Rouvrir une fenêtre fermée depuis deux mois !
Je laisse pour une meilleure occasion la mise au pilori d'une idiote complète de mon département (quel que soit le nom réel qu'une "entité" semblable devrait porter) qui encaisse impunément des sous du contribuable en échange de sa bave collante comme de la glu...
Il faut une certaine sérénité, même dans l'injure, pour nettoyer à fond une raclure de bidet.
Avant la promenade en bord de mer, un clin d’œil en direction de Baudelaire, sa conception de progrès, la chose qui donne le plus à penser aux progressistes de tout poil, méritant bien le détour :
Il est encore une erreur fort à la mode, de laquelle je veux me
garder comme de l’enfer – je veux parler de l’idée du progrès. Ce fanal
obscur, invention du philosophisme actuel, breveté sans garantie de la
Nature ou de la Divinité, cette lanterne moderne jette des ténèbres sur
tous les objets de la connaissance ; la liberté s’évanouit, le châtiment
disparaît. Qui veut y voir clair dans l’histoire doit avant tout
éteindre ce fanal perfide. Cette Idée grotesque qui a fleuri sur le
terrain pourri de la fatuité moderne, a déchargé chacun de son devoir,
délivré toute âme de sa responsabilité, dégagé la volonté de tous les
liens qui lui imposait l’amour du beau : et les races amoindries, si
cette navrante folie dure longtemps, s’endormiront sur l’oreiller de la
fatalité dans le sommeil radoteur de la décrépitude. Cette infatuation
est le diagnostic d’une décadence déjà trop visible.
Demandez à tout bon Français qui lit tous les jours son journal dans
son estaminet ce qu’il entend par progrès, il répondra que c’est la
vapeur, l’électricité et l’éclairage au gaz, miracles inconnus aux
Romains et que ces découvertes témoignent pleinement de notre
supériorité sur les anciens ; tant il s’est fait de ténèbres dans ce
malheureux cerveau et tant les choses de l’ordre matériel et de l’ordre
spirituel s’y sont bizarrement confondues ! Le pauvre homme est
tellement américanisé par ses philosophes zoocrates et industriels qu’il
a perdu la notion des différences qui caractérisent les phénomènes du
monde physique et du monde moral, du naturel et du surnaturel.
Si une nation entend aujourd’hui la question morale dans un sens plus
délicat qu’on ne l’entendait dans le siècle précédent, il y a progrès ;
cela est clair. Si un artiste produit cette année un œuvre qui témoigne
de plus de savoir ou de force imaginative qu’il n’en a montré l’année
dernière, il est certain qu’il a progressé. Si les denrées sont
aujourd’hui de meilleure qualité et à meilleur marché qu’elles n’étaient
hier, c’est dans l’ordre matériel un progrès incontestable. Mais où
est, je vous prie, la garantie du progrès pour le lendemain ? Car les
disciples des philosophes de la vapeur et des allumettes chimiques
l’entendent ainsi : le progrès ne leur apparaît que sous la forme d’une
série indéfinie. Où est cette garantie ? Elle n’existe, dis-je, que dans
votre crédulité et votre fatuité. Je laisse de côté la question de
savoir si, délicatisant l’humanité en proportion des jouissances
nouvelles qu’il lui apporte, le progrès indéfini ne serait pas sa plus
ingénieuse et sa plus cruelle torture ; si, procédant par une opiniâtre
négation de lui-même, il ne serait pas un mode de suicide incessamment
renouvelé, et si enfermé dans le cercle de feu de la logique divine, il
ne ressemblerai pas au scorpion qui se perce lui-même avec sa terrible
queue.
Charles Baudelaire, Curiosités esthétiques, Exposition universelle, 1855.
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