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samedi 31 octobre 2020

Reconfinement ! Retour de chacun dans sa chacunière...





" J’ai oublié, moi qui le connaissais si bien pourtant, le mot de Talleyrand : « Méfiez-vous du premier mouvement : il est toujours généreux. » Je ne l’oublierai plus. " 

Paul Léautaud, Paris le 31 décembre 1906, à Paul Valéry, après avoir été mal récompensé de son aide à une femme dans la misère.

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L’Histoire n’est pas un self-service au gré des susceptibilités des uns ou des autres : multiculturalistes, welcome refugees, etc. Mais si l’on veut éviter vraiment la soumission, alors, il ne reste qu’une seule issue : celle de la guerre, mais vraiment la guerre, pas avec des dessins ni des pleurnicheries répétées après chaque égorgement, chaque décollation, chaque assassinat. Les « insoumis » pour rire, genre mélanchonisme bouffon, penchaient pour accompagner ceuzezelles criant à tue-tête Allah ou Akbar et vociféraient avec eux. Après coup, on pleure tous ensemble… Une fois installés dans le ténèbres, c’est trop tard pour les clamor et stridor dentium !


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Mes élucubrations mentales, une fois publiées, se transforment en opinions exposées ouvertement, en réalité objective pour d’autres. En effet, la dichotomie qui semble exister entre le privé et le public disparaît à partir du moment où on rend « sociale » cette privacité.  N’étant privées qu’en apparence, puisque je ne les garde plus pour moi tout seul, mes pensées individuelles exprimées par écrit s’exposent au regard de tous : regards autour de qui je suis, de quel milieu je suis issu, du parcours social de ma famille, de l’éducation que j’ai reçue, des convictions idéologiques et politiques du cercle d’amis et d’agents sociaux en tout genre qui ont facilité mon intégration à la vie professionnelle, de mon action professionnelle (politique donc politisée) aux différents niveaux, de ma place concrète dans la hiérarchie sociale. J’ai occupé des places dans la fonction publique, dans le secondaire, l’enseignement de langues et le supérieur. Mes postes dans de différents échelons administratifs m’ont permis d’élargir les cercles d’influence et de responsabilité. Chaque étape m’a ouvert la possibilité de développer des contacts avec de différents groupes et de m’en affirmer membre. Ainsi que le remarque Durkheim, l’individu agit toujours comme un être appartenant à un groupe, car toute action personnelle s’inscrit dans « des manières d’être collectives ». Pour des publics différents, il existe des manières d’être qui représentent autant de rôles. Elles s’appuient sur des idéologies partagées à des degrés différents. Les contradictions inévitables acquièrent un sens si elles sont envisagées à la lumière des choix (professionnels) des étapes précédentes et des suivantes. Dans chaque cas, elles sont nécessairement politiques car elles visent à façonner un rôle social exécuté par des individualités dans des cadres conjoncturels (collectifs) précis. J’ai l’impression d’avoir passé une bonne partie de ma vie à me démarquer de groupes que j’avais pourtant impatiemment cherché à intégrer, ou d’individus avec lesquels j’ai d’abord éprouvé quelque affinité intellectuelle ou politique. Sans avoir à justifier mes choix pour chaque étape, il est clair que les antagonismes qui en résultent ont été la conséquence d’un télescopage (subjectif : évolution des opinions, objectif : changements dans les comportements, c’est-à-dire, les praxis) de caractères individuels à l’intérieur des groupes auxquels il m’a été donné d’appartenir et par le conflit permanent dans les groupes dominant eux-mêmes ces groupes. Opinions et praxis sont en même temps étroitement liées aux visées professionnelles et aux parcours publics qu’elles réclament. S’il est difficile de croire qu’une personne ne valorise raisonnablement son intérêt personnel[1], il faudrait avant d’évaluer une trajectoire publique, recourir à la totalité de sources de renseignement disponibles, loin d’une rapide impression platement spéculative et sans fondement tangible. La complexité de la démarche rend insignifiante toute tentative de verdict axée sur des trajectoires qu’on veut expliquer simplement par l’intérêt individuel, source de toute action, alors qu’elles sont indissociables, de près ou de loin, de l’accomplissement d’un certain intérêt de groupe orienté vers des formes diverses de bien commun.

