en distingue plus les pauses, les étapes. Ou alors, en fin de parcours, je prends pour de la vitesse extrême ce qui n’est que lenteur et répétition. Chaque soir, je ferme la maison et les volets comme on referme un palais secret et sans visites. J’attends des lendemains peu chantants... Quelques semaines avant les prochaines élections, la bêtise et la méchanceté sont colossales, dures comme l’obsidienne. Ce sont les seules choses sur lesquelles nous pouvons compter. Comment éviter le désespoir ? Ils mentent. Ils savent d’instinct qu’ils ont déjà perdu la bataille de la gestion des affaires publiques et ils deviennent plus méchants, plus ignobles, plus frustes que jamais à l’idée d’abandonner le pouvoir. Le présent, ils l’ont rendu abject et ils veulent gagner le passé. Si lourd pour eux, pourtant. Ils ont une obsession pour la mémoire « démocratique » avant de s’effacer de la scène, comme ceux qui s’aperçoivent, gênés, qu’ils sont nus en pleine rue. Ce n’est pas facile à accepter mais c’est inéluctable. La vie « normale » s’est retirée de partout, c’est patent. Mêmes les bêtes l’ont compris. Elles font face aux artifices butés du camp « animaliste » avec une dignité simple et rude qui force le respect. Je manque de courage pour me précipiter où que ce soit dans le marécage de la politique, pour échapper à ma solitude, trop accomplie pour susciter l’intérêt et le respect. On croit qu’on est à la recherche d’un gouvernant honnête, on va le chercher partout, on revient à chaque fois les mains vides, et l’on se rend compte alors que ce n’était pas de politiciens qu’on avait besoin, mais des idées.
Et, de proche en proche, c’est toute la campagne qui est convertie en spectacle clownesque, dont les idées ont été perdues, effacées, toujours de vieilles idées « de la vieille racaille des années trente, de retour », comme écrivait Murray Bookchin, échangées contre n’importe quoi, ou de très anciennes qui sont revenues alors qu’on les avait oubliées. Entre les mots et les idées, un étrange ballet s’installe, qui bientôt nous rend incapables de les distinguer, en attendant que de cette confusion au rythme fou surgisse, enfin, la solution tant attendue. Les discoureurs sont des amis fourbes parce qu’ils mentent, mais on en a tellement besoin pour se donner l’impression qu’on colmate la brèche de l’existence ! La seule possibilité réelle serait de tout miser sur la chance et l’impondérable. Vouloir de la propreté en politique mérite des coups de balai sur la tête et j’ai l’air d’en réclamer pour avoir écrit tant de lignes à ce sujet. Vous irez donc aux urnes, si vous trouvez un parti au candidat idéal mais ses actes ne manqueront pas de vous le révéler encore plus ignoble qu’il n’était quand il voulait vous séduire par ses belles paroles. La parole politique a été faite pour mentir. Surtout quand il y en a beaucoup et toutes s’avèrent fausses. 
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Dans le silence de la nuit, j’écris, j’écris depuis longtemps. Renvoyant sur ma table la lumière de la lampe, l’abat-jour laisse dans l’ombre les livres qui montent en étages sur le fond du cabinet de travail. Les ténèbres de cette chambre sont mystérieuses, parce qu’on y sent confusément l’âme de tous les livres endormis. Que des fantômes apparaissent dans une bibliothèque, rien de plus naturel. Où se montreraient les ombres des auteurs, sinon au milieu des signes qui gardent leur souvenir ? Je fais de courts articles à propos de tout et de rien. J’y prends plaisir non que je me soucie en aucune façon des idées que je pourrais y exprimer mais parce que les traces laissées pourront intéresser, dans quelques années, un lecteur occasionnel. Ajoutez à cela que le temps m’est compté et que je me contenterais de laisser quelques signes avant de quitter la scène le plus dignement possible. Le temps, c’est de la poudre d’or, des dents d’éléphant et des plumes d’autruche. Et la vie est courte. Il faut, sans perdre un moment, naviguer vers l’autre rive, afin de gagner des souvenirs heureux et une mémoire digne des miens. Je ne m’étais jamais inquiété de ce qu’on penserait de moi après ma mort. Mes craintes et mes espérances n’allaient point au-delà de cette vie dont j’ai joui depuis ma naissance. Plutôt qu’assoiffé d’or et d’argent ou d’une vaine gloire, j’ai voulu toujours agir par amour de la bonté et pour ce qu’on appelait « la vertu » dans les temps classiques. J’ai appris que les hommes sont mauvais et que, s’ils sont puissants, ils sont pires. Et qu’ils faut les craindre et s’efforcer de les apaiser. Je me peins tel que je suis et n’ayant pas assez d’esprit pour devenir riche ou célèbre, mes efforts et mon enthousiasme se sont orientés vers la recherche d’ivresses intellectuelles et, rêve contre le néant, des liens avec ce que François Mitterrand appelait « les forces de l’Esprit », que je préfère, et je l'écris, avec un « E » majuscule.

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La démoralisation croissante vers les familles et les couples en âge de procréer, avec une facilité graduelle des avortements et des stérilisations ainsi que les encouragements, plus ou moins déguisés de qualité de vie, à euthanasier les vieux et certains malades participent d’un mouvement amplement développé de banalisation du wokisme et de son introduction partout dès le plus jeune âge.

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Quand un flic se fait tuer, tout le monde de dire : « Il connaissait les risques du métier. » Quand un criminel se fait tuer, personne pour dire : « Il connaissait les risques du métier. » Et des tonnes de larmes.

 

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