Ce que nous appelons
lire est une curieuse opération des yeux. En réalité on ne lit pas les mêmes
mots ; on invente la phrase. On ne remarque pas s’il y manque un mot, s’il
y a une faute d’impression, etc. Elle est reconstituée sur quelques signes.
Quand nous disons :
j’aime cet auteur ou tel livre, c’est une impression que nous conservons d’une
lecture : on ne se souvient de rien. Si je dis (et bien convaincu) :
Bossuet est le plus grand prosateur, je ne pourrais citer une seule phrase. De
même pour Guerre et Paix. Je ne me
rappelle rien ; je sais seulement que je le tiens pour le plus grand des
romans.
(…)
Il faut croire
que la lecture est (on suppose) une double création : celle de l’auteur et
celle du lecteur.
Jacques CHARDONNE
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