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On lit des discours sur le dérèglement climatique, comme si le climat était réglé comme une horloge sans variation ! Le réchauffement climatique, peut-être ou pas, d’origine anthropique – la faute plutôt à l'homme blanc – si la pollution est une calamité et la surpopulation un désastre, dire que le CO2 est un gaz polluant est absurde : sans CO2 pas de plantes... Quoi qu’il en soit, c’est surtout la bonne occasion pour nous fourguer du baratin écolo, des taxes, des voitures électriques, des éoliennes, etc... Et de nous foutre la trouille comme pour le coronavirus ! Sans oublier le changement climatique qui nous renvoie à tout ce qui précède. Comme si nous maitrisions l’axe d’inclinaison de la terre, le fonctionnement des volcans, l’activité rayonnante du soleil... Encore et toujours : gouverner en manipulant la peur.  On est sommé de ne pas négationner le réchauffisme, la pandémie, les invasions migratoires... Bien sûr je peux faire erreur je ne suis pas spécialiste (pas plus que les journaleux ou toute l’engeance qui gueule dans les rezozozios) mais comme l'on entend/lit tout et son contraire ! Les résultats de la science tout comme les idées en général, ont-ils besoin de militants ? Je ne supporte pas les bavardages de n’importe qui sur n’importe quelle chose où chacun croît qu’il peut pouvoir exprimer la petite idée qu’il s’est faite dans son cerveau à propos de n’importe quoi.

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Nausée. Vidéos historiques BBC à vomir. Répétition jusqu’à l’exténuation du dogme « Hiroshima, Nagasaki, bombardements sur la population civile allemande pour accélérer la fin de la guerre et pour sauver de vies ». A combien d’innocents ont sauvé les bombardements des villes japonaises, de Tokyo, de Hambourg ? Au nom de qui brûlait-t-on Dresde ? Au nom de Juifs eux aussi brûlés ? Peut-on croire une seconde que Britanniques ou Américains agissaient au nom des Juifs tués ? Et qui pourrait agir au nom des autres tués ? Si chacun a ses raisons particulières de tuer, où s’arrête la notion de crime ? Au nom de quelle foi, de quelle liberté peut-on tuer ses semblables ? Au nom du Prophète, des Palestiniens, des Kurdes, des Afghans, des Arméniens… ? Du socialisme ? Sans le respect d'une LOI commune, comment garantir une honnête vie en commun entre des libertés différentes. Si l’on préfère la lutte sans règles sur le marché des libertés, le résultat est connu d’avance ! Si au lieu de la loi on préfère un simple empilement de légendes au jour le jour, chacune se considérant comme authentique et dénonçant celles des autres comme factices, on sera toujours perdu. Indéniablement, une rhétorique vaguement socialiste a toujours la côte auprès de la population. Le problème vient du fait qu’un nombre incalculable de crapules (et de banquiers !) s’en servent pour justifier les principes de leur domination. Néo-tchékistes milliardaires, fous d’Allah, narcotrafiquants au pouvoir… voilà une symbiose d’illusions unique en son genre... Mais la surprise chine : socialisme et marché, quand même !

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La Constitution espagnole de 1978 ne protège pas les gens mais le pouvoir sur les gens. Elle protège aussi des zones de pouvoir, l’espace des différents clans autonomes installés par les équarrisseurs.

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P. Iglesias T., notre dirigeant bien-aimé à queue de cheval rebelle et chignon obéissant, fait penser à ce chevalier de l’Arioste, tué dans un combat mais qui, ne s’étant pas aperçu de cet accident dans la chaleur de l’action, continue à se battre tout mort qu’il est. Cynique chantre de tyrannies stupides déjà dépassées et condamnées à finir dans les poubelles de l’histoire, son triomphe passager de feuilleton américain sera sans doute le présage d’une fin elle aussi tragiquement ridicule. Le niveau de bouse de vache diffusé chaque jour par la 6e chaîne espagnole (« la secte ») en direct finira par tous les noyer. Pour le moment, la demeure madrilène du cacique, à Galapagar (littéralement, un endroit où abondent les tortues d’eau douce), reste intacte et à l’abri, en y apportant une note romantique à l’intérêt qu’elle suscite chez les journaleux de la presse la plus people. Comme tout bon reptile qui se respecte, le podémite mue. Pas en une seule fois comme le serpent, bien entendu, mais au fur et à mesure qu’il occupe des postes. Les filaments d’endogamie, de corruption et d’incompétence encombrant sa carapace sociale l’écartent progressivement du principe farcesque de dictature du prolétariat pour gagner de nouveaux morceaux de peau qui grandissent progressivement aux airs triomphants de celle du propriétariat.    

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Les profs mordus d’écriture et se voyant écrivains ! Un mail de ce pauvre FJGDC ancien prof à la retraite, pardon, « écrivain », me fait penser, avec ses gribouillis prétentieux d’amateur, à la souris de l’histoire drôle qui court à côté d’un éléphant et qui lui dit tout à coup : « Qu’est-ce qu’on soulève comme poussière ! »


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“Desgraciadamente en nuestra Universidad, donde no existía lo que Luis Trías de Giralt (en un alarde menos retórico de lo que podría pensarse) dio en llamar la cúpula democrática, la conciencia política nació de una ardiente, gozosa erección y de un solitario manoseo ideológico. De ahí el carácter lúbrico, turbio, sibilino y fundamentalmente secreto de aquella generación de héroes en su primer contacto con la subversión. En un principio ninguno parecía tener el mando. Ocurre que de pronto en 1956 se les ve andar como si les hubiesen dado cuerda por la espalda, como rígidos muñecos juramentados con un puñal escondido en la manga y una irrevocable decisión en la mirada de plomo. Impresionantes o impresionados de sí mismos, misteriosos, prestigiosos y prestigiándose avanzan lentos y graves por los pasillos de la Universidad con libros extraños bajo el brazo y quién sabe qué abrumadoras órdenes sobre la conciencia, levantando a su paso invisibles oleadas de peligro, de consignas, de mensajes cifrados y entrevistas secretas, provocando admiración y duda y femeninos estremecimientos dorsales junto con fulgurantes visiones de un futuro más digno. Sus nobles frentes agobiadas por el peso de terribles responsabilidades y decisiones extremas penetran en las aulas como tanques envueltos en la humareda de sus propios disparos, derriban núcleos de resistencia, fulminan rumores y envidias, aplastan teorías y críticas adversas e imponen silencio...” 

Juan Marsé, Últimas tardes con Teresa, Salvat, Barcelona 1965, p. 188

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Tous les jours, je me rends compte à quel point je suis encore imprégné des impératifs religieux et moraux de ma mère. Plus anecdotique mais tout aussi puissant, il m’est encore aujourd’hui impossible de regarder un morceau de pain posé à l’envers, dans la panière ou ailleurs, sans le remettre à l’endroit. J’ai gardé un rapport au pain que mes parents avaient hérité d’un âge où ils ne mangeaient pas toujours à leur faim.



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En vérité, je ne suis qu’un parasite habile qui, non sans une curiosité personnelle, transforme les connaissances des autres en ses propres intrigues. J’aime quand des événements d’importance en constituent le décor, mais leur essence, c’est toujours la vie qui passe comme un torrent, qui coule à grands flots emportant nos vérités. C’est pourquoi, peu importe le nombre de lecteurs d’un texte : je serai pareillement ravi par le fait de n’en avoir qu’un, représentant à lui seul l’immensité d’une mer (Hugo considérait la mer comme une personne !). Dans la cathédrale Notre-Dame de Chartres, on trouve le plus grand labyrinthe d’Europe dessiné sur un pavage. Labyrinthe que les fidèles traversaient et traversent parfois jusqu’à aujourd’hui, à genoux, en guise de métaphore d’un voyage jusqu’à la Terre sainte, jusqu’à la Vérité. J’ai rencontré des gens qui ont accompli ce geste symbolique. Cela m’a fortement impressionné. Et cela consolide ma conviction que la vérité est unique, mais compliquée comme un labyrinthe parce que chacun a quelque chose à cacher et quand on la dévoile, ça fait toujours plaisir de la voir simplement partagée ne serait-ce que comme une bouteille de naufragé, récupérée par un inconnu avec son rouleau de papier dedans. 

