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mardi 8 juin 2021

Fil tendu aux portes de l'été


¿Cuándo es cuando se cambian las funciones del alma y los resortes del cuerpo
y en vez de llanto no hay más que risa y baba en nuestro gesto?
Si no es ahora, ahora que la justicia vale menos, infinitamente menos
que el orín de los perros;
si no es ahora, ahora que la justicia tiene menos, infinitamente menos
categoría que el estiércol;
si no es ahora ... ¿cuándo se pierde el juicio?
Respondedme loqueros (…)
León Felipe, El payaso de las bofetadas y el Pescador de caña: ‎poema trágico español, El Colegio de México


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Générosité gouvernementale de la bande à Sanchez pour les suprématistes catalans, pour les mafieux basques, pour… Quels gens généreux ! Quels hommes de paix ! Capables de vaincre la répugnance inépuisable, normalement spontanée, que provoquent presque partout tous ces malheureux à peine avant-hier encore fiers de leur déclaration de l’indépendance pour quelques instants ou les héros de la meute des tueurs dans le dos, des racketteurs, des balances de leur voisin. Et des questions sans réponse. Pour la Fonderie des Années de Plomb : comment, au sein d’une communauté développée, catholique à fond  et nationaliste bon teint, à un moment donné, l’assassinat a pu devenir l’intérêt public dominant ? Pour les corrompus séparatistes pilleurs de fonds publics pointant toujours leur sale doigt accusateur vers l’extérieur, la confirmation par eux-mêmes de ce que, dans le temps, le droit disait : nemo auditur propriam turpitudinem allegans, c'est à dire, nul ne peut invoquer sa propre ignominie. Ah, ça non, ils ne se considèrent pas abjects du tout ! Comment comprendre, alors, l’entêtement du gouvernement pour les rapprochements vers les prisons basques pour les seconds et la grâce pure et simple pour les premiers, qui ont envoyé chier le gouvernement et la Cour suprême affirmant publiquement qu’ils peuvent se la foutre où on pense, leur grâce, et qu’ils sont d’ores et déjà prêts à recommencer ? En général, pour le droit à l’envers d’aujourd’hui, ce sont les délinquants politiques et les assassins politisés qui méritent justification et compréhension, les pauvres, après avoir gentiment invité à la bataille déchirant l’égalité et la liberté nationales (tous libres et égaux devant la loi ? vous voulez rire !) ou carrément zigouillé leurs semblables sous l’emprise de bouffées délirantes de bonheur pour leur tribu, de justice infinie pour leur clan où ils se reconnaissent entre eux, acclamés par la foule comme des héros. Voyez-vous de quoi on parle quand on parle de ce qu’on parle ? Pour le joueur de bonneteau de Moncloa, réclamer justice revient au même qu’exiger vengeance. Quel cœur plein de noblesse, quelle grandeur d’âme. Si Paris valait bien une messe, quelques nuitées de plus au palais présidentiel grâce à l'appui au Parlement des partis concernés méritent bien tout le dévouement de notre premier ministre… Faut n'avoir honte de rien, d'imposer cette basse politique politicienne, d'en profiter ou, citoyen lambda à des années lumière de toutes ces sales combines, d'y contribuer sans protester.



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La valeur accordée au calme, à la discrétion, à la tranquillité, à l’habitude disparaît au profit de la vitesse, du scandale, de l’impertinence ou de l’hystérie. Aujourd’hui, il faut agresser pour exister. Pas d’activité louable qui n’ait pour but et pour effet d’embêter. Pas de bonheur autrement qu’en troupeau agresseur revendiquant sur tous les toits les pires idioties et affirmant bruyamment l’adhésion aux droits les plus biscornus. La paix profonde, la sérénité qu’enseigne la culture antique, n’intéressent plus personne. Au point qu’on a vite fait de les retirer de l’enseignement après un systématique entraînement à les désapprendre. Je serai à longueur de journée invité à crier, bouger, devenir ce que je suis « parce que je le vaux bien ! ». Exiger, me faire remarquer systématiquement, bousculer le monde à la hauteur de mes moyens pour me sentir original, unique, insoumis à je ne sais quoi… voilà le fond de la nouvelle sagesse populaire au parfum de tinette.

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Civilisés. Nous sommes civilisés comme pas possible. Question esclaves nous n’en avons plus depuis belle lurette, juste de pauvres bougres qui se crèvent la paillasse avec des salaires de misère pour financer tous ceux qui, plus astucieux, vivent de la charité publique, pardon, je voulais dire de la solidarité. On est civilisés, tout de même. La question se pose de savoir précisément de quoi il retourne quand on parle de civilisation. Au Larousse, la civilisation apparaît comme « l’ensemble des caractères propres à la vie intellectuelle, artistique, morale, sociale et matérielle d’un pays ou d’une société ». Aucun jugement de valeur, ça vaut pour tout, depuis les tribus reculées jusqu’aux New-Yorkais de Manhattan pétés de dollars au point d’acquérir un bocal rempli de merde estampillé art contemporain contre une somme équivalente au budget mensuel d’un état africain.

