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jeudi 7 juillet 2016

Apories de la pensée



Deux grandes stars de la pensée du XXe siècle se sont vus eux-mêmes heureux en captivité, à l’opposé d’un Varlam Chalamov ou d’un Soljenitsyne … Les conditions de détention étaient sans doute un peu différentes.



Sartre : « J'ai trouvé au Stalag une forme de vie collective que je n'avais plus connue depuis l'É­cole Normale et je veux dire, qu'en somme, j'y étais heureux (sic!) ".[1]


Et sa biographe d’ajouter :

« Sa captivité l'épanouit, il s'y trouva heu­reux ».[2]


Il paraît que la raison d’un tel "épanouissement" n’était qu’« un exem­plaire de Sein und Zeit (...) rappor­té clandestinement par l'ab­bé Etche­goyen qui travaille dans un ­mona­stè­re hors du camp et y a lié ami­tié avec le prêt­re allemand anti­nazi. Deux heu­res de lecture de phénoméno­lo­gie alle­mande avec Perrin, tous les ma­tins, près du poêle dans la chauf­fe­rie de la 42... » [3]


                                                                                                                                     * * *


Althusser, cloîtré dans l’ENS : « Ce que devint l’École ? Très rapidement, je devrais dire dès le début, un véritable cocon maternel, le lieu où j’étais au chaud et chez moi, protégé du dehors, que je n’avais pas besoin de quitter pour voir les gens, car ils y passaient ou venaient, surtout quand je devins connu ; bref, le substitut, lui aussi d’un milieu maternel, du liquide amniotique. » [4]

… à la journaliste et psychanalyste C. Clément qui lui demandait pourquoi il vivait à l’ENS au lieu d’avoir son indépendance à l’extérieur, il lui répondit le plus sérieusement possible que cette vie cloitrée lui convenait bien car elle lui rappelait la vie au stalag - Nous avons clos la première partie avec cette expérience singulière du stalag, et au regard de ce que nous savons, sans doute fut-elle la période de sa vie où il fut vraiment heureux. Aborder Althusser dans sa vérité et son étrange étrangeté, c’est accepter l’ambivalence, le paradoxe et l’effroi.[5]


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