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Il m'a fallu nombre d’années pour comprendre un déclic, probablement plus important que la lecture de Geneviève de Brabant, premier déclencheur d’émerveillement de mon enfance actionné par ma mère. La scène se situe dans la petite métairie où ma famille vivait, en absence de mon père occupé toute la journée à l’abattage du blé. Devant la maison, bercé entre ses bras, ma mère me parle d’un fil invisible. Mais je ne le vois pas très bien, ce fil imperceptible. Ce soir-là, comme souvent le soir, ma mère a lu de vieux papiers échangés contre de sacs de pommes blettes destinées à nourrir les cochons des moniales de la charité. Elle avait une façon bien à elle de les lire. Elle étalait des revues dépareillées et des morceaux de vieux livres sur la table de la cuisine après avoir nettoyé et séché la toile cirée, puis elle jetait un regard sur l’ensemble. Cette fois-ci elle était tombée en arrêt sur un miracle de Saint Antoine de Padoue. Elle le lut et le relut lentement, puis s’en alla chercher ses ciseaux de couture et le découpa. Elle rangea ensuite le précieux carré découpé dans le buffet et il me fallut une lente lecture personnelle pointant du doigt chaque mot pour comprendre qu’un autre déclic avait été actionné : au retour d’un jour de labeur, un enfant, tombé raide mort sous les roues d’un tombereau chargé de paille était remis en place sain et sauf par la main de Saint-Antoine. Le fil invisible! Plus tard, je revoyais ce même fil mystérieux faire des virages et finir par émerger droit dans les légendes castillanes qu’elle me racontait ou quand elle me lisait des morceaux des miracles de Notre Dame d’un vieux moine poète moyenâgeux qu’elle paraissait avoir fréquenté dans les meilleurs rapports de voisinage. C’étaient sans doute des morceaux d’un même puzzle qui prenaient place dans ma tête avec les histoires magiques de ma grand-mère maternelle et d’autres récits truculents de mon père, lui-même très bavard et très porté sur l’invention de prodiges inexpliqués. L’attachement de ma mère à ce fil invisible, qui nous relie au mystère et ouvre en même temps les portes de la foi, s’est rapidement imposé comme toile de fond de mon enfance (et de toute ma vie ?). 

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Une bonne partie de leur vie mes parents ont été domestiques. Ma mère, dès l’âge de sept ans, domestique de maison logée chez ses patrons. Mon père, valet de ferme. Avec le recul du temps, comment ne pas être profondément touché par leur abnégation au profit de leurs différents maîtres et propriétaires, par cette acceptation d’une vie rude et improbable dans des conditions de travail difficilement supportables ? Je les ai toujours aimés et en même temps je n’ai cessé d’être profondément interloqué par ce que, chez tout autre, j’aurais qualifié de soumission. Or, le mot soumission ne leur convient pas du tout. Ils étaient plutôt fiers. Pas humbles pour un sou ! Ils étaient plus que pauvres et pourtant, avec leurs gestes, leur port de tête rigide, ils ont toujours salué les gens avec une certaine distance et préféré ignorer tout ce qui, à leurs yeux, traduisait le laisser-aller, l’abaissement, la saleté, le mal gratuit et la bêtise. Les rires vulgaires, les attitudes dites populaires leur étaient étrangers. Ils ont toujours promené sur les humains et les choses un regard digne, voire insolent. Je pense notamment aux propos moqueurs de ma mère sur la réalité quotidienne et les personnes soi-disant importantes qui l'entouraient. Et même à son regard sur mon père, comme si elle était d’une essence supérieure à lui… 

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Ne comptons pas sur les médias pour relater la décapitation d’un professeur d’histoire-géo dans toute sa cruauté et les circonstances abjectes qui y ont abouti. En 2017, l’égorgement de deux jeunes femmes en gare de Saint-Charles à Marseille par un islamiste était « un attentat à l’arme blanche ». L’euphémisation est toujours la règle en 2020. La succursale de la bienpensance, le New York Times, insiste le jour de l’attentat sur… la mort de l’agresseur. Le titre initial de l’article « la police française tire et tue un homme après une attaque fatale dans la rue » est remplacé par : « la police française tue un homme qui a décapité un professeur dans une rue ». Malgré la modification du titre, l’islamiste est toujours la première victime que présente le journal américain. Le service public de l’information a également été assez pusillanime dans la couverture immédiate de l’attentat. Un député de l’Essonne, Francis Chouat, a écouté France info peu de temps après l’attentat. Sa réaction sur Twitter est sans appel : « @franceinfo qui ose demander à une enseignante si elle estime que le professeur DÉCAPITÉ avait eu raison de parler caricatures. La réponse est tellement évidente!!! #ConflansSainteHonorine #terrorisme #Islamisme ». Et Claude Posternak constatant que « 8 heures après les faits, @franceinter première radio publique de France n’a toujours pas annoncé sur son fil Twitter la décapitation d’un enseignant par un terroriste islamiste ». Beaucoup ont écrit pour dire à quel point Samuel Paty était un prof formidable. Or, pour moi, même si c'était le pire des profs, il ne méritait pas ce sort. Je ne supporte plus que les victimes soient éternellement sur la défensive et doivent se justifier, je ne supporte plus les discours sur la liberté d'expression au-dessus du droit à la vie. On s'en fout. L'interdiction de meurtre devrait être absolue, de violence physique aussi.

Quelques heures après, rebelote ! Triple crime dans une église à Nice, avec assassinat par décapitation et mutilations. « Dites à mes enfants que je les aime... » : derniers mots prononcés la maman d'une quarantaine d’années qui avait pu sortir du temple, trop blessée cependant pour pouvoir survivre. C'est terrible, barbare, intolérable. Je n'ai pas de mots, je n'ai que des larmes sans décolérer contre les responsables d’une telle catastrophe répétée. L’évolution de la situation pourrait être résumée ainsi : on a imposé, sans jamais demander son avis à qui que ce soit, la présence d'individus violents n'ayant rien de commun avec la société les accueille. Année après année, on a fait des efforts (toujours jugés insuffisants !) pour assurer le bien-être de ces individus et de leurs familles qu'on a fait venir aussi afin qu'ils ne soient pas dépaysés. On a leur a inculqué que la société qui est forcée de les admettre a une dette imprescriptible envers eux et surtout qu'ils ont absolument tous les droits, à commencer par celui d'imposer leurs coutumes et croyances et de réclamer des aides par tous les moyens et sous la forme qui leur plaît. Quand un élément se « radicalise » et commence à donner libre cours à ses lubies, on interdit de l’en empêcher et même de défendre sa vie s’il veut bien vous la prendre. Faut descendre très bas dans le règne animal pour qu'il en aille autrement. Les arguments pitoyables en leur faveur remontent à cinquante ans. Tout ce qui précède étant dit, il y a donc lieu d’être laïc, athée et même, à certains égards, athée militant, de détester toutes les religions, y compris l’Islam, et de détester en même temps Charlie Hebdo. Par leurs dessins pas toujours drôles et souvent ridicules. Parce que la common decency (Orwell) suggère de s'attaquer d’abord à ses propres valeurs, religieuses ou autres, aux puissants proches pas aux intouchables lointains, surtout pas aux faibles et aux exclus des communautés qui ne vous sont peut-être pas sympathiques mais qui méritent du respect. Parce qu’il y a quelque chose d’odieux dans la satisfaction narcissique de mépriser et d'insulter l’autre à travers sa religion, sa couleur, sa culture. Les sous-merdes nationalistes suprémacistes, qui ne font que ça depuis leur origine de mini-sionistes complexés, en savent quelque chose. Toute leur action ne vise qu’à disloquer la société réelle au nom d’une société de rêve, à faire reculer la raison, particulièrement cette sacrosainte « fraternité » dont ils se réclament depuis les « Lumières » , pour autant qu’elle ait jamais existé. Parce que toute leur façon de faire est inspirée par un paternalisme raciste imbécile, profondément irrationnel, qui s’est emparé des soi-disant élites progressistes depuis plus d’un demi-siècle. Et parce que toute une série de pseudo-laïcs ont fait de ce journal un étendard anti-chrétien et férocement anti-islam discréditant ainsi la laïcité.


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Quand j’entends parler de défense de nos valeurs j’ai toujours l’impression que c’est un lapsus, on veut dire nos voleurs.

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La mémoire est une pâte qu’on peut malaxer à volonté et transformer en produits différents à chaque cuisson.

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Parabole du paralytique au pied du manguier : le paralytique ne peut jouer avec des feuilles vertes que s’il y a quelqu’un dans l’arbre qui les lui jette. Sinon il ne joue qu’avec les feuilles mortes… Les partis politiques-paralytiques – la plupart, sinon tous ! - n’existent que par l’argent public et par les fonds de leurs puissants protecteurs. Et donc, la seule façon de réagir face à eux serait de les démasquer et d’expliquer au contribuable que ceux qu’il considère de robustes paladins dévoués à son service ne sont en fait que des paralytiques. Leur pouvoir ne repose plus sur la confiance ou le respect de leurs électeurs, mais sur la crainte qu’ils inspirent et le bénéfice qu’ils tirent des autres pouvoirs. Grâce aux mercenaires des médias et surtout à la presse. Des journalistes aventuriers savent produire à la chaîne des articles et des dossiers dans une stratégie de « mise en scène de l’information » à force de « coups » truculents à même de satisfaire l’appétit des publics ignorants et acritiques. Dans un tel contexte, la peur est devenue leur principale arme. Une peur qu’on met au service d’un combat sans merci contre tout adversaire dénoncé comme corrompu. Car ces traqueurs de gibier – c’est devenu en quelque sorte leur fonction de base – autoqualifiés de gentils ne poursuivent que les secrets des pouvoirs, grands ou petits, qu’ils considèrent méchants. Au nom de cet objectif, ils s’autorisent des transgressions qu’ils condamnent inlassablement chez les autres: violer la confidentialité des sources ; faire fi du secret de l’instruction et malmener la présomption d’innocence ; utiliser la dénonciation, et attendre patiemment les fuites intéressées de juges amis ou de complices de la police. Dès lors, tout est en place, la trompe de chasse est prête. Assurés de leur impunité, les grandes stars du journalisme friqué autodésigné progressiste (espèces mammifères ibériques connues à l'étranger : gabilondos, escolares, ferreras et j’en passe et des meilleurs) peuvent stigmatiser les uns, encenser les autres avec l’aplomb qui leur est propre pour lancer sans scrupules ni décence de véritables campagnes d’opinion… Apparaissent ainsi la partialité de nombre d’enquêtes et cette inexplicable volonté de nuire, de faire mal, de pourrir un quotidien déjà suffisamment pourri par l’absence d’horizon face à la pandémie. Hommes politiques, intellectuels, grands patrons tremblent à l’idée de se faire descendre par ces stupides agents de la bienpensance. Les rédactions des grandes chaînes (quel nom si approprié !) de télévision préparent leur sommaire des heures d’audience avec les avis de ces pitres de référence sur les genoux. De telles attitudes de soumission ont fait de ces stars et de ces chaînes le cœur d’un redoutable dispositif médiatique et, en dernière analyse, le pouvoir d’entre tous les pouvoirs. S’ils ont le droit de vilipender tout ce qui est censé venir de « la droite », de crucifier un patron inamical et de salir des réputations politiques adverses, il est hors de question, jusqu’à présent, de publier la moindre virgule de travers sur les pantins – du microcosme politique, intellectuel ou de l’économie – qu’ils sont payés pour encenser. Ils gagnent partout, tout le temps. Par la peur. Cette façon de vouloir penser à la place des lecteurs, de faire constamment la morale, de traquer plutôt que d’enquêter, de prendre plaisir à pousser en prison ceux qu’ils pourchassent, d’être animés par la haine qu’ils dénoncent vertueusement chez les autres, c’en est trop. Et quand on se trompe par un faux scoop ou une fausse nouvelle, qu’importe l’erreur puisque les faits décrits étaient plausibles… Je m’en veux énormément, tant pis pour ce qui peuvent en penser un certain nombre d’amis, d’avoir attendu le soir de ma vie pour déboulonner des statues que nous avons passé toute une vie à ériger. Ça n’en valait pas le coup : c’étaient des statues à des pas grand-chose.


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Se présentant comme un beau rendez-vous pour les idéalistes de tout poil, les processus d’indépendance des nationalismes périphériques sont devenus de véritables bals des pros de l’embrouille. Surtout pour le cas de la Catalogne. Le spectacle est étalé au grand jour. Sans honte, sur la place publique. Retransmis même sur les ondes. Tous en costume d’emprunt de démocrates de vieille date, ils sont en piste. Ceux-là même que Gregorio Marañón dénonçait comme responsables d'avoir mené jusqu'au bout leur révolution "au nom de Cacus et de caca". Exploitant l’ignorance du peuple et rivalisant en habileté dans l’art de jeter la poudre aux yeux. Comme toujours ! Des leaders socialistes proches et complices de l’abject racialisme pujoliste ont amplifié cette musique. Maragall. Montilla. Pour une conscience réellement de gauche, c’est comme un deuil. Un peu comme celui que j’avais vécu avec la disparition des formes classiques du communisme ou, bien avant, de l’anarcho-syndicalisme. Je n’ai jamais approuvé aveuglement le stalinisme grossier ou le bienveillant fatras anar, mais c’étaient des engagements de jeunesse d'une génération et d'une classe qui brusquement cessaient d’exister. Plus de lieu pour se recueillir. Tous les décors sont occupés par d’autres figurants. Surtout du cirque podémite. J’imagine que la plupart des familles politiques peuplées d’opportunistes le sont aussi. Nous aurons rêvé de l’histoire avec des tas de figurants glorieux.


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On perd facilement de vue que tolérer le blasphème n’oblige nullement à l’admirer ou à le célébrer quitte à admettre qu’il devienne obligatoire.

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Claude Simon et la révolution. Le Palace (le Palace, l’hôtel Colon à Barcelone). Un des personnages, l’Américain, compare la révolution catalane au « cadavre d’un enfant mort-né enveloppé de vieux journaux », « un petit macrocéphale décédé avant terme parce que les docteurs n’étaient pas du même avis… ». À propos de George Orwell, dans les Géorgiques, deux travaux dont j’aurais bien aimé avoir pu disposer à l'époque pour élargir ce sujet (désenchantement de la révolution !) qui m’avait tant fait travailler lors de la rédaction de ma thèse : un exposé fait au Collège de France, Quand Claude Simon réécrit Hommage à la Catalogne (Jean-Jacques Rosat, 9 novembre 2010) et, dans les Cahiers Claude Simon,  L’Orwell travesti de Claude Simon, ou la quatrième partie des Géorgiques (Emelyn Lih, New-York University, 2016). D’autant plus qu’à l’époque (1990) je croyais que Claude Simon n’avait pas été juste ni avec le processus révolutionnaire ni avec ses reproches à Orwell… Avait-il donc subi une si forte désillusion ? Traduisait-il ainsi sa contestation foncière de l’engagement sartrien ?

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« On ne peut user d'un droit dans le dessein de nuire. » À ceux qui veulent se faire une idée précise de la réalité du « droit à la caricature » en France, je suggère d’en proposer une de Moïse de dos et à quatre pattes, à poil avec une étoile sur le trou de balle, les balloches apparentes, masquant mal une ridicule zigounette pendouillant. Éventuellement, vous pouvez en proposer la diffusion dans les écoles au nom de la liberté d’expression, de la liberté de conscience, du droit au débat et tout l’étalage habituel. N’oubliez pas de suggérer aux profs que les jeunes juifs sortent de la classe... Bon courage. Comme cela n’a pas l’air d’être clair pour tout le monde, je précise que pour ma part je récuse ce type de provocations obscènes et injurieuses, qui ne sont qu’accessoirement des caricatures blasphématoires. En Espagne, en Italie, l’exercice du droit au blasphème bassement con est présent partout (on en entend dans la rue, à tort et à travers et aussi bien dans la bouche des jeunes que des vieux, tous métiers confondus), mais pour ce qui est de la liberté d’expression, elle est réalité limitée ou carrément interdite dans moult domaines : prétendue hostilité à l'encontre des Juifs en tant que groupe ethnique à chaque fois qu'on s'oppose à l'État d'Israel, colonialisme, homosexualité, féminisme... L’inacceptable reste toujours le droit à l’injure, à la diffamation et aux obscénités gratuites, désormais gentiment autorisées contre beaucoup (hommes blancs en vrac, chrétiens partout, musulmans si pauvres...).

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12 octobre, fête nationale espagnole et hispanique. Sans nier les brutalités ou les injustices dont ont pu se rendre coupables les conquérants européens du Nouveau Monde, comment ne pas être estomaqué par les exagérations de la légende noire entourant l’action des Occidentaux en général et celle des Ibéro-catholiques en particulier, en rappelant par exemple que la législation royale n’a pas systématiquement négligé les intérêts des indigènes au profit de ceux des colons, et en valorisant l’action positive de la civilisation chrétienne dans son opposition à la polygamie et aux coutumes sanglantes. Peu importe qu’on ait pu démontrer la fausseté de la légende dorée selon laquelle les autochtones américains étaient de paisibles campeurs inoffensifs. Des historiens ont rappelé les multiples données fournies par les chroniqueurs et les anthropologues quant à des traits de mœurs répandus, chez les chasseurs-collecteurs de tout le continent comme dans les sociétés urbanisées du Mexique et des Andes, concernant notamment les sacrifices humains et le cannibalisme. L’abandon de ces rudes coutumes sous la pression de la doctrine chrétienne entraînant un grand soulagement pour les masses indigènes fait toujours tousser les tiers-mondistes des cinq continents, mais pour ma part je crois plausible qu’il y ait là un des principaux facteurs du succès de la conversion des âmes américaines.

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Commençons par le commencement : rien que la vue de Trump à la télé me met hors de moi. Mais quand on me dit qu'il est un parfait crétin, je réponds froidement qu’un type qui transforme son entreprise familiale en multinationale superpuissante est tout sauf un con. Ça a tendance à calmer l’opineur en face de moi. En revanche, j’aime bien recevoir ce même commentaire « Trump est un crétin » de la part d’un petit employé de la commune, feignant au-delà du supportable et en congé maladie le tiers du temps !

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Pauvres Arméniens ! Loin du clan des gentils professionnels... On tremble à se rappeler ce qu’il a fait, ce camp du Bien, pour le Kosovo.  Que les Albanais ont piqué aux Serbes. Que l’OTAN (Solana / PSOE secrétaire général) a copieusement bombardés (Belgrade 1999) pour les empêcher de reprendre leur territoire.

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[1] Ce n'est pas de la bienveillance du boucher, du marchand de bière et du boulanger, que nous attendons notre dîner, mais bien du soin qu'ils apportent à leurs intérêts. Nous ne nous adressons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme ; et ce n'est jamais de nos besoins que nous leur parlons, c'est toujours de leur avantage. Adam Smith, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations

 









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