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Le mélomane affiché est une nuisance. Je me souviens d’avoir essayé de regarder des opéras à la télé. Sur Arte, sur la Cinq, avec les costumes les plus ridicules que l’on puisse imaginer et des mises en scène à l’avenant. Ça gâchait le plaisir ! Et toujours le même leitmotiv du commentateur cultureux satisfait : Mozart, Wagner, Bizet, c’étaient des révolutionnaires  et cela suffisait à justifier les cantatrices en strings, Tristan ressemblant à un toutou, etc. Il y a une volonté de s’en prendre au beau qui est pathologique. Incapables de la moindre « création », les médiocres détruisent, salissent. Un ami, vrai mélomane discret, m’expliquait que le public est de plus en plus âgé et que la présence de nouveaux convertis assez exceptionnelle. En majorité, des bobos gauchistes qui ne vont pas au concert pour la musique mais pour l’illusion d’appartenir à une élite. C’est plus une habitude, une manière de s’afficher qu’un goût. Avec ça, on entend souvent des réflexions idiotes énoncées par des responsables culturels, y compris ceux doués d’un certain talent, tenant à faire savoir qu’ils ne détestent pas le rap au nom d’un éclectisme qui refuse de hiérarchiser. Exactement pareil pour la littérature.

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"¿Escritores? Nos ahorraríamos muchas desilusiones no llamando escritor a cualquiera que sabe escribir… Yo conocía a estos escritores: eran por lo general personas de inteligencia poco profunda y horizontes bastantes estrechos (…) Estos cadáveres vivientes se distinguían por la siguiente característica: les resultaba fácil fabricar su propia postura moral e ideológica, ganándose de esta forma el aplauso de la crítica y de una parte importante de los lectores. Ni por un momento creí en el catolicismo de Jerzy Andrzejewski y, tras haber leído unas cuantas páginas de su novela, saludé en el café Zodiak a su cara sufrida y espiritual con una mueca de tan dudoso significado que el autor, ofendido, rompió inmediatamente su relación conmigo. (…) Tener ideales no es gran cosa, lo que sí es una gran cosa es no incurrir en pequeñas falsedades en nombre de grandes ideales. Aquel que tenga miedo del desprecio humano y de la soledad entre la gente, que calle. Pero este miedo es también imaginario –pues la popularidad que se consigue al servicio del lector y de las corrientes de la época no significa otra cosa que tener grandes tiradas, nada más –, y sólo aquel que ha logrado separarse de la gente y existir como un ser singular para más tarde conseguir dos, tres o diez correligionarios o hermanos, sólo este se habrá liberado de la soledad en los límites permitidos al arte. ¿Acaso en alguna ocasión el hombre ha estado en otro lugar que no fuera él mismo? (…) He dedicado mucho tiempo a la reconstrucción de mi pasado, he establecido laboriosamente la cronología, he forzado la memoria hasta el límite buscándome a mí mismo como Proust, pero no hay nada que hacer el pasado no tiene fondo y Proust miente. El artista es aquel que dice: ese hombre habla bien, pero él mismo es un imbécil. O bien: de los labios de este hombre mana la más pura moralidad, pero tengan cuidado con él, ya que él mismo, al no poder satisfacer su propia moralidad, se está convirtiendo en un canalla. Cierta sensación de vergüenza me impide escribir exactamente lo que la gente espera de mí."  

Witold Gombrowicz, Diario (1953-1956)

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On remarque plus le temps qui passe sur les autres que sur soi-même. 

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Visite à l’Abbaye de Sainte-Marie, monastère cistercien de Valbuena de Duero. Emerveillés par la matérialité de l’ensemble du bâtiment (retable de l’Assomption, pure merveille baroque !) et transportés aussi par son immatérialité, celle qui est au-delà de la réalité tangible, et que ni archéologues ni architectes ni restaurateurs ne sauront pénétrer avec le discours rhétorique habituel, bénéfique et rassurant, si souvent pédant, vêtu d'une aura médicale toute blanche, philanthropique mais, hélas, incapable de guérir de la maladie du temps qui passe, « Achille immobile à grands pas », car ni la littérature touristique ni même l’historiographique, incapables d'émotions, ne peuvent l’approcher. Le lieu continue à fournir des données aux savants et du repos aux touristes, riche de ce que nous définissons en termes bourgeois, comme patrimoine ou héritage, mais réserve sa capacité à émouvoir, à vibrer, à communiquer ce que lui seul est capable d'exprimer, aux seules âmes sensibles…

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« Les cathédrales spiritualisent nos villes, elles chantent plus haut que leurs bruits, elles y implantent ce qui leur manquait. Il est trop facile de montrer ce que leur doit l’homme cultivé qui en embrasse toute la beauté, ou le croyant qui y retrempe son âme. Il faudrait montrer ce qu’elles valent pour celui-là même qui s’imagine ne rien leur devoir. Il croit s’en passer , mais il les voit en passant, il y est quelquefois entré par hasard. Même s’il n’a pas trempé ses doigts dans le bénitier, il a senti sur son front l’ineffable baptême d’ombre qui tombe des voûtes ; la médiocrité de sa vie s’est trouvée interrompue et déconcertée pendant un instant. Même s’il n’a pas admiré, il s’est du moins étonné ; une prière informe a peut-être émergé de son cœur. Ces cathédrales sont à la fois ce que nous serions incapables de recréer et ce qui nous représente encore. Supérieures sans nous être étrangères, leur magnificence se déploie aux confins de notre indigence. » Abel Bonnard, Ce monde et moi


Et ce lien pour les curieux qui auront le temps de s’embarquer avec Huysmans dans l’aventure d’une tournée à bord d’une cathédrale vaisseau (immobile) de guerre…